Réflexion sur la contention
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Réflexion sur la contention
Bonjour à tous.
J'avais déjà posté sporadiquement sur ce forum, et je reviens pour vous faire part de mes interrogations quand à des aspects les plus controversés de notre profession, la contention physique (là ou je bosse c'est contention en 5 points, ventrale + chevilles + poignets)
Jeune diplômé, j'ai travaillé dans plusieurs pavillons fermés, j'ai constaté des recours divers à la contention, et j'ai l'impression qu'il y a une grande variabilité dans l'application de cette mesure selon les équipes, les médecins... Et je m'interroge, de plus en plus face à deux situations vécues récemment.
La première, un patient transféré dans notre chambre d'isolement depuis la maison d'arrêt de la ville où je travaille. Délirant à son entrée, mais sans agressivité manifeste. Confus, désorienté, peut être un peu haut verbalement à son arrivée. Il passe la première nuit en contention, ok, c'est le protocole de l'hôpital pour les transferts de la maison d'arrêt, en attendant d'être vu par un PH.
Le lendemain, le PH regarde le dossier: le monsieur a des antécédents de passage à l'acte agressif, de fugue, qui remontent à des années. Il est également atteint du VIH, et à une plaie conséquente à la jambe. Même si le comportement du patient demeure stable, la contention est maintenue. Cela durera pendant 5 jours, avant une "semi levée de contention" complètement ridicule à mon sens (on est contenu ou non, comment justifier auprès du patient qu'on ne lui laisse qu'une main ou un pied détaché ?). Finalement il terminera son hospitalisation décontenu avant le retour en maison d'arrêt.
Ce qui m'a gêné, c'est pourquoi la contention aussi longtemps ? Le PH (et une partie de l'équipe) se défendent en arguant les antécédents, les risques. J'entends bien. Mais à ce stade, cela veut-il dire que l'on doit contenir tous les patients du moment où ils délirent et se montrent un poil agressifs verbalement ?
Deuxième situation: un jeune homme, première hospitalisation en psychiatrie, très tendu et angoissé (et bien persécuté aussi), adressé pour hétéroaggressivité dans un contexte familial compliqué. Bien que tendu, sa première soirée se déroule sans incident. Dès le lendemain, visites multiples de plusieurs "amis" puis de la mère (qui est dans son vécu, la persécutrice). Cette dernière dit vouloir faire sortir son fils -> passage du PH de garde -> la mère change d'avis, le patient s'énerve dans la salle de visite, et veut sortir -> appel de renforts. Le patient tente de forcer le passage, nous sommes obligés de le maitriser physiquement. Si il résiste, à aucun moment il ne donne de coup aux soignants, il tente juste de se dégager. Sur consigne du médecin, isolement + contention, à lever au moment du repas du soir (sachant que le monsieur a été bien sédaté). Le soir, mes collègues refusent de lever la contention, disent vouloir attendre le passage du PH le lendemain. Le lendemain, maintien de la contention par le PH du matin, à réévaluer l'après midi. L'après midi, le PH décide de lever la contention, un collègue s'y oppose. Je me range du côté du PH. Contention levée, aucun problème, je me fait pourrir par mon collègue (qui n'est pas infirmier dans l'unité mais fait partie d'un pool de remplacement...) qui invoque "la solidarité de l'équipe" et dit qu'en gros je me positionne contre eux. Bon admettons m'enfin il était tout seul avec moi quand le PH à pris la décision.
Ce qui me gène: J'ai l'impression que la contention est vue comme un outil punitif par certains. Si je ne nie pas le risque d'hétéroagressivité du patient, je me demande si la contention était obligatoire sur une telle durée. Un isolement avec surveillance renforcée n'aurait-il pas suffit par la suite ? Parce que la contention dans l'immédiat oui, pour isoler le patient, lui permettre de se calmer avec l'effet du traitement en prime. Mais une fois la "crise" passée ? L'invocation du "risque" justifie-t-elle de laisser la personne attachée plus d'une journée ? Sachant que la plupart des infirmiers demandaient deux jours au PH.
Voilà... Alors attention, je ne suis pas dans la critique bête de la contention et de mes collègues, mais je me pose des questions. Parce que j'ai l'impression que les conditions d'application de cette mesure sont très floues, et peuvent être interprétées différemment par chacun. Et que tomber dans le punitif, ou dans l'excès en invoquant la sécurité me parait aisé. J'ai parfois le sentiment que la contention sert parfois un rapport de force qui me semble inadapté à notre profession.Quelles conséquences pour le patient ? Je ne suis pas à leur place mais je suppose que cela doit être traumatique dans leur vécu parfois. Alors voilà, peut être est-ce un point de vue un peu naïf de ma part, et que je manque d'expérience. D'où ce message, histoire d'avoir des avis, ou des récits qui vous sont propres, et me permettre de voir les choses avec un peu plus de recul. J'ai tenté d'en parler un peu sur mon lieu de travail mais cela n'a pas abouti à des échanges constructifs. J'ai eu droit à des "ca fait 20 ans que je bosse en psy donc je sais ce que je dis" et mon cadre de santé m'a conseillé de "rester à ma place". Donc je n'ose plus vraiment lancer des réflexions sur les prises en charge.
J'avais déjà posté sporadiquement sur ce forum, et je reviens pour vous faire part de mes interrogations quand à des aspects les plus controversés de notre profession, la contention physique (là ou je bosse c'est contention en 5 points, ventrale + chevilles + poignets)
Jeune diplômé, j'ai travaillé dans plusieurs pavillons fermés, j'ai constaté des recours divers à la contention, et j'ai l'impression qu'il y a une grande variabilité dans l'application de cette mesure selon les équipes, les médecins... Et je m'interroge, de plus en plus face à deux situations vécues récemment.
