Problèmatique chômage chez ide: regards des cadres de santé

En partant du concours jusqu'aux plus hautes responsabilités hospitalières...

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uij_54936
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Problèmatique chômage chez ide: regards des cadres de santé

Message par uij_54936 »

Bonjour,

IL existe un problème de chômage chez les IDE depuis maintenant un an et un ensemble de régions est touchées.

Des facteurs comme les restrictions budgétaires, 2 promos d'IDE sorties à 6 mois d'intervalle en 2012 , fermeture

d'unités, restructions/réorganisation, développement de l'HDJ, allongement des carrières sont des facteurs favorisant

la diminution des postes disponibles chez les IDE.

Il est donc intéressant de savoir quel regard porte les cadres de santé sur ce phénomène.

Quels changements avez-vous perçu à votre niveau?

Est-ce que tous les cadres de santé ont conscience de l'ampleur de la dégradation du marché du travail chez les IDE?

La direction des soins infirmiers en a-t'elle aussi conscience?

Pensez-vous que ce phénomène se pérenisera?

Tous vos points de vue sont attendus.

Merci
WUCAN
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Re: Problèmatique chômage chez ide: regards des cadres de s

Message par WUCAN »

Bonjour,
le chômage chez les infirmiers existe il est vrai depuis peu, mais pas dans toutes les régions... Curieusement les déserts médicaux et les grandes villes où les logements sont hors de prix, par exemple Paris, ne le connaissent pas vraiment...

Si les Directions de soins sont conscientes de la dégradation (pour qui la dégradation ?) du marché du travail des infirmiers ? Et bien oui, elles en sont conscientes et en sont aussi bien contentes, puisqu'elles n'ont plus de postes vacants et font ainsi des économies de remplacements, d'intérim etc...

Comment les cadres de cadres de santé perçoivent le fait que nombre de nouveaux diplômés ne trouvent pas à s'employer ? Ils s'en moquent aussi un peu, eux aussi sont bien contents d'avoir du personnel fixe ! Par contre, ils flippent de voir partir les anciens, compétents, pour les voir remplacés par des nouveaux, qui coûtent moins cher et qui ne sont pas encore compétent et parfois même dangereux (de plus en plus avec le nouveau référentiel de formation...).

Il est à savoir que cet état de fait est la volonté d'une politique de lutte contre la pénurie des infirmières et l'anticipation, plus préoccupante encore, d'une pénurie de certaines disciplines médicales. Parallèlement donc, sont développés de projets de transferts de compétences des médecins vers les IDE, sans formation diplômante et sans reconnaissance financière ! Ces IDE que l'on ne sait pas où mettre pourront alors plus facilement accepter de faire, parce qu'elles ne trouvent pas de boulot, ce que les anciennes refusent.
Et c'est valable aussi pour les conditions de travail dégradées....

Le résultat de cette politique est l'inversion du rapport de force entre employeurs et employés, entre professionnels et décideurs politiques... Alors qu'avant nous pouvions négocier un salaire et des conditions de travail au cas par cas, aujourd'hui nous sommes forcées d'accepter l'inacceptable. Les nouveaux prennent le boulot parce qu'il faut qu'ils en aient un, les anciens choisissent de rester en se résignant, parce qu'on leur fait bien comprendre que la porte est ouverte et que s'ils ne sont pas contents, il y en a 10 dehors qui sont prêts à prendre leur place.

Si ce phénomène va se pérenniser ? Bien sur ! Pourquoi croyez-vous que les décisions politiques iraient vers la réduction des quotas autorisés dans les instituts de formation, sachant que ce faisant, ils se priveraient de continuer à jouir d'une précarité grandissante qui n'a pour conséquence que la malléabilité encore plus certaine des populations concernées ?

Entre parenthèse, cette ouverture des quotas à l'entrée, obligeant à recruter avec des niveaux de plus en plus bas (quelqu'un qui réussit le concours aujourd'hui l'aurait raté il y a 10 ans) avec en parallèle l'augmentation du niveau d'exigence à la sortie, place les IFSI et les formateurs dans une position très difficile à tenir. Leurs budgets sont reconduits d'une année sur l'autre en fonction des réussites au diplôme, leur intérêt est que tout le monde réussisse, mais malheureusement ils ont recruté une bonne part de personnes, certes gentilles et dévouées, mais ayant de très grandes difficultés à produire les travaux écrits exigés tout au long de la formation depuis le nouveau référentiel de 2009. Et puis qui, des plus instruits, de ceux qui ont les plus grandes capacités intellectuelles aujourd'hui a envie de se taper 3 ans d'études où l'on vous rabaisse et vous déconsidère, pour faire un boulot de fou, dans des conditions dramatiques, où l'on ne vous considère finalement pas beaucoup plus et où on vous paye à peine plus qu'une femme de ménage ? (13,51 euros brut de l'heure avec 17 ans d'ancienneté c'est génial, non ?) En plus aujourd'hui il y a le chômage, donc les attraits de la profession, il n'en reste plus beaucoup... S'y orientent tous les Bac Pro Carrières Sanitaires et Sociales, les AS en désir d'évolution professionnelle qui généralement n'ont pas le Bac, les refoulés de médecine (quoi que... pas tous...). Ce que je veux dire c'est qu'il n'y a pas besoin d'être un cerveau pour devenir infirmière et heureusement ! Il faut être humaine et préoccupée par le bien-être d'autrui et pour ça, nul besoin de savoir écrire et réfléchir comme le demande aujourd'hui le nouveau référentiel de formation. Paradoxalement, lorsqu'on prend un poste, il faut s'arrêter de penser, exécuter et se taire, éventuellement on pourra dire quelque chose au moment où il faudra pondre les EPP pour la certif !

