S'attacher a un patient..

[vatlilo]

Coucou!
J'ai une petite question, ou une petite aide à demander..
Voila, je suis ESI 1ere annee,j'ai commencé les cours depuis le 1e fevrier, apres moins d'un mois de cours, on nous envoie en stage..
Pour ma part, je suis dans un service lourd, avec des gens tres malades et le cadre m'a dit " ici, ils s'en sortent jamais" ...Ah..rassurant...

Sauf que je ne pense pas encore avoir assez cette conscience professionnelle, et je me suis tres vite attachée à une petite dame du service.. Une vraie petite grand mere, toute mignonne , toute gentille, qui a le visage qui s'illumine quand elle me voit rentrer..
Cette dame n'a pas beaucoup de visites, alors j'essaie dès que je passe devant sa chambre d'aller lui demander si ca va, et comme elle me dit "quand j'ai un sourire du personnel , ca eclaire ma journée.."

Bref, certaines equipes du service sont tres grognons et n'hesitent pas a lui dire "debrouillez vous, vous pouvez le faire" quand elle veut aller au toilettes, alors qu'elle tient a peine sur ses jambes..

Elle a craqué ce soir, nous etions toute l'equipe à la reconforter, et moi ca me rendait malade, a part lui sourire, je ne pouvais pas sortir un seul, mot, j'avais la gorge nouée...
Pensez vous que c'est une reaction normale de s'attacher à des patients? Comment reagir dans ces cas la? J'ai tres peur...Comme elle a peu de visites , je pensais aller la voir en dehors de mes heures, mais je ne pense pas que cela se fasse...
Vos conseils?

[Priscilla.K]

Bonjour, ayant travaillée dans un EHPAD pendant quelques mois avant mon entrée en IFSI, je comprends tes sentiments. Ce sont en général de vieilles personnes, qui n'ont pour certaines, plus de famille, qui se sentent seules, et toi tu arrives, tel le messie. J'ai vécu ça aussi. Au début, ça me touchait de les voir si seules, que le personnel soignant les laissé un peu de côté. Quand je passais devant une chambre d'une vieille patiente, je m'arretais pour discuter quelques minutes, elle était vraiment heureuse, et me disait " Si vous saviez comme ça me fait plaisir de vous voir, que vous me parliez ". Quoi de mieux que le sourire d'une petite mamie ?

A toi de faire la part des choses. Tu peux leur parler, leur dire que tu es présente pour eux, les rassurer, tout en restant professionnel. Ce qui est difficile, car la limite entre le professionnalisme et nos sentiments est très mince ...

Rendre visite à cette petite mamie en dehors de tes horaires de travail, est très gentil, mais à ta place je ne le ferais pas car tu vas vraiment finir par t'attacher, et si cette personne décédée tu ne t'en remettrais pas.

J'espère que mon commentaire pourra t'aider. Bonne journée.

[rubis226]

Coucou!
J'ai une petite question, ou une petite aide à demander..
Voila, je suis ESI 1ere annee,j'ai commencé les cours depuis le 1e fevrier, apres moins d'un mois de cours, on nous envoie en stage..
Pour ma part, je suis dans un service lourd, avec des gens tres malades et le cadre m'a dit " ici, ils s'en sortent jamais" ...Ah..rassurant...

Sauf que je ne pense pas encore avoir assez cette conscience professionnelle, et je me suis tres vite attachée à une petite dame du service.. Une vraie petite grand mere, toute mignonne , toute gentille, qui a le visage qui s'illumine quand elle me voit rentrer..
Cette dame n'a pas beaucoup de visites, alors j'essaie dès que je passe devant sa chambre d'aller lui demander si ca va, et comme elle me dit "quand j'ai un sourire du personnel , ca eclaire ma journée.."

Bref, certaines equipes du service sont tres grognons et n'hesitent pas a lui dire "debrouillez vous, vous pouvez le faire" quand elle veut aller au toilettes, alors qu'elle tient a peine sur ses jambes..

Elle a craqué ce soir, nous etions toute l'equipe à la reconforter, et moi ca me rendait malade, a part lui sourire, je ne pouvais pas sortir un seul, mot, j'avais la gorge nouée...
Pensez vous que c'est une reaction normale de s'attacher à des patients? Comment reagir dans ces cas la? J'ai tres peur...Comme elle a peu de visites , je pensais aller la voir en dehors de mes heures, mais je ne pense pas que cela se fasse...
Vos conseils?

coucou
cela ce sent dans tes propos que tu n'a pas pris de recule par rapport à cette patiente. Il faut apprendre à te protéger le temps et l'expérience t'apprendront ça. Il faut également protéger ta patiente tu vas lui donner beaucoup de choses et quand tu partira (fin de stage) elle va tout perdre et se retrouver dans la situation avant toi. Est ce que tu comprend pourquoi il faut éviter de s'attacher ?
elle aussi s'attache à toi. Voila pourquoi il faut rester professionnel aider, faire, rassurer, communiquer mais ne pas s'attacher prendre de la distance.
bon courage

[vatlilo]

Merci pour vos reponses!