La première, un patient transféré dans notre chambre d'isolement depuis la maison d'arrêt de la ville où je travaille. Délirant à son entrée, mais sans agressivité manifeste. Confus, désorienté, peut être un peu haut verbalement à son arrivée. Il passe la première nuit en contention, ok, c'est le protocole de l'hôpital pour les transferts de la maison d'arrêt, en attendant d'être vu par un PH.
Le lendemain, le PH regarde le dossier: le monsieur a des antécédents de passage à l'acte agressif, de fugue, qui remontent à des années. Il est également atteint du VIH, et à une plaie conséquente à la jambe. Même si le comportement du patient demeure stable, la contention est maintenue. Cela durera pendant 5 jours, avant une "semi levée de contention" complètement ridicule à mon sens (on est contenu ou non, comment justifier auprès du patient qu'on ne lui laisse qu'une main ou un pied détaché ?). Finalement il terminera son hospitalisation décontenu avant le retour en maison d'arrêt.
Ce qui m'a gêné, c'est pourquoi la contention aussi longtemps ? Le PH (et une partie de l'équipe) se défendent en arguant les antécédents, les risques. J'entends bien. Mais à ce stade, cela veut-il dire que l'on doit contenir tous les patients du moment où ils délirent et se montrent un poil agressifs verbalement ?
Deuxième situation: un jeune homme, première hospitalisation en psychiatrie, très tendu et angoissé (et bien persécuté aussi), adressé pour hétéroaggressivité dans un contexte familial compliqué. Bien que tendu, sa première soirée se déroule sans incident. Dès le lendemain, visites multiples de plusieurs "amis" puis de la mère (qui est dans son vécu, la persécutrice). Cette dernière dit vouloir faire sortir son fils -> passage du PH de garde -> la mère change d'avis, le patient s'énerve dans la salle de visite, et veut sortir -> appel de renforts. Le patient tente de forcer le passage, nous sommes obligés de le maitriser physiquement. Si il résiste, à aucun moment il ne donne de coup aux soignants, il tente juste de se dégager. Sur consigne du médecin, isolement + contention, à lever au moment du repas du soir (sachant que le monsieur a été bien sédaté). Le soir, mes collègues refusent de lever la contention, disent vouloir attendre le passage du PH le lendemain. Le lendemain, maintien de la contention par le PH du matin, à réévaluer l'après midi. L'après midi, le PH décide de lever la contention, un collègue s'y oppose. Je me range du côté du PH. Contention levée, aucun problème, je me fait pourrir par mon collègue (qui n'est pas infirmier dans l'unité mais fait partie d'un pool de remplacement...) qui invoque "la solidarité de l'équipe" et dit qu'en gros je me positionne contre eux. Bon admettons m'enfin il était tout seul avec moi quand le PH à pris la décision.
Ce qui me gène: J'ai l'impression que la contention est vue comme un outil punitif par certains. Si je ne nie pas le risque d'hétéroagressivité du patient, je me demande si la contention était obligatoire sur une telle durée. Un isolement avec surveillance renforcée n'aurait-il pas suffit par la suite ? Parce que la contention dans l'immédiat oui, pour isoler le patient, lui permettre de se calmer avec l'effet du traitement en prime. Mais une fois la "crise" passée ? L'invocation du "risque" justifie-t-elle de laisser la personne attachée plus d'une journée ? Sachant que la plupart des infirmiers demandaient deux jours au PH.
Voilà... Alors attention, je ne suis pas dans la critique bête de la contention et de mes collègues, mais je me pose des questions. Parce que j'ai l'impression que les conditions d'application de cette mesure sont très floues, et peuvent être interprétées différemment par chacun. Et que tomber dans le punitif, ou dans l'excès en invoquant la sécurité me parait aisé. J'ai parfois le sentiment que la contention sert parfois un rapport de force qui me semble inadapté à notre profession.Quelles conséquences pour le patient ? Je ne suis pas à leur place mais je suppose que cela doit être traumatique dans leur vécu parfois. Alors voilà, peut être est-ce un point de vue un peu naïf de ma part, et que je manque d'expérience. D'où ce message, histoire d'avoir des avis, ou des récits qui vous sont propres, et me permettre de voir les choses avec un peu plus de recul. J'ai tenté d'en parler un peu sur mon lieu de travail mais cela n'a pas abouti à des échanges constructifs. J'ai eu droit à des "ca fait 20 ans que je bosse en psy donc je sais ce que je dis" et mon cadre de santé m'a conseillé de "rester à ma place". Donc je n'ose plus vraiment lancer des réflexions sur les prises en charge.
- augusta
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Re: Réflexion sur la contention
Bonjour Jeriquo,
Je suis très étonnée de la réponse du cadre.....dégoutée même.
Quant à l'attitude des anciens.....ils se ressemblent partout lol
Ton questionnement me semble extrêmement pertinent.
Quel est l'intérêt en chambre d'iso d'ajouter une contention physique?
Pourquoi la chambre d'iso + une sédation ne suffisent pas?
Jamais je n'ai vu cela (ni durant mes stages en psy ni là où je travaille).
Je pense que le recours à la chambre d'iso et/ou aux contention relève du désir du médecin de travailler selon telle ou telle voie, selon telle ou telle méthode. De sa peur aussi.
Chez nous la chambre d'iso est très peu utilisée tout simplement parce que les psychiatres n'apprécient pas cette possibilité de soin (nécessaire pourtant parfois)..
La contention...jamais utilisée en 3 ans.
Bref, que tu te questionnes c'est génial.
En revanche, qu'on t'empêche de te questionner et de questionner vos pratiques est tout simplement stupide et anti-professionnel (je m'interroge vraiment sur le rôle de votre cadre qui te dit de "rester à ta place". De quelle place parle-t-il d'ailleurs?).
Et alors quant à ce collègue (qui ne fait pas partie de l'unité) et qui te dit que tu n'es pas solidaire de l'équipe, c'est un gros naze. On est solidaire de l'équipe quand on est en accord avec les décisions prises et quand ces décisions sont en accord avec nos valeurs professionnelles.
