Infirmier en EHPAD ou magicien ?

[melie14]

Je bosse en EHPAD depuis quelques mois (après 2 ans sortie totalement de la vie active) Au début, tout allait bien. Et puis j'ai commencé à être confrontée à des troubles de comportement, notamment chez deux résidentes.

L'une, aveugle depuis peu (DID) perd petit à petit tous ses repères et se retrouve désorientée très régulièrement (se déshabille en public, confond les prénoms de ses proches, etc...) mais pas constamment.
La famille me fait régulièrement appeler le médecin, qui prescrit et represcrit de l'HALDOL (5 gouttes, puis 10, puis 12,...) sans effet convaincant. Les AS, elles, me demandent tous les jours de faire quelque chose... Mais quoi ? La seule solution pour qu'elle ne soit pas perdue est de lui donner des repères, ce que nous faisons régulièrement (l'heure, le date, le temps qu'il fait, le lieu où elle se trouve, etc...) mais il faudrait TOUT LE TEMPS être près d'elle pour bien faire! Alors concrètement, je ne sais plus quoi faire et on me met la pression pour que je fasse quelque chose!

Même topo avec la dame n°2, très déprimée avec un soupçon d'hystérie, qui se laisse tomber et refuse de manger (diabètique insulino dépendante elle aussi...) à tel point que nous sommes limite maltraitants quand nous lui donnons à manger. Le doc l'a déjà vue avant hier et n'a fait que prescrire un bilan sang et un scan cérébral. Après 3 tentatives infructueuses de mise sous antidép, elle aura bientôt une cs psy (rdv obtenu aux forceps) pour adapter le traitement, mais en attendant...

Je suis la seule IDE de la maison et l'IDEC est en congé. Je n'ai personne avec qui partager mes questionnements et mes doutes sur la conduite à tenir auprès de ces deux dames et je sens qu'on attend de moi des miracles que je ne peux pas faire...
Avez-vous déjà eu le sentiment qu'on vous demande l'impossible? Ou peut-être voyez-vous des actions que je pourrais mettre en place auprès de ces personnes auxquelles je n'aurais pas pensé. Je suis ouverte à la critique, d'autant que je n'ai pas d'égal à portée de main pour me rassurer ou me donner d'autres clés...

D'avance merci !

[augusta]

Juste une question en passant: vous forcez la dame n°2 à manger?

[Tonksy]

Huum, effectivement c'est jamais tout rose tous les jours, et surtout quand on est seule et sans soutient.
Pour la dame N°1, j'ai un résident qui a besoin toutes les 5 minutes qu'on lui rapelle où elle est et pourquoi, j'ai eut la chance d'avoir des résidents qui veulent bien rester à côté d'elle (à tour de rôle, ils ont de la patience mais faut pas pousser mémé dans les orties!^^) et qui discutent avec elle, qui lui rappelle réguliérement où elle est et qui peuvent détourner la conversation pour lui enlever de la tête ses questionnnements... A voir si quelques un de tes résidents peuvent faire de même?

quand à la dame n°2, pourquoi refuse-t-elle de s'alimenter? Les aliments sucrés aussi? (Genre dessert, même les plus recalcitrants ont toujours une petite place pour le dessert!!^^) Il faudrait nous en dire un peu plus je pense, est-ce que simplement elle baisse les bras et n'a plus envie de vivre, ou est-ce d'origine pathologique ou je ne sais quoi?

[lancette]

Bonsoir Melie14, Je suis heureuse de te relire , j'avais apprécié ton poste sur "la souffrance de nos anciens".Comme toi , je travaille en EHPAD et je rencontre le même type de problèmes . Mais il faut réussir à faire comprendre et admettre aussi bien à l'équipe qu'aux familles que l'on fait pour le mieux , tant sur le plan des ttt que dans la prise en charge au quotidien , et que l'on ne peut pas tout , que la maladie d'ALzheimer ou autres dégénérescences ne sont, à ce jour ,pas guérissables et que l'on comprend les difficultés mais qu'on n'a pas le remède miracle....En même temps , il faut trouver la force et "la pêche " pour continuer et tu les trouveras auprès d'autres résidents plus chanceux qui t'attendent le matin avec le sourire et te donnent toute leur confiance ....

[Norma Colle]

avant que les situations ne dégénèrent avec maltraitance et épuisement ou "hostilité" "rebond" de l'équipe soignante nécéssité absolue de faire comprendre aux médecins qu'il faut mettre en place des consultations de géronto-psychiatre suivie ensuite parfois d'hospitalisation en géronto-psychiatrie pour évaluation du comportement et des besoins du patient.

[binoute1]

consultation avec un gériatre ? qui pourra peut être proposer un ttt plus adapté...

[melie14]

Voilà des nouvelles! (désolée pour le retard)

La première dame va mieux. On a changé son hypnotique, elle dort beaucoup mieux, est moins fatiguée et la journée, on l'installe dans un fauteuil plus bas que le sien (c'est tout con mais de fait, elle se souvient que fauteuil bas = salon = monde autour d'elle et du coup elle ne se déshabille plus en public...)

La seconde dame, par contre, je n'ai pas eu d'autre choix que de la faire hospitaliser du bout des lèvres, et uniquement parce que, en l'absence d'IDE le week-end chez nous, elle serait à coup sûr tombé en coma hypoglycémique au bout d'un moment, à moins de l'attacher pour la forcer à manger...
Au bout de 15 jours d'hospi en gériatrie, ils ont diagnostiqué un état mélancolique (alléluia!!)
Conduite "thérapeutique" adaptée par l'hosto : SNG + contention (puisque Madame arrachait sa SNG.) L'IDE du service que j'ai régulièrement au téléphone m'expliquait hier qu'ils l'avaient sondée pour pouvoir continuer à lui administrer ses antidép en espérant qu'elle sorte de sa mélancolie (et sinon, l'ATD qu'ils lui donnent, c'est toujours de l'ATHYMIL... le même ttt qu'elle avait depuis des mois et qui marche aussi bien sur elle que du canderel!)
C'est con, je ne peux rien y faire et je n'y suis pour rien mais à chaque fois que je pense à cette dame et que je l'imagine attachée avec sa sonde, ça me fout en rogne. Pourquoi n'est-elle pas hospitalisée en psy? Pourquoi ne pas avoir pensé aux sismos? (là où je bosse tout le monde m'a prise pour une barbare quand j'ai évoqué cette idée mais j'ai travaillé dans un service de psy où les électrochocs faisaient + que leurs preuves chez des PA mélancoliques résistantes aux ATD) Et puis qu'est ce qui motive les médecins qui s'occupent de cette dame à la laisser sous ATHYMIL alors que ça ne marche pas?? Bref, ça me fait mal au coeur et j'avais besoin de partager ça avec des soignants qui pourront éventuellement comprendre et m'aider à relativiser un minimum...
Merci à celles et ceux qui m'auront lue jusqu'au bout