Indis a écrit :A partir de "quand", estimez vous être "formé" ? Prenons l'exemple qui va à l'inverse de tout ça, une "vieille IDE", qui a 30 ans de boutique, qui a toujours été au SMUR, et qui manipule des médicaments que "même que les IDE peuvent pas utiliser parce qu'elles sont pas iade et qu'elles sont pas formées pour ça et que ça entraîne tous les mois 25 réponses à ce sujet" , et à l'opposée, une jeune IADE, diplômée depuis 1 mois...
Le truc derrière ça c'est, la théorie supplante t-elle systématiquement la pratique ?
A l'opposé, personne (enfin pas moi) ne nie la pratique par de jeunes IDE, présents et présentes dans un service d'urgence depuis peu de médicaments, à la demande d'un médecin non MAR pour des gestes de type ISRapide ou autre....
Le plus simple me semble de partir d'un exemple. Prenons l'intubation en séquence rapide (ISR). La spécialisation en anesthésie, ça dure deux ans. En deux ans, il est probable que l'iade fasse plusieurs ISR avec quelques variantes (en smur, au bloc, adulte en bonne santé, personne âgée, enfant...). Ces ISR seront rapprochées dans le temps, ce qui lui confère une expérience renouvelée (à la différence d'un acte que vous pratiqueriez une fois tous les deux ans par exemple). Donc l'argument de l'expérience ne tient pas : l'iade, même nouvellement diplômé, a l'expérience de l'isr.
Par ailleurs, n'oublions pas que c'est la tête qui guide la main. Pendant sa formation, l'iade aura plusieurs apports théoriques sur l'isr, sur les médicaments utilisés, sur les risques de chaque situation, sur les techniques alternatives, sur les précautions à prendre... Il aura aussi pendant deux ans la possibilité d'en discuter avec ses collègues de l'école, avec les iade et mar des terrains de stage. Il aura à sa portée différents écrits sur le sujet.
Au total, l'iade, quel que soit son niveau d'expérience, aura une expérience tout à fait différente de celle de l'ide, expérimenté ou pas. Dans une isr, l'iade a les connaissances théoriques et pratiques pour prendre part aux actes, mais aussi aux décisions.
Bien entendu, l'ide peut être amené à prendre part à une ISR. Et je suis d'accord avec vous, ce sont justement les situations les plus difficiles (urgence immédiate, installation peu confortable, mauvais éclairage, et médecin non formé à l'anesthésie). Mais dans l'isr, l'ide fait ce que le médecin lui demande de faire, il exécute les prescriptions. C'est dans ce cadre qu'il peut manipuler des produits, de la même façon qu'il n'y a pas besoin du diplôme d'iade pour poser un pse de propofol ou de midazolam à un patient de réanimation.
Le problème de l'ide dans ce type de situation, c'est qu'il ne peut pas avoir de recul (ou plus exactement pas le même recul que l'iade) par rapport aux prescriptions qu'il exécute. Ça ne veut pas dire qu'il n'a pas le droit de le faire, ni qu'il ne doit pas le faire. Il a le droit de le faire, et il doit le faire, mais ces situations sont à risque, et il doit être particulièrement prudent et ne pas hésiter à demander des précisions.
Indis a écrit :En effet vous parlez de nouveaux outils, auxquels je ne connais ni ne comprend strictement rien (ou peu ), à partir de quel moment peut-on se dire: " je maîtrise donc je peux" ? Son ressenti perso ? Son expérience ?
Les deux, avec en plus son estimation sur sa formation théorique. L'étendue du métier est vaste, ce qui fait que certaines techniques peuvent être monnaie courante dans certains secteurs et rarissimes dans d'autres. Par exemple, l'utilisation de l'anesthésie intraveineuse à objectif de concentration : il faut comprendre les problèmes théoriques, mais aussi maîtriser les outils utilisés (pousse-seringues particuliers). J'ai fait ça tous les jours pendant des mois et des années, je peux sans problème le faire demain. Mais un iade peut exercer dix ans sans jamais le faire. Eh bien, le jour où on lui demande de le faire, il demandera un complément de formation et d'encadrement, il évitera de se retrouver seul en salle à gérer cette technique.
Ça n'est pas très différent de la position d'un ide : si après dix ans d'exercice en gériatrie, on vous demande de faire de l'hémodialyse, vous n'allez pas accepter de vous lancer sans un complément de formation et sans encadrement.
Indis a écrit :Je ne remet absolument pas en cause le diplôme IADE, ni l'expérience qu'ont acquis une partie de ceux-ci mais, puisque les textes dont on parle concernent tous les IDE je m'interroge ...
Vous avez raison de vous interroger, mais vous comprendrez facilement qu'une partie de la réponse ne peut être que "si vous aviez fait la formation iade, vous comprendriez facilement le problème". En effet, vous n'avez pas les clefs pour comprendre les tenants et les aboutissants. C'est ce qui fait dire à nombre d'iade (dont je fais partie) ayant exercé en réa avant les études qu'ils exerçaient en tant qu'ide persuadés qu'ils maîtrisaient, et que le fait d'avoir fait deux ans d'études leur a fait prendre conscience qu'ils ne maîtrisaient pas tout.
Quand j'étais ide, c'est mon ignorance des problèmes qui m'entretenait dans l'illusion que je maîtrisai le problème.
Pour avoir un élément de comparaison, est-ce que vous aviez compris tous les problèmes posés à l'ide avant d'avoir fait la formation ? J'ai entendu nombre de personnes me demander pourquoi les études durent trois ans, si c'est pour apprendre à faire des im, des iv, et des pansements.
Leopold Anasthase a écrit :-je croise la route d'un patient en acr ; le médecin ne peut arriver avant dix minutes ; après avoir donné l'alerte et mis en œuvre une rcp et utilisation du dsa, je peux lui poser une voie veineuse périphérique, lui injecter de l'adrénaline et l'intuber, puisque ces deux pratiques ont un intérêt indiscutable pour le patient (recommandations internationales), que dans l'intérêt du patient il ne faut pas attendre plus de quelques minutes (environ 6 minutes de RCP d'après les recommandations) et que je suis formé à le faire ;
-je croise la route d'une femme en train d'accoucher ; je ne peux pas lui faire une césarienne, même si c'est urgent et même si j'en ai déjà vu cent.
Indis a écrit :Je ne vois pas trop de rapport en vérité entre un geste réalisable par un IDE (poser une voie, mettre de l'adrénaline... là encore, c'est réalisable par tous les IDE de France et de Navarre ? ) et un geste qui se pratique au bloc opératoire, sous anesthésie (quelle qu'elle soit) et réalisée par un chirurgien...
Eh bien, à la place de la césarienne, prenez la pose ou l'ablation d'un drain thoracique. Vous êtes ide au déchocage ou en réa, vous avez vu ce geste des dizaines de fois, vous avez même donné quelques conseils aux médecins débutants. Il est évident que le patient en a besoin, mais il est évident que vous ne devez pas le faire.
Mais en fait, dans la situation décrite (pas de médecin, urgence, pas de protocole), l'ide ou l'iade ne doit se lancer que dans des gestes qu'il maîtrise parfaitement. Si je suis ide mais que je n'ai pas pratiqué la pose de vvp depuis des années, voire quasiment jamais dans ma carrière, je ne me lancerai pas dans ce geste. En effet, le risque serait de péter les veines disponibles, rendant la situation encore pire que si je n'avais rien fait.