Tu as des compétences, des connaissances, une intuition aussi qui font que tu étais du même avis que le médecin.
Il ne s'agit pas d'être solidaire pour être solidaire.
Tu t'es affirmé et tu as bien fait. Et ce collègue préfère te "pourrir" plutôt que de réfléchir, d'échanger et se remettre en question?
Tu aurais pu lui retourner le compliment: lui non plus ne s'est pas montré très solidaire.....
A ta place je chercherais un poste ailleurs.
Je suis très étonnée de la réponse du cadre.....dégoutée même.
Quant à l'attitude des anciens.....ils se ressemblent partout lol
Ton questionnement me semble extrêmement pertinent.
Quel est l'intérêt en chambre d'iso d'ajouter une contention physique?
Pourquoi la chambre d'iso + une sédation ne suffisent pas?
Jamais je n'ai vu cela (ni durant mes stages en psy ni là où je travaille).
Je pense que le recours à la chambre d'iso et/ou aux contention relève du désir du médecin de travailler selon telle ou telle voie, selon telle ou telle méthode. De sa peur aussi.
Chez nous la chambre d'iso est très peu utilisée tout simplement parce que les psychiatres n'apprécient pas cette possibilité de soin (nécessaire pourtant parfois)..
La contention...jamais utilisée en 3 ans.
Bref, que tu te questionnes c'est génial.
En revanche, qu'on t'empêche de te questionner et de questionner vos pratiques est tout simplement stupide et anti-professionnel (je m'interroge vraiment sur le rôle de votre cadre qui te dit de "rester à ta place". De quelle place parle-t-il d'ailleurs?).
Et alors quant à ce collègue (qui ne fait pas partie de l'unité) et qui te dit que tu n'es pas solidaire de l'équipe, c'est un gros naze. On est solidaire de l'équipe quand on est en accord avec les décisions prises et quand ces décisions sont en accord avec nos valeurs professionnelles.
Tu as des compétences, des connaissances, une intuition aussi qui font que tu étais du même avis que le médecin.
Il ne s'agit pas d'être solidaire pour être solidaire.
Tu t'es affirmé et tu as bien fait. Et ce collègue préfère te "pourrir" plutôt que de réfléchir, d'échanger et se remettre en question?
Tu aurais pu lui retourner le compliment: lui non plus ne s'est pas montré très solidaire.....
A ta place je chercherais un poste ailleurs.
"Penser, c'est penser jusqu'où on pourrait penser différemment" Michel Foucault
Re: Réflexion sur la contention
Merci de ta réponse Augusta !
En fait la réponse du cadre vient de plaintes de deux ou trois collègues à mon égard, disant qu'à peine arrivé dans le service (où j'ai quelques mois d'ancienneté seulement), je remettais en cause leur organisation et je critiquais. Je ne trouvais pas normal qu'un patient détenu n'ait pas le droit de sortir un peu dans la cour du service et doive rester en iso permanent quand son comportement ne pose pas de problème. Même en prison ils ont une cour m'enfin passons ...
Le cadre donc m'a conseillé de garder pour moi mes remarques, non pas parce qu'elles sont infondées mais parce que je me heurterais dans tous les cas à une meute d'infirmiers ayant 10 ans ou plus d'ancienneté dans ce service, et sûrs de leur organisation.
Chercher un poste ailleurs, très difficile pour le moment, le plus rageant étant que je n'ai pas choisi mon affectation, elle m'a été imposée. Enfin je ne vais pas raconter ma vie. Pour en revenir au sujet initial, tu me confortes dans mon idée que la contention peut avoir une visée de rapport de force (combien de fois ai-je entendu "ca lui fera du bien, il comprendra ce que c'est de faire le con" par exemple ? Ou aussi une visée sécuritaire pour apporter une réponse à la peur du corps médical ou infirmier. Mais dans ce cas là n'est ce pas une forme de riposte graduée vis à vis des agissements du patient ?
Je ne suis pas un anti-contention, parce que certaines situations vont faire que parfois cela me semble impossible de faire autrement. Mais à mes yeux la contention est l'échec du soin. Je me demande à chaque reprise ce qui aurait pu être fait pour éviter cela, en amont de la situation. Par exemple dans le cas du deuxième patient, interdire les visites pendant les deux ou trois premiers jours n'aurait-il pas été salutaire ? Comment cela se passe-t-il chez vous quand un patient entre ? A-t-il droit à des visites et des sorties parc dès le lendemain ?
Finalement le plus frustrant c'est de me retrouver en face d'un bloc "équipe" ancré dans ses pratiques, n'acceptant pas qu'un "jeune con" fraichement diplômé tente de les questionner sur celles-ci. Je n'ai pas envie de lâcher l'affaire, mais je ne veux pas non plus finir par me mettre en marge de l'équipe. Je vais peut être demander au médecin un petit entretien en privé histoire d'avoir sa vision de la contention, lui demander de m'expliquer sa manière de procéder, le pourquoi.
En fait la réponse du cadre vient de plaintes de deux ou trois collègues à mon égard, disant qu'à peine arrivé dans le service (où j'ai quelques mois d'ancienneté seulement), je remettais en cause leur organisation et je critiquais. Je ne trouvais pas normal qu'un patient détenu n'ait pas le droit de sortir un peu dans la cour du service et doive rester en iso permanent quand son comportement ne pose pas de problème. Même en prison ils ont une cour m'enfin passons ...
Le cadre donc m'a conseillé de garder pour moi mes remarques, non pas parce qu'elles sont infondées mais parce que je me heurterais dans tous les cas à une meute d'infirmiers ayant 10 ans ou plus d'ancienneté dans ce service, et sûrs de leur organisation.
