Hospitalisation... Club Med???

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emily_the_strange
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Hospitalisation... Club Med???

Message par emily_the_strange »

Désolé pour la formulation un peu provocatrice mais c'est volontaire...
Je suis infirmière dans une unité pour adulte en hospitalisation libre. Mon questionnement est autour du sens de l'hospitalisation.
Nous avons une partie des patients (50%) qui sont hospitalisés à leur demande de façon régulière car il est difficile pour eux de vivre à l'extérieur. Durant leur séjour leur demande se limite à être là. Ils fonctionnent parfaitement bien, créent des liens très rapidement avec les autres patients, se préparent du café qu'ils boivent sur la terrasse, amènent leur console de jeux... bref dérive la plus totale du lieu de soin vers un hébergement, une bulle ou il fait bon vivre... beaucoup plus qu'à l'extérieur. La psychiatre de mon unité est très maternelle mais le problème se pose également dans les autres services. Je voudrais savoir si vous rencontrez vous aussi cette difficulté? comment la gerez-vous?
merci!
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dino
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Message par dino »

...nous avons les mêmes échos avec une clinique où certains de nos patients font des séjours réguliers...nous l'appelons également le club-med, tout comme toi... :lol:
Ceci dit, comme tu le soulignes, il est difficile pour certaines personnes de "vivre à l'extérieur"... Ces séjours "récréatifs" seraient-ils le prix à payer pour leur éviter un isolement total ?
Je constate que plusieurs de nos patients du CMP "tiennent le coup" grâce à ces périodes intermittentes... Alors, pourquoi pas, après tout ? Cela vaut peut-être mieux qu'une hospitalisation en continu dans une structure plus lourde (et plus couteuse) ? :?
emily_the_strange
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Message par emily_the_strange »

Il est vrai que cela évite l'isolement, mais je pense que l'énergie qu'ils utilisent à investir le service ils ne peuvent pas investir l'extérieur.
Est ce que tu as vu des services ou un contrat de soin (durée de l'hospit, but) et posé et respecté? J'ai le sentiment qu'on perd de vue le soin à proprement parler, sinon pourquoi ne pas aller en maison de repos?
On a un patient qui s'alcoolise régulièrement et qui est venu se faire hospitaliser pour qu'on le protège de lui même. Une autre qui dès son arrivée demande un régime alors que chez elle elle mange des sucreries +++ "oui mais si j'ai pas le choix je vais le faire"... Quelle est à la limite à notre aide? Est ce que l'on n'amplifie pas la dépendance?
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dino
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Message par dino »

C'est effectivement à double tranchant...J'ai aussi parfois l'impression de participer à un système de soins qui n'en est plus vraiment un... :? On pallie à certaines choses, sans réflexion globale... C'est un peu à l'image de tout le reste, il me semble...
Compliqué tout ça...Allez, il se fait tard, la nuit porte conseil...Image
:lol:
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dragonfly
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Message par dragonfly »

C'est un pb qu'on constate aussi partiellement dans notre service (psy adulte, service ouvert, 20 lits + 2 CI).
Je me suis encore engueulée avec un de nos medecin ya pas une semaine à cause d'un patient soit disant "depressif et alcoolique" qui ne voulait pas sortir avant telle date!!! :choque:
Les patients décident désormais de leur admission et de leur date de sortie! Trop fort! Tous les soignants etaient d'accord pour dire que ce patient n'avait plus rien à faire en hospit et qu'un suivi en ville suffirait désormais largement et son psy etait d'accord mais devant celui ci il s'est écrasé! Il a fallu que je fasse moi même remarquer au Pt pdt l'entretien qu'il était bcp mieux, qu'il faisait sa ptite vie tranquille (on ne le voit qu'au moment des ttt, il passe sa journée à la cafet et vient nous voir quand il ne veut pas payer son café pour qu'on lui en fasse un! la fête quoi!)...
BREF!
Pour le coup, cette semaine ci, j'ai bien cru que le service était devenu le club med pour certains effectivement!