Justement je n'avais pas pensé à l'issue de mon stage comment cette petite dame allait reagir, et comment elle le prendrait si je partais...
Mais en meme temps ce n'est vraiment pas facile, cette dame n'a jamais de visites...

[Chronicles]

Ne lui fais pas de promesses que tu ne pourras tenir. Idem pour les faux espoirs... C'est terrible de devoir dire "non" quand on pense "oui", mais il faut savoir rester à bonne distance sinon c'est une catastrophe. Des petites mamies comme ça tu vas en croiser un sacré paquet durant ta carrière.

[AmThLi]

C'est pas honteux de s'attacher à quelqu'un. Tant que ça ne nuit pas à la prise en charge. Soyons honnêtes, on a tous eu en stage des patients avec qui le courant passait bien, et avec qui on avait des relations cordiales, voire chaleureuses, sans que ça ne nuise au soin !

Si ce qui t'angoisse c'est comment elle va réagir quand tu partiras de ton lieu de stage, prend le temps de lui expliquer.

Se protéger... C'est intéressant ça, de quoi se protège t'on réellement ?

[augusta]

C'est pas honteux de s'attacher à quelqu'un. Tant que ça ne nuit pas à la prise en charge. Soyons honnêtes, on a tous eu en stage des patients avec qui le courant passait bien, et avec qui on avait des relations cordiales, voire chaleureuses, sans que ça ne nuise au soin !

Si ce qui t'angoisse c'est comment elle va réagir quand tu partiras de ton lieu de stage, prend le temps de lui expliquer.

Se protéger... C'est intéressant ça, de quoi se protège t'on réellement ?

J'aime bien
De quoi ou de qui devrait-on se protéger finalement? Et est-ce réellement nécessaire?
Je suis d'accord avec toi, il y a des patients avec qui le courant passe bien, et d'autres vers qui il est difficile d'aller.
C'est parce que nous sommes humains (patients/soignants), et non des robots du soin qu'il en est ainsi je présume. C'est très bateau comme idée mais bien réelle pourtant.

Sans parler du transfert...
Que te renvoie "cette petite grand-mère toute mignonne"?
Ce qui est important c'est qu'elle ne souffre pas, elle, de ton absence quand ce stage se terminera. Visiter les patients en dehors des heures de travail nous a toujours été fortement déconseillé dans notre IFSI. Je me demande même si ce n'était pas carrément interdit.

[des idées d'IDE]

ouf je suis rassurée par leses deux derniers commentaires.
Nous ne sommes pas des robots, on a forcément des sentiments. Maintenant il ne faut pas que nos sentiments bouleversent notre façon de soigner, dans un sens comme dans l'autre. On ne peut pas négliger un patient qui nous est antipathique ou ne s'occuper que de celui qu'on préfère.
Mais c'est normal d'avoir un attachement particuliers. Là où il faut faire attention c'est à la part accordée dans notre vie privée.
Là je suis en stage en EPHAD où j'ai une vraie découverte de la personne âgée et quelques résidents en coup de coeur. J'ai l'ai écrit dans un billet de mon blog, il y en a une qui m'émeut particulièrement. Maintenant, je sais que je n'ai pas la place dans ma vie privée à lui accorder. J'essaye d'être attentive à ne pas envahir la sienne non plus. Au début, on m'envoyait toujours faire sa toilette, j'ai essayé d'alterner avec d'autres pour ne pas être exclusive pendant les 10 semaines de mon stage, à ne pas être CELLE qui s'occupe d'elle. ça avoir trop de recul et inhiber nos sentiments, je pense qu'il savoir ne pas non plus se laisser envahir et envahir l'autre.

[AmThLi]

C'est un peu ce que je penses aussi... On est pas des robots. Or finalement, soigner sans rien ressentir, en se protégeant systématiquement derrière d'infranchissables barrières, c'est un peu fonctionner en machine. C'est dommage et de toute façon je crois pas que ça soit possible.

Se protéger, finalement, c'est un peu se mettre en situation d'évitement, face à l'angoisse, non ?

Sans parler du transfert...

Ah bah c'est la grande question !
Mais ça, ça met des années à se décortiquer, et y'a pas trente-six façons de le faire !