Chercher un poste ailleurs, très difficile pour le moment, le plus rageant étant que je n'ai pas choisi mon affectation, elle m'a été imposée. Enfin je ne vais pas raconter ma vie. Pour en revenir au sujet initial, tu me confortes dans mon idée que la contention peut avoir une visée de rapport de force (combien de fois ai-je entendu "ca lui fera du bien, il comprendra ce que c'est de faire le con" par exemple ? Ou aussi une visée sécuritaire pour apporter une réponse à la peur du corps médical ou infirmier. Mais dans ce cas là n'est ce pas une forme de riposte graduée vis à vis des agissements du patient ?
Je ne suis pas un anti-contention, parce que certaines situations vont faire que parfois cela me semble impossible de faire autrement. Mais à mes yeux la contention est l'échec du soin. Je me demande à chaque reprise ce qui aurait pu être fait pour éviter cela, en amont de la situation. Par exemple dans le cas du deuxième patient, interdire les visites pendant les deux ou trois premiers jours n'aurait-il pas été salutaire ? Comment cela se passe-t-il chez vous quand un patient entre ? A-t-il droit à des visites et des sorties parc dès le lendemain ?
Finalement le plus frustrant c'est de me retrouver en face d'un bloc "équipe" ancré dans ses pratiques, n'acceptant pas qu'un "jeune con" fraichement diplômé tente de les questionner sur celles-ci. Je n'ai pas envie de lâcher l'affaire, mais je ne veux pas non plus finir par me mettre en marge de l'équipe. Je vais peut être demander au médecin un petit entretien en privé histoire d'avoir sa vision de la contention, lui demander de m'expliquer sa manière de procéder, le pourquoi.
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Re: Réflexion sur la contention
Ok, je comprends mieux.Jericho a écrit : Le cadre donc m'a conseillé de garder pour moi mes remarques, non pas parce qu'elles sont infondées mais parce que je me heurterais dans tous les cas à une meute d'infirmiers ayant 10 ans ou plus d'ancienneté dans ce service, et sûrs de leur organisation.
Eh oui...quand on arrive en psy (et pour parler de ce que je connais) il faut prendre garde aux susceptibilités des anciens et ménager leur ego.
C'est pénible mais comment faire autrement? Autrement que d'attendre d'être suffisamment légitime à leurs yeux pour émettre un avis. Et encore quand cela est possible....
Dans le service où je travaille actuellement il n'y a pas véritablement de règles pré-établies. Ce sont les IDE qui estiment si visites possibles ou pas. Les médecins ne les interdisent d'ailleurs jamais.Comment cela se passe-t-il chez vous quand un patient entre ? A-t-il droit à des visites et des sorties parc dès le lendemain ?
En revanche pour les sorties du service, tant qu'on ne connait pas la personne on fait gaffe (risque de fugue entre autres) mais sorties possibles à l'intérieur de l'unité (avec accès jardin).
C'est exactement cela!Finalement le plus frustrant c'est de me retrouver en face d'un bloc "équipe" ancré dans ses pratiques, n'acceptant pas qu'un "jeune con" fraichement diplômé tente de les questionner sur celles-ci. Je n'ai pas envie de lâcher l'affaire, mais je ne veux pas non plus finir par me mettre en marge de l'équipe. Je vais peut être demander au médecin un petit entretien en privé histoire d'avoir sa vision de la contention, lui demander de m'expliquer sa manière de procéder, le pourquoi.
Ne pas se mettre en marge de l'équipe d'une part, mais ne pas s'aplatir d'autre part.
Quoiqu'il en soit, la question n'est pas vraiment la contention mais plus ce qu'elle révèle d'un certain dysfonctionnement de l'équipe.
Je ne comprends pas pourquoi les DSI laissent des IDE aussi longtemps dans un même service. Les gens s'enkystent, se croient chez eux, les patients sont les leurs....etc...etc...
Quelle place laissent-ils aux nouveaux arrivants? Et pourquoi ont-ils si peur qu'on leur vole leur place (place auprès de qui?)
"Penser, c'est penser jusqu'où on pourrait penser différemment" Michel Foucault
Re: Réflexion sur la contention
L'invocation du risque suffit-il à justifier la contention ? La contention est une question, mais l'isolement également.L'invocation du "risque" justifie-t-elle de laisser la personne attachée plus d'une journée ?
Avant de venir questionner la contention, je me permet de venir questionner l'isolement. De quoi ou de qui isole-t-on ? Pourquoi "isole"-t-on ? Le travail en psychiatrie n'est pas celui d'une surveillance mais bien d'un soin. Il s'agit d'un soin relationnel renforcé. Je trouve que le livre de Florence QUARTIER : "psychiatrie mode d'emploi, théorie, demarche clinique, expérience" est un bon support pour cette réflexion. Pour les budgets un peu serré n'hésitez pas à regarder du côté du site serpsy.org, il y a des TFE sur la contention mais aussi des réflexions sur l'isolement et le soin.Un isolement avec surveillance renforcée n'aurait-il pas suffit par la suite ?
Quant aux infirmiers en poste depuis longtemps, imposer par la direction des soins des mouvements de service me semble quelque peu totalitaire et guère différent que d'isoler au vu d'un risque. Pour permettre des réflexions d'équipe, que ce soit avec des anciens ou des nouveaux, par des anciens ou des nouveaux, l'utilisation de texte me semble être une base indispensable. C'est un support d'autorité qui permet de se dégager de la position du perturbateur juste pour la perturbation.