Heureusement ça ne se généralise pas et le chef de service revenant de vacances va vite remettre les points sur les "i"... enfin j'espère!
IDE en psy adulte référente activités - responsable atelier créatif - projet pro Art-thérapeute
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Enthys
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Message par Enthys »

Bah flûte alors, je croyais que le club med c'était chez nous...
Nous avons d'ailleurs le projet d'accueillir les nouveaux entrants avec un collier de fleurs...
C'est parfois agaçant de se dire que l'on ne propose que le gîte et le couvert à certains, et surtout, de se sentir aussi éloigné du soin. Après tout, on ne choisit pas de bosser en psy pour uniquement donner des médocs et basta...
Malheureusement je crois que c'est ce vers quoi tend la psychiatrie aujourd'hui, si l'on exclut les quelques rares lieux de soins où un espace de paroles et de réflexions est encore possible...
Je pense aussi que c'est encore plus vrai dans le privé. Il n'y a qu'à voir l'ensemble de prestations proposées, qui ne sont jamais le fruit d'un quelconque projet thérapeutique.
Il faut réussir à relativiser, se dire que si certains font le choix de l'hospi, c'est qu'il y a tout de même une souffrance. Après tout, ce n'est pas anodin de CHOISIR d'être hospitalisé en psy. Quelquefois, plusieurs hospi sont nécessaires avant que le patient n'exprime une demande de soins. Quelquefois fois la rupture avec l'environnement se suffit à elle-même. D'autres fois, le simple fait d'être en institution permet au patient d'être sécurisé. En tant que soignant on voudrait souvent plus...
Même si je comprends ton découragement, il faut parfois se contenter de ce que l'on propose. De mon côté j'envisage de partir vers d'autres endroits où l'herbe me semble plus verte, mais après 3 lieux d'exercice je commence à douter de pouvoir encore travailler telle que je le désire (idéalise?) comme infirmière en psy. Ah, je regrette de ne pas avoir connu la psychiatrie infirmière d'il y a pourtant si peu de temps. Heureusement que j'ai quand même eu la chance de rencontrer et des ISP qui m'ont accueillie, écoutée, aidée et encouragée dans cette voie, et des lieux où le soin avait tout son sens.
Enfin bref, entre médocs, protocoles, paperasses, ce qui me gêne aussi souvent c'est de n'avoir du temps que pour ceux qui crient (eux ont la chance de pouvoir le faire?...) et de passer à côté de bcp d'autres. L'infirmier a-t'il toujours sa place dans le soin en psy? Alors certes c'est quelquefois rageant de voir certains patients venir au club pour 3 semaines, mais n'est-ce pas aussi ce vers quoi tendent les etablissements privés (suivis d'ici peu par le public) ? Que proposons-nous finalement à ceux-là? Et puis n'oublions pas l'origine du mot asile, après tout, c'est déjà quelque chose de faire asile, espérons juste que nous ne tendions pas vers de l'asilaire...
Bon je ne sais pas si je suis claire, car j'aborde plusieurs sujets différents, mais bon, je balance un peu de mon ressenti ici...
Finalement ces patients ne nous renvoient-ils pas notre propre image du soignant?

Ah oui, pour finir, nous aussi les vacanciers peuvent choisir leur date de sortie, et si cela peut éviter des lits vides, il n'y aucun problème!!

Bonne journée à vous.

PS: Pour Dino, tu es de Bourgogne, je suis GO dans un club med pas très loin...
emily_the_strange
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Message par emily_the_strange »

Enthys ta réponse est des plus intéressante.
On propose à des patients un endroit ou la vie est parfaite, ou tout est pris en charge, même l'ennui. 3 jours d'hospitalisations et direction les ateliers médiatisés, l'ergothérapie, le gymnase. Un planning bien rempli qui ne laisse jamais la place à la réflexion sur eux-même. Je ne dit pas qu'il faut laisser les patients seuls toute la journée ruminer, mais quel sens on donne à tout ça?? ils voient une assistance sociale pour prendre en charge les factures etc.
Et puis une fois les signes de mal être couvert par tout ça on leur parle de sortie... et là c'est le drame! Comment peuvent ils réintégrer la vie quotidienne? Je pense que notre responsabilité est importante, à nous de préparer la sortie, de comprendre la problématique et de pouvoir modifier la comportement. Bien évidemment pas tout seul, pas en une seule hospitalisation.
Notre service d'urgence qui oriente tout les patients a des difficultés à refuser, differer une hospitalisation. A nous de poser un sens à l'hospitalisation aux patients qui sont perdus, face à leur problématique.
Enthys je comprend ta déception mais je pense qu'à notre niveau on peut faire des choses, soulager un patient de son agoisse, l'amener à prendre conscience de certaines choses. Certes il ne faut pas en attendre trop mais avec le temps on peut arriver à certaines choses.
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dino
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Message par dino »

Tout cela ne pose-t-il pas la question de l'alternative à l'hospitalisation et au manque de structures adaptées ; les lieux de soins ne sont-ils pas également remplis par manque de lieux de vie ?
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malou70
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Message par malou70 »

dino tu formules mes interrogations :oops:

Club med, hotel, ......... oui, parfois souvent.......... et alors........ du moment que moi infirmière e reste infirmière et je ne deviens pas GO.