Visiter les patients, je me suis aussi posé la question. En soi, je pense pas que ça soit interdit, mais faut voir ce qu'il y a derrière... c'est au cas par cas je pense.

Maintenant il ne faut pas que nos sentiments bouleversent notre façon de soigner, dans un sens comme dans l'autre. On ne peut pas négliger un patient qui nous est antipathique ou ne s'occuper que de celui qu'on préfère.

Oui, et plutôt que "juste-distance" ou je sais pas quoi, je parlerais tout simplement de "neutralité bienveillante". Et je ne choisis pas ce concept par hasard

[Nymphette]

Bonsoir,

Eh bien, s'attacher à un patient ne me choque pas non plus. Effectivement nous sommes humains, nous éprouvons des sentiments...
Ce qui me semble également important dans cette situation là, c'est d'aborder avec l'équipe tes propres ressentis, et tes craintes par rapport à la relation que tu as construite avec cette "petite" dame.
C'est très intéressant que tu viennes nous en parler, tu as su remettre en question ta pratique, en pensant à toi et au bien-être du patient.
C'est un très bon sujet d'analyse de pratique !

[seolane]

Bonjour,

Alors, le sujet m'interpelle particulièrement. ESI en 3ème année, en stage en court séjour gériatrique, j'ai dans le secteur que je prends en charge une dame de 98 ans, avec qui le feeling est passé tout de suite. Je m'en suis occupée comme des autres patients, mais avec peut être un peu plus de "quelque chose".

Je dis j'ai mais en fait c'est j'avais : cette dame est décédée hier soir : ce n'était pas une surprise, son état se dégradait depuis qq jours. Pendant ses derniers instants et jusqu'au bout, je suis restée avec elle, en lui tenant la main.

Oui, j'ai versé une petite larme, mais je suis restée professionnelle. C'était important pour moi de l'accompagner jusqu'au bout, j'ai laissé parler mes sentiments mais celà n'a pas influencé ma prise en soins.

A mon sens, en tant qu'humain, l'attachement est qq chose qu'on ne maitrise pas et c'est bien, tant que notre coté soignant reste lucide sur la place que nous avons dans cette relation. Prendre la place de la famille, non, rendre visite en dehors du temps de travail, non plus, ce n'est pas notre rôle mais apporter la chaleur d'un sourire, une présence réconfortante, un soutien et des gestes adaptés, oui, en gardant à l'esprit que nous sommes juste de passage dans la vie de nos patients et qu'il faut savoir garder la juste distance.

Enfin, je crois ...

[augusta]

+1 Seolane!

Ce que tu écris est très mesuré, tu expliques très bien ce que tu as ressenti/fait....et malgré tout, tu es restée à ta place.
On peut donc donner beaucoup tout en restant à sa place.
Pour ça je pense qu'il faut quand même bien se connaitre, c'est-à-dire être conscient de ses propres limites.

[MarieChoux]

Un des problèmes que tu rencontreras tout au long de ta carrière et ce questionnement doit te suivre tout le temps.

A mon premier stage de première année j'ai eu le même problème que toi. Pourtant j'avais prit mes distances avec cette patient, et pour moi je restais toujours professionnelle durant les soins.
Mais le dernier jour de stage, elle s'est mise a pleurer, elle était bouleversée que je parte. J'ai eu le droit "mais qu'est ce que je vais devenir sans vous ?" "Mais vous reviendrez me voir ?" .... Et la CHOC ! Je n’étais pas préparer, grosse remise en question, ma réaction face a cette patiente tangué entre mon professionnalisme et moi en tant que personne.

Et je me suis rendu compte que mon comportement était interprété différemment avec cette patiente . Maintenant inutile de te dire que je met tout en œuvre pour ne pas retomber dans ce genre de situation !

Bon courage

[AmThLi]

concrètement que fais-tu ?

J'ai eu le droit "mais qu'est ce que je vais devenir sans vous ?" "Mais vous reviendrez me voir ?" .... Et la CHOC ! Je n’étais pas préparer, grosse remise en question, ma réaction face a cette patiente tangué entre mon professionnalisme et moi en tant que personne.

intéressant, selon toi que s'est-il passé à ce moment-là ?

[LMESI]

Attention, au-delà de l'attachement, il y a certains patients qui "manipulent", consciemment ou non... Je pense qu'il y a une manière d'annoncer un départ pour éviter les larmes : il s'agit de mettre en avant notre politesse pas le fait que nous même nous sommes tristes de quitter les patients par exemple. Car cela finalement n'est pas professionnel : notre but est d'aider les gens à avancer même après notre départ, pas de leur montrer qu'on est attaché etc.

Beaucoup d'infirmiers dans leur début font l'amalgame. Un sujet de TFE ça!