Re: Réflexion sur la contention
A mon sens, dans cette situation, l'isolement joue un rôle apaisant. Les visites (nombreuses) recues par le patient, la dispute avec la mère, l'incident dans la salle de visite ayant nécessité les renforts ... Il fallait réduire les stimulations face à un patient très tendu, qui souhaitait sortir de l'unité. A mon sens dans un premier temps Iso + sédation, puis on levait l'isolement le soir pour le repas (sachant qu'il était bien retombé au moment du repas). Je comprends que tu butes sur le mot surveillance mais attention, je ne parle pas de surveillance "gardien de prison" mais de surveillance horaire d'une personne en isolement vis à vis du risque auto/hétéroagressif.brrruno a écrit :L'invocation du risque suffit-il à justifier la contention ? La contention est une question, mais l'isolement également.L'invocation du "risque" justifie-t-elle de laisser la personne attachée plus d'une journée ?Avant de venir questionner la contention, je me permet de venir questionner l'isolement. De quoi ou de qui isole-t-on ? Pourquoi "isole"-t-on ? Le travail en psychiatrie n'est pas celui d'une surveillance mais bien d'un soin. Il s'agit d'un soin relationnel renforcé. Je trouve que le livre de Florence QUARTIER : "psychiatrie mode d'emploi, théorie, demarche clinique, expérience" est un bon support pour cette réflexion. Pour les budgets un peu serré n'hésitez pas à regarder du côté du site serpsy.org, il y a des TFE sur la contention mais aussi des réflexions sur l'isolement et le soin.Un isolement avec surveillance renforcée n'aurait-il pas suffit par la suite ?
Mais enfin déjà que je suis choqué par les pratiques de mon service en terme de contention, si on évoque les isolements ... Ca va très très vite ...

Pour la question des anciens je ne fait pas de généralités. Ma personne ressource numéro 1 dans le service est une ISP de plus de 50 ans (elle pourrait être ma mère !). Mais cette personne a envie d'échanger, se remet en question. Certains anciens ne sont pas dans une dynamique de transmission des savoirs, ni de prise de recul. Ils sont blasés mais ne veulent pas changer de service par crainte du changement, où parce que leur situation est confortable. Et cela nuit à la dynamique d'un service en freinant toute initiative. Après attention, il ne s'agit pas de faire un procès aux "vieux". Je suppose qu'il y a tout autant de jeunes cons qui ne veulent pas apprendre.^^
Re: Réflexion sur la contention
Je confirme, le travail en psychiatrie et d'autant plus pour un patient en isolement n'est pas un travail de surveillance horaire mais un travail du lien, de la relation à l'autre. Je cite le livre de F. QUARTIER qui relate un échange avec le psychanalyste Paul DENISJericho a écrit : Je comprends que tu butes sur le mot surveillance mais attention, je ne parle pas de surveillance "gardien de prison" mais de surveillance horaire d'une personne en isolement vis à vis du risque auto/hétéroagressif.
Mais enfin déjà que je suis choqué par les pratiques de mon service en terme de contention, si on évoque les isolements ... Ca va très très vite ...![]()
"- Je me demandais s'il ne pouvait pas y avoir un effet finalement paradoxal dans la situation des chambres d'isolement car, dans une certaine mesure, on enferme le patient dans son monde interne. C'est ce mouvement qui risque de favoriser la réorganisation autour de la haine et de conduire le patient à se cramponner à la projection dont vous parliez pour survivre psychiquement à cette situation d'enfermement
- Paul DENIS : C'est vrai, parce que le fait de se mettre en colère contre les soignants, c'est aussi une façon de se réorganiser et de survivre psychiquement à l'enfermement. En effet, très rapidement, la situation a des effets pervers si on ne l'utilise pas pour rétablir une communication. C'est pour ça que toute chambre d'isolement devrait être une chambre d'isolement sur le plan de l'agir mais simultanément une chambre de communication sur le plan psychique [...] il faut lui fournir, par une forme de conversation, des supports qui lui permettent de rétablir un tissu de représentations utilisable pour lui. "
Je m'arrête là mais l'entretien continue sur l'importance de la diminution de la projection dans le rétablissement de la relation.
C'est bien pour ça qu'il faut commencer par là. Si une telle action devient banale c'est bien en cet endroit qu'il faut venir faire réfléchir.Mais enfin déjà que je suis choqué par les pratiques de mon service en terme de contention, si on évoque les isolements ... Ca va très vite ...
Re: Réflexion sur la contention
Je vois ce que tu veux dire. Malgré ce que mes propos ont pu laisser transparaitre, je ne réduit pas l'isolement à "un enfermement thérapeutique laissant le patient livré à lui-même avec un passage toutes les heures". Je ne nie pas l'importance de l'accompagnement du patient. Mais tu me fais prendre conscience de combien il est facile de tomber dans la banalisation, et c'est inquiétant. Comme quoi la prise de recul est salutaire.brrruno a écrit :Je confirme, le travail en psychiatrie et d'autant plus pour un patient en isolement n'est pas un travail de surveillance horaire mais un travail du lien, de la relation à l'autre. Je cite le livre de F. QUARTIER qui relate un échange avec le psychanalyste Paul DENISJericho a écrit : Je comprends que tu butes sur le mot surveillance mais attention, je ne parle pas de surveillance "gardien de prison" mais de surveillance horaire d'une personne en isolement vis à vis du risque auto/hétéroagressif.
Mais enfin déjà que je suis choqué par les pratiques de mon service en terme de contention, si on évoque les isolements ... Ca va très très vite ...![]()
"- Je me demandais s'il ne pouvait pas y avoir un effet finalement paradoxal dans la situation des chambres d'isolement car, dans une certaine mesure, on enferme le patient dans son monde interne. C'est ce mouvement qui risque de favoriser la réorganisation autour de la haine et de conduire le patient à se cramponner à la projection dont vous parliez pour survivre psychiquement à cette situation d'enfermement
- Paul DENIS : C'est vrai, parce que le fait de se mettre en colère contre les soignants, c'est aussi une façon de se réorganiser et de survivre psychiquement à l'enfermement. En effet, très rapidement, la situation a des effets pervers si on ne l'utilise pas pour rétablir une communication. C'est pour ça que toute chambre d'isolement devrait être une chambre d'isolement sur le plan de l'agir mais simultanément une chambre de communication sur le plan psychique [...] il faut lui fournir, par une forme de conversation, des supports qui lui permettent de rétablir un tissu de représentations utilisable pour lui. "
Je m'arrête là mais l'entretien continue sur l'importance de la diminution de la projection dans le rétablissement de la relation.