C'est la crise, vous l'entendez partout et lorsqu'il y a la crise, ceux qui ont la chance d'avoir un boulot se taisent et subissent sans revendication !
Pourquoi voudriez-vous que les décideurs fassent quelque chose pour que ça s'arrête ???

Je pense que l'objectif caché est la dégradation de la profession, au rang de bouche trou, de main d’œuvre malléable et corvéable à merci pour un salaire de misère, de femme de ménage améliorée, quoi. Tandis que l'objectif affiché est au contraire la revalorisation de la profession, par l'universitarisation de la formation et la mastérisation des spécialisations (on n'en est pas encore là, mais bon...). Au bout du compte vont être créées différentes catégories d'infirmiers, différents diplômes, avec des valeurs marchandes différentes, forcément... Au final, c'est diviser pour mieux régner, vous connaissez le principe. Et en bout de course, pourquoi payer plus une infirmière dont les compétences sont reconnues par un diplôme spécialisé alors qu'une infirmière de base peut faire la même chose (??? la même chose ???) pour moins cher ?

Finalement en allant encore plus loin, vous comprendrez que ce que cherchent nos chers décideurs, politiques et autres, ce n'est pas la qualité des soins, non certainement pas, c'est produire des soins au meilleur coût, car les salaires des professionnels, si vous ne le savez pas, représentent 70% des charges d'un établissement.

Et comme, en tant qu'infirmière nous n'avons pas encore réussi à nous sortir de la domination médicale (c'est même le contraire puisque les formations sont reparties vers les facultés de médecine, alors que la politique de santé s'oriente depuis près de 20 ans vers la prévention et l'éducation à la santé, il aurait été bien plus logique de confier la formation des infirmières aux universités de sciences de l'éducation ou de psychologie, en gardant bien sûr un enseignement médical mais finalement pas dominant. Ce faisant cela nous empêche de faire reconnaître un savoir propre à notre profession, une science qui mérite d'être enseignée jusqu'au doctorat au même titre que les autres sciences. Vous voyez là encore le double discours, on universitarise la formation, mais on fait tout pour que concrètement elle ne puisse pas se développer...)

Donc, comme nous ne réussissons pas, on ne nous laisse pas la possibilité de nous sortir de la domination médicale, nous sommes extrêmement peu représentées dans les instances politiques (vous avez vu beaucoup d'infirmières députés vous ? Par contre les médecins, il y en a plein, qui votent les lois dans le sens qui maintient leurs avantages acquis plutôt que dans le sens de l'intérêt général..., parce que les salaires des médecins, ils pèsent aussi fortement dans la balance... Quand on voit que le gouvernement veut limiter les salaires des grands patrons, ça ne le dérange pas de voir que certains médecins déclarent annuellement des revenus dépassant les 500000 euros ! Et c'est la sécu qui paye, c'est à dire nous, pauvres couillons, le peuple qui est ponctionné par les cotisations sociales et les impôts ! Et en plus maintenant il va falloir travailler jusqu'à 65 ans et même peut-être plus, dans des conditions qui se dégradent et ne cesseront de se dégrader...

La création de l'ONI est une avancée merveilleuse, un grand pas dans la reconnaissance sociale et politique de notre profession. Malheureusement celui-ci est muselé et ne se préoccupe pas de ce qui préoccupe toutes les infirmières, à savoir leur salaire et leurs conditions de travail, leur reconnaissance sociale, leur place dans la société et la cité. C'est d'ailleurs pour ça que personne ne veut cotiser... Le Conseil National de l'Ordre des médecin est un acteur de poids assis à la table des négociations quand il s'agit de défendre les revenus de ses adhérents (paiement à l'acte) et leurs conditions de travail (liberté de prescription, liberté de choix d'installation... alors que les infirmières ne l'ont plus depuis 2011). Où est l'ONI quand il s'agit de porter haut et fort la voix des infirmières ????

Bref, vous comprendrez au final qu'une profession qui connait le chômage est une profession qui finit par se laisser faire et avaler toutes les couleuvres qui lui sont présentées... Voilà, le chômage voulu c'est pour encore plus nous soumettre et nous dominer, nous les petites mains, le petit peuple... pour ne pas dire la populasse...

Ouvrez les yeux, intéressez vous à la politique, découvrez le monde réel pourri dans lequel vous avez choisi