La psychiatrie en tant que jeune diplômée est-ce raisonnable

[AmThLi]

La réflexion autour du "faire/agir" m'a interpellé, je n'avais pas envisagé les choses sous cet angle, et c'est bien de me rappeler que l'on a aussi une qualité de présence à assurer (surtout en psy) et pas seulement des tâches à organiser et réaliser...

Une présence, un "être-là" pour accueillir l'autre et que la rencontre se fasse. Mais ça les technocrates des IFSI ne te le diront jamais.

J'arrivais à faire mon travail correctement, mais je ne voyais pas ce que j'apportais aux patients, d'un point de vue humain. Alors qu'en psy, je suis plus à l'aise, le domaine en lui même me plait beaucoup, et j'approfondis ce que j'ai appris à l'IFSI quasiment tous les jours...

Tout est dit. Si les autres t'emmerdent à te faire des remarques réponds leur ça.

[Asten]

Salut! Je peux comprendre tes interrogations. A vrai dire, je me suis moi même interrogé à ce sujet à plusieurs reprises.

Comme dit plus haut, la question essentielle est: T’épanouis-tu dans ton travail ?
Si la réponse est oui, alors ne cherche pas plus loin et profites-en.

Dans l'inconscient collectif être un IDE se résume à la réalisation d'un certain nombre de soins techniques... Et pourtant, on voit bien que la réalité est toute autre!!
Quand j'étais ESI une cadre m'avait dit "on peut prendre n'importe qui dans la rue et au bout de quelques heures il saura poser des KT... ce n'est pas pour autant qu'il serait soignant !"

Dans 10ans, tu te vois en somatique ? Moi, non. Alors, pourquoi allez faire quelque chose qui finalement ne m'attirerait pas ?
Pour prouver quoi ? A qui ?

J'ai toujours trouvé étrange cette pseudo-jalousie de certains collègues du somatique, dénigrant notre travail...comparant leurs conditions "difficiles" d'un travail stressant/usant et de ne jamais... **au grand jamais**... souhaiter être à notre place.
Au lieu de me culpabiliser de mes sois-disant "trop bonnes conditions de travail", je me félicite d'avoir un travail que j'aime, qui m’épanouis et dont je peux être fier en rentrant chez moi.
J'ai également remarqué qu'à la fin du mois, je touchais un salaire. Je me dis qu'il ne doit pas m'être uniquement filé de bonne grâce

Personnellement j'admire les soignants en somatique. Ils font un travail que je n'aimerai pas, dont je ne me sentirai pas capable/à ma place.
Inversement, certains m'ont déjà témoigné la même chose.

La psychiatrie (les patients en!) a besoin de personne qui aiment et qui s'y intéressent. Je suis bien content que les personnes qui dénigrent cette spécialité ne souhaitent pas y mettre les pieds.

Et juste pour finir, "on est tous le con d'un autre". Malheureusement.

[lovelyx]

Je suis très intéressée par la psy également, c'est là où je me sentais le mieux, donc perso je fonce J'attend juste la réponse, et je suis jeune diplômée. On s'en fou des autres et de leur blabla ! Pourquoi se priver ?

[Florent L]

D'autre part la psychiatrie a mauvaise presse depuis longtemps chez les IDE, déjà du temps des deux diplôme (IDE et ISP) c'était pas top, le DE unique n'a rien arrangé, lire ce qu'en dit Griffard sur son site Psychiatrie infirmière...

Surtout quand les "nouveaux diplômés" (c'était leur surnom) ont débarqué en psychiatrie...dans de nombreux coins, les relations étaient venimeuses, ces jeunes diplômés étaient remplis de morgue et de suffisance envers les ISP.

[AmThLi]

Oui et ce n'est pas seulement ça, la vision des choses et la formation étaient radicalement différente.
Il faut aussi dire que c'est ça qui a amené la culture "chariot de soin" en psychiatrie.

[Florent L]

Les années 90 ont été une plaie pour la profession, de toute façon....les ISP allaient faire valider leur DE classique en services de soins et se retrouvaient largués dans des services comme les urgences, et les "nouveaux IDE" avec leurs heures de psy au compte-gouttes se retrouvaient (se retrouvent??) largués en psy après le diplôme. Génial comme organisation, on voit que c'est bien pensé.

Sans compter le mauvais coup fait aux ISP, lorsque la FNI (syndicat des IDEL) a porté l'affaire de validation des diplômes devant le Conseil d'Etat. Pas glorieux, ce qu'ont fait les IDEL....

Mauvaise formation, manque de moyens....comme d'habitude, la psychiatrie reste la parente pauvre.

[AmThLi]

Oui c'est pas bien glorieux tout ça.

Après, en France en tout cas, la psychiatrie souffre d'une longue histoire faite de stigmatisation, d'exclusion du champ social, de repoussoir, etc... Ce n'est pas étonnant qu'elle n'ait pas bonne presse et que les moyens n'y soient pas.
Les moyens c'est une chose, cela dit, mais tout aussi important ce sont que ce qui veulent y bosser soient des gens volontaires et créatifs. Sinon, on finit en gardiens...

[Florent L]

Oui, mais ce n'est pas une spécificité de la psy: si les gens ne sont pas volontaires, ailleurs, ils deviendront des pousse-seringues.