C'est bien pour ça qu'il faut commencer par là. Si une telle action devient banale c'est bien en cet endroit qu'il faut venir faire réfléchir.Mais enfin déjà que je suis choqué par les pratiques de mon service en terme de contention, si on évoque les isolements ... Ca va très vite ...
Après dans mon contexte j'ai bien peur que remettre en cause les isos (abusifs ou non) me soi fatal. Déjà que quand je touche à la contention ca suscite des réactions de vierges effarouchées. Mais je vais demeurer très prudent dans mon approche de cette pratique désormais, et je garderais tes mots en tête. Et ton livre m'a l'air très complet. Pour le moment j'ai juste "L'infirmier en psychiatrie" de Masson, ca ne me fera pas de mal d'étendre un peu ma biblio.
Merci à toi.
Re: Réflexion sur la contention
C'est un peu volontairement que j'appui sur ce point, premièrement car cet échange est public, il ne faut donc pas laisser dans l'imaginaire ce qui est le travail primordial au profit du "sécuritaire" ; deuxièmement parce qu'à le considérer comme acquis on peut vite l'oublier.
Je pense que le sujet de la contention est plus difficile à aborder que celui de l'isolement parce que ce que fait vivre la contention d'un patient, même chez des soignants qui y ont recours de manière peut être abusive, a plus d'impact qu'un "simple" isolement. Attention de ne pas être trop frontal dans la recherche d'une remise en question d'équipe, sinon autant prendre une voiture et foncer à 150 km/h dans un mur en béton. Si tu n'a pas de voiture blindé démontes le mur petit à petit : trouve des textes, courts et ciblé, laisse les trainer, fait y référence occasionnellement, sans affirmation mais en interrogeant les autres sur ce qu'ils en pensent. On pourrait appeler cela la méthode du faux naïf, pour remettre en question des collègues tout en se protégeant. C'est un peu pervers mais il faut prendre là ou elles sont les choses qui fonctionnent.
Coté lecture commence par regarder du coté de la bibliothèque de ton hopital, ça évite de se ruiner. Il y a beaucoup à lire, si je peux me permettre ne te contente pas de livres infirmiers. La psychiatrie ce n'est pas (qu')une question de diplome. Pour citer la 4ieme de couverture de "psychiatrie : mode d'emploi" : "Nous, psychiatres, tentons d'appréhender [en chaque personne qui nous arrive, la singularité de l'histoire et les particularités du développement tant psychique que biologique] à chaque instant de chaque traitement. Impossible de jouer cette musique là en solo, elle se joue en institution, chaque intervent(e) est concerné(e) qu'il (elle) soit infirmier, infirmière, médecin, psychiatre, psychologue ou d'une autre profession. Chaque intervention compte, chacune d'elle est susceptible d'amener une nouvelle découverte [...]"
Sur internet je consulte trois sites (mais il en existe surment d'autres) : collectifpsychiatrie.fr serpsy.org et cairn.info
http://www.academia.edu/1363374/Isoleme ... a_docilite
Je pense que le sujet de la contention est plus difficile à aborder que celui de l'isolement parce que ce que fait vivre la contention d'un patient, même chez des soignants qui y ont recours de manière peut être abusive, a plus d'impact qu'un "simple" isolement. Attention de ne pas être trop frontal dans la recherche d'une remise en question d'équipe, sinon autant prendre une voiture et foncer à 150 km/h dans un mur en béton. Si tu n'a pas de voiture blindé démontes le mur petit à petit : trouve des textes, courts et ciblé, laisse les trainer, fait y référence occasionnellement, sans affirmation mais en interrogeant les autres sur ce qu'ils en pensent. On pourrait appeler cela la méthode du faux naïf, pour remettre en question des collègues tout en se protégeant. C'est un peu pervers mais il faut prendre là ou elles sont les choses qui fonctionnent.
Coté lecture commence par regarder du coté de la bibliothèque de ton hopital, ça évite de se ruiner. Il y a beaucoup à lire, si je peux me permettre ne te contente pas de livres infirmiers. La psychiatrie ce n'est pas (qu')une question de diplome. Pour citer la 4ieme de couverture de "psychiatrie : mode d'emploi" : "Nous, psychiatres, tentons d'appréhender [en chaque personne qui nous arrive, la singularité de l'histoire et les particularités du développement tant psychique que biologique] à chaque instant de chaque traitement. Impossible de jouer cette musique là en solo, elle se joue en institution, chaque intervent(e) est concerné(e) qu'il (elle) soit infirmier, infirmière, médecin, psychiatre, psychologue ou d'une autre profession. Chaque intervention compte, chacune d'elle est susceptible d'amener une nouvelle découverte [...]"
Sur internet je consulte trois sites (mais il en existe surment d'autres) : collectifpsychiatrie.fr serpsy.org et cairn.info
http://www.academia.edu/1363374/Isoleme ... a_docilite
Re: Réflexion sur la contention
C'est quoi ces pratiques de contention systématique et de prescrire des contentions pour plusieurs jours ?
Normalement c'est réévalué toutes les 24h, et de toute façon ça n'a pas de sens, on prescrit le temps qu'il y a besoin, presque en temps réel.
Ici on contentionne peu voire pas du tout, ça arrive dans d'autres services mais c'est d'autres pratiques que je ne commente pas. Je ne suis pas au clair avec leur contexte.
De manière générale je suis plus "rassuré" avec les patients un peu virulents, qui se battent (au sens figuré...), crient, veulent sortir, manifestent de la colère, de la révolte, etc... car eux sont dans la vie, ils veulent sortir, ne veulent pas des soins, etc... tout notre travail est de les amener à les accepter mais en même temps cette énergie a ce coté positif que ces gens là ont des envies (ils sont en-vie).
Je me méfie beaucoup plus des patients qui se laissent complètement porter par l'hospi et se laissent aller docilement sans jamais rien remettre en cause. Ceux là vont à mon avis beaucoup plus mal, sans envies ni énergie, ils subissent passivement et ça craint.
Bruno : génial la citation de Paul Denis, tu pourrais pas me scanner la page le temps que je trouve le livre ? Parce que c'est vraiment ça.
Je te demande le scan pour suivre le conseil de Camillou38 et foutre la feuille dans le bureau.
Parce que la chambre d'iso, c'est un des sujets qui fâchent.
Normalement c'est réévalué toutes les 24h, et de toute façon ça n'a pas de sens, on prescrit le temps qu'il y a besoin, presque en temps réel.
Ici on contentionne peu voire pas du tout, ça arrive dans d'autres services mais c'est d'autres pratiques que je ne commente pas. Je ne suis pas au clair avec leur contexte.
De manière générale je suis plus "rassuré" avec les patients un peu virulents, qui se battent (au sens figuré...), crient, veulent sortir, manifestent de la colère, de la révolte, etc... car eux sont dans la vie, ils veulent sortir, ne veulent pas des soins, etc... tout notre travail est de les amener à les accepter mais en même temps cette énergie a ce coté positif que ces gens là ont des envies (ils sont en-vie).
Je me méfie beaucoup plus des patients qui se laissent complètement porter par l'hospi et se laissent aller docilement sans jamais rien remettre en cause. Ceux là vont à mon avis beaucoup plus mal, sans envies ni énergie, ils subissent passivement et ça craint.
Bruno : génial la citation de Paul Denis, tu pourrais pas me scanner la page le temps que je trouve le livre ? Parce que c'est vraiment ça.
Je te demande le scan pour suivre le conseil de Camillou38 et foutre la feuille dans le bureau.
Parce que la chambre d'iso, c'est un des sujets qui fâchent.
"La plus grande proximité, c'est d'assumer le lointain de l'autre."
J. Oury
J. Oury
Re: Réflexion sur la contention
J'ai vu récemment un très beau film qui à mon avis est très parlant au sujet du soin en Psychiatrie. Il s'agit du film STATES OF GRACE.
Grace est une jeune éducatrice dans un centre d'accueil pour adolescents rencontrant des traumatismes familiaux ou des situations de vie difficile (violences...).
J'ai trouvé que le film rendait bien compte de la façon dont elle construisait par petites touches, des réponses ou des attitudes un cadre sécurisant pour les jeunes.
A deux reprises dans le film, un jeune adolescent s'échappe du centre en hurlant et les protagonistes principaux du film, doivent courir après et le contenir pour l'apaiser. L'adolescent semble être dans le besoin de ce moment où il peut décharger un trop plein (de colère, d'excitation ou de souffrance qu'il ne semble pas pouvoir dire autrement) et à la fois de cet apaisement.
On voit aussi un moment où une jeune adolescente crie et hurle pour exprimer sa souffrance également et vient s'enfermer dans sa chambre et on voit à ce moment l'attitude des deux éducateurs qui la maintiennent fermement et forment une sorte de parage contre sa propre agressivité. LEs insultes fusent , elle leur crache dessus.
J'ai trouvé ces deux scènes assez emblématiques de ce que j'ai pu vivre aussi en tant que soignant en services de soins et me semble apporter des éléments de réflexions sur le pourquoi de la contention et de son sens. Car c'est bien la question du sens qui est primordiale.
Le film montre aussi la motivation à "soigner" des deux protagonistes (leur histoire personnelle explique pour beaucoup) et la façon dont ce travail de soins les atteint dans leur vie propre et les affecte là où classiquement même si cela tend à être pris en compte de plus en plus, le soignant est pensé comme hermétique.
Je partage donc avec vous ces réflexions et ce film que je vous invite à voir car filmé au ras du soin, sans pathos, ni effet dramatique. J'ai trouvé un ton juste sur ce qu'est le travail de soin dans sa dimension contenante.
Grace est une jeune éducatrice dans un centre d'accueil pour adolescents rencontrant des traumatismes familiaux ou des situations de vie difficile (violences...).
J'ai trouvé que le film rendait bien compte de la façon dont elle construisait par petites touches, des réponses ou des attitudes un cadre sécurisant pour les jeunes.
A deux reprises dans le film, un jeune adolescent s'échappe du centre en hurlant et les protagonistes principaux du film, doivent courir après et le contenir pour l'apaiser. L'adolescent semble être dans le besoin de ce moment où il peut décharger un trop plein (de colère, d'excitation ou de souffrance qu'il ne semble pas pouvoir dire autrement) et à la fois de cet apaisement.
On voit aussi un moment où une jeune adolescente crie et hurle pour exprimer sa souffrance également et vient s'enfermer dans sa chambre et on voit à ce moment l'attitude des deux éducateurs qui la maintiennent fermement et forment une sorte de parage contre sa propre agressivité. LEs insultes fusent , elle leur crache dessus.
J'ai trouvé ces deux scènes assez emblématiques de ce que j'ai pu vivre aussi en tant que soignant en services de soins et me semble apporter des éléments de réflexions sur le pourquoi de la contention et de son sens. Car c'est bien la question du sens qui est primordiale.
Le film montre aussi la motivation à "soigner" des deux protagonistes (leur histoire personnelle explique pour beaucoup) et la façon dont ce travail de soins les atteint dans leur vie propre et les affecte là où classiquement même si cela tend à être pris en compte de plus en plus, le soignant est pensé comme hermétique.
Je partage donc avec vous ces réflexions et ce film que je vous invite à voir car filmé au ras du soin, sans pathos, ni effet dramatique. J'ai trouvé un ton juste sur ce qu'est le travail de soin dans sa dimension contenante.