Au début je comprenais mal ce que certains patient pouvait venir rechercher en hospit car ils étaient passifs, ne demandaient rien, n'adhéraient à aucun projet....... puis petit à petit je me suis rendue compte que nous étions un lieu de mise à distance de leur quotidien.

Il y a quelque temps l'assistante sociale et moi meme accompagnons un patient à domicile, chercher sa carte d'identité quelques papiers pour constituer un dossier de maison de post-cure et quelques affaires.
L'adresse me parlait pas et pourquoi, lieu reculé derrière notre grosse usine automobile, qui à pour jolie nom les cités blanches, je pensais pas que par chez nous on pouvais avoir pire que la ZUP, et bien si, des très vieux immeubles, la plupart insalubre, le néant autour hormis l'usine, dans lequel notre fameux patient travaille.
Comment reprocher à ce patient la comparaison entre notre hopital et le club med.
Sa chambre d'hopital est aussi grande que son appartement, il est nourri de manière équilibrée à chaque repas, il n'est pas obligée de se rendre à un travail qui est alimentaire.............

Si le monde était mieux fait ce patient vivrait dans des conditions plus salubres, n'auraient pas perdu le droit de visite de ses enfants chez lui, (à savoir qu'il vienne au CHS),..........

Malheureusement ou heureusement la psychiatrie est un lieu où l'on peut faire du social, pour combien de temps :roll:

Une de mes collegues dinosaures à pour habitude de dire que la psychiatrie est la poubelle de la société (ce qui n'à rien de péjoratif dans ses propos)et d'ajouter c'est à nous de valoriser ces déchets.
Au début cela me choquait, puis au fil du temps cette vision est devenu mienne.
Hâtons-nous aujourd'hui de jouir de la vie ; Qui sait si nous serons demain ? [Jean Racine]
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Message par anna35 »

Dino> je travaille dans un de ces lieux de vie... Notre frustration est la même! Et la formule club med s'applique aussi (18 mois de séjour en moyenne voir jusqu'a trois ans) .
on est censé etre un passage entre l'hôpital et un logement mais beaucoup se trouve très bien chez nous...
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dino
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Message par dino »

...ça veut peut-être dire que votre structure répond à un réel besoin, pour des gens ayant des difficultés à vivre seule :?:
anna35
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Message par anna35 »

la structure répond à un besoin c'est clair ... Malheureusement les patients la voient comme un moyen de mettre de l'argent de coté... :?
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Message par dino »

Dans ce cas-là, ce n'est pas le Club Med, c'est plutôt Las Vegas... :?
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moonlunak
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Club med breton

Message par moonlunak »

Là où je travaille les patients ont des permissions 10h-22h (plage , resto, ciné), du coup on ne voit certains que le matin au réveil et puis c'est tout, je trouve ça frustrant pour notre rôle de soignant et j en ai parlé au psychiatre qui m'a répondu "je ne vois pas ce qui vous gêne, si le patient est mieux hospitalisé qu'à l extérieur, c'est qu'il est déjà dans le soin et nous aussi!"

Moi pitete jeune et expérimentée mais moi pas comprendre ce discours dans le sens où mon rôle devient d'une passivité agaçante...

Ne suis je qu'un distributeur de bonbons à leurs yeux? Combien me demande un bonbon bleu (équanil) avec un grand sourire??A quoi sert le discours sur la necessité d'un "travail sur soi"?
Comme m'a répondu un patient une fois "je suis pas un chantier moi, j'ai pas de travail à faire sur moi!"

Et oui mon quotidien c'est plus de 50% des patients que je ne connais pas car je n ai pas l'occasion de faire leur connaissance...heureusement l'autre partie reste demandeuse d entretien infirmier et de prise en charge thérapeutique mais il reste cette sensation de ne pas faire du bon boulot... :(

désolé de m'être épanchée mais l'été a été difficile à supporter (d'autant plus quand on a pas de vacances...): coups de soleil, insolation, irritation due au sable...un été de bobologie où je n'ai pas perçu mon travail comme valorisant... :?
Diplômée depuis bientôt 1 an!!!
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