Mais la psychiatrie a toujours été le parent pauvre, que ce soit avant 1992 et 1995, quand les IDEL ont poussé les infirmières générales à refuser les accès aux ISP, (le FNI agissant lui en 1996).

Simplement, maintenant cela se voit plus car 20 ans ont passé, et les relais de transmission se sont épuisés en même temps que les ISP.Il suffit d'ailleurs de voir les équipes actuelles, souvent bien plus jeunes qu'avant.

Or la psychiatrie demande énormément d'expérience, et ce n'est pas sain ces situations, d'autant plus que la transition ne s'est pas toujours fait dans la meilleure ambiance....partis les ISP, parties les mémoires de psychiatrie....sans parler de la formation IFSI, à la fois légère et avec certains préjugés de la part même des formateurs.

[AmThLi]

Bah tu sais, au départ, les premiers ISP n'avaient pas d'expérience non plus.
Par contre ça demande une certaine disposition d'esprit pour que ça se passe bien, car il faut apprendre vite et très vite comprendre ce qui se passe.

Mais c'est vrai que c'est dommage que quelque chose ne se soit pas transmis des ISP aux IDE (après j'y met le bémol, ça dépend aussi un peu des équipes, il ne faut pas tout voir trop noir).
Ce qui s'est perdu c'est aussi une certaine culture du soin psychique, mais c'est aussi parce que les médecins psychiatres ont bien souvent une conception plus réduite de leur champ d'action, ils ne font plus de psychothérapie, d'ailleurs ils s'en foutent, or ce sont eux qui impulsent les orientations de service.
On a beaucoup segmenté dans les services, les IDE font ci, les AS font ça, le médecin fait ci, le psycho fait ça, et du coup, plus personne ne fait rien de constructif. Les prises en charge deviennent vides de sens.

[Florent L]

Certes oui, mais c'est l'essence même du mot ISP qui est désormais vidée de son sens.

Je trouve cela dangereux de considérer la psy comme une discipline "banale", ce qu'on a fait en éliminant les ISP....or ces derniers étaient porteurs d'une spécificité inclue même dans le mot.

Après, on pourrait aussi envisager comme les IBODE ou IADE un cursus post DE, ce qui serait d'ailleurs très valorisant pour les infirmiers exerçant en psychiatrie.Même si au vu de la politique budgétaire et de la considération envers la psychiatrie, je n'entretiens guère d'illusions.

[AmThLi]

Oui à défaut ça serait pas mal.

De toute façon il n'y a plus, ou presque plus, de psychiatrie de secteur, donc de fait "ISP" ne veut plus rien dire. Le "secteur psychiatrique" de ISP c'est pas le secteur d'activité mais ca fait référence à l'organisation des soins sectorisée.

En effet pour moi ce n'est pas une discipline banale et c'est en la réduisant à une discipline médicale comme une autre qu'on en a tué l'essence. Et les "centres psychothérapiques" sont devenus des "établissements de santé mentale", au prix de la perte du maillage institutionnel qui donnait du sens au soin.

[Florent L]

Bah, de toute façon cela ne se fera pas....y'a plus un centime dans les caisses, et ce n'est sûrement pas la psychiatrie qui passera en premier....

En tout cas, pour reprendre la juste remarque d'asten:

Quand j'étais ESI une cadre m'avait dit "on peut prendre n'importe qui dans la rue et au bout de quelques heures il saura poser des KT... ce n'est pas pour autant qu'il serait soignant !"

Certes, cela peut s'appliquer à tout domaine médical, mais en psychiatrie cela prend encore plus d'importance.

Donc pour tous les jeunes DE.....vous aimez la psychiatrie?

Foncez !!

Et n'écoutez que ce que vous ressentez, pas les avis de gens qui parfois n'y ont même pas mis les pieds....après, il ne faut pas non plus trop idéaliser, on peut vite être déçu.

Mais comme la réa, je pense qu'il y a un feeling particulier pour être en psychiatrie, quelque chose de très personnel.En clair, on aime ou on n'aime pas, mais cela ne laisse pas indifférent.

[AmThLi]

Pour moi on peut pas y venir pour le confort des horaires ou parce qu'il n'y a que là qu'il y a de la place. Il faut y croire, s'y engager...

[Florent L]

Bon, dans l'absolu, partout....mais la psy, il y a un petit quelque chose de plus.Disons que si la personne y vient par hasard, le manque de certaines qualités ve avoir plus d'impact que dans un service "classique".

Après, hein...quand on voit des formateurs IFSI (des IDE) parler de "s'enfermer" en psy et qu'on perdra tout, qu'on ne voudra plus de nous...et eux, en tant que formateurs IFSI, ils sont quoi, au juste ?L'incarnation même de ce qu'ils dénoncent....

[AmThLi]

Surtout que l'on peut s'enfermer partout si on est dans cette disposition là... il y a des gens qui font leur carrière en réa et qui s'y sont clairement enfermés. D'autres qui y font leur carrière en y restant vivants.
La psy pareil.
Bref ne jamais écouter les formateurs au sujet de la psy sauf éventuellement (et encore) s'ils en viennent.