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Auxi77 merci pour ce rappel, il est vrai que l'on a une tendance facheuse à réduire la contention à la seule utilisation des sangles alors qu'il y en a tellement d'autres possibles. Le film passe justement ce soir au cinéma, j'ai trouvé ce que je vais faire.
AmThLi, je scanne ce passage dès que possible. Il est de bon conseil en général mais attention au retour possiblement aggressif (je ne dit pas qu'il ne faut pas le faire au contraire, mais c'est pour pouvoir décaller les choses et c'est parfois plus difficile quand ça vient des collègues).
Il y a également un passage dans ce même livre ou il évoque les insultes, l'espace de projection, le fait que le patient puisse décharger de son angoisse, produisant de manière atténué un peu de son angoissen sur l'interlocuteur et donne alors l'image de pouvoir à la fois ressentir mais également supporter cette émotion, renforcant l'idée qu'un patient en isolement ne peut pas rester seul.
AmThLi, je scanne ce passage dès que possible. Il est de bon conseil en général mais attention au retour possiblement aggressif (je ne dit pas qu'il ne faut pas le faire au contraire, mais c'est pour pouvoir décaller les choses et c'est parfois plus difficile quand ça vient des collègues).
Il y a également un passage dans ce même livre ou il évoque les insultes, l'espace de projection, le fait que le patient puisse décharger de son angoisse, produisant de manière atténué un peu de son angoissen sur l'interlocuteur et donne alors l'image de pouvoir à la fois ressentir mais également supporter cette émotion, renforcant l'idée qu'un patient en isolement ne peut pas rester seul.
Re: Réflexion sur la contention
@Bruno : Très bon film et fait nous part de ton avis sur le forum, ton avis m'intéresse .
Re: Réflexion sur la contention
Bonsoir,
concernant le film states of grace je suis plutôt partagé. Il y a beaucoup de bonnes idées, mais aussi des idées poussées à l’extrême un peu déplacées. Le copinage incessant, les "éduc" tous (?) pris dans une histoire "digne" de celle qu'ils prennent en charge, la position hiérarchique estimant qu'ils n'ont qu'une fonction de présence, bien représenté par une des adultes qui en dehors de la figuration n'a d'autre utilité. En dehors de cette prise en charge caricaturale et en ayant à l'esprit que c'est un film j'ai quand même passé un bon moment. L'approche humaine qu'il manque tellement dans les soins, l'accompagnement de la crise (qu'il faut voir en un peu plus long dans la réalité, pour ma part j'ai une fois passé 45 minutes sur le toit de l'unité à maintenir une ado) qu'il soit dans une contention humaine ou dans la pièce d'isolement qui devient un isolement à deux ou encore les positions surprenantes des ado entre eux, et le texte de Marcus rappellent des situations vécues.
concernant le film states of grace je suis plutôt partagé. Il y a beaucoup de bonnes idées, mais aussi des idées poussées à l’extrême un peu déplacées. Le copinage incessant, les "éduc" tous (?) pris dans une histoire "digne" de celle qu'ils prennent en charge, la position hiérarchique estimant qu'ils n'ont qu'une fonction de présence, bien représenté par une des adultes qui en dehors de la figuration n'a d'autre utilité. En dehors de cette prise en charge caricaturale et en ayant à l'esprit que c'est un film j'ai quand même passé un bon moment. L'approche humaine qu'il manque tellement dans les soins, l'accompagnement de la crise (qu'il faut voir en un peu plus long dans la réalité, pour ma part j'ai une fois passé 45 minutes sur le toit de l'unité à maintenir une ado) qu'il soit dans une contention humaine ou dans la pièce d'isolement qui devient un isolement à deux ou encore les positions surprenantes des ado entre eux, et le texte de Marcus rappellent des situations vécues.
Re: Réflexion sur la contention
Effectivement je pensais juste aux questions que cela soulevait à partir la façon dont les deux éducateurs apportaient un cadre sécurisant aux adolescents mais bien sur tout n'est pas exemplaire , c'est juste le fait que je vois un film qui traite au "niveau" de nos pratiques de soins et en traitant de façon équilibrée le point de vue des adolescents et celui des éducateurs.
C'est assez marquant par ce que la violence par exemple ne vient pas uniquement du cadre de soin dans le film. Bien sur il ne s'agit pas de patients avec des troubles psychiatriques mais j'aime bien assez l'idée du film de poser les questions simples suivantes : que répare t'on ? Comment le répare t'on ? et qui répare t'on ?
Le film montre ainsi que le cheminement de l'aidant est autant à prendre à compte que celui qui est "aidé"; la réponse lucide de l'adolescente à Grace qui lui dit lorsqu'elle veut frapper le père de cette dernière : "cela ne conduira à rien", me semble être l'exemple que les soignants ont beaucoup à tirer des enseignements de vie des patients et que la lucidité n'est pas toujours dans le camp des soignants.
La réponse du psychologue, "tu n'es pas là pour analyser" est pour moi aussi la réponse la plus violente du film et montre que la maltraitance est aussi du côté de ceux qui réparent.
C'est assez marquant par ce que la violence par exemple ne vient pas uniquement du cadre de soin dans le film. Bien sur il ne s'agit pas de patients avec des troubles psychiatriques mais j'aime bien assez l'idée du film de poser les questions simples suivantes : que répare t'on ? Comment le répare t'on ? et qui répare t'on ?
Le film montre ainsi que le cheminement de l'aidant est autant à prendre à compte que celui qui est "aidé"; la réponse lucide de l'adolescente à Grace qui lui dit lorsqu'elle veut frapper le père de cette dernière : "cela ne conduira à rien", me semble être l'exemple que les soignants ont beaucoup à tirer des enseignements de vie des patients et que la lucidité n'est pas toujours dans le camp des soignants.
La réponse du psychologue, "tu n'es pas là pour analyser" est pour moi aussi la réponse la plus violente du film et montre que la maltraitance est aussi du côté de ceux qui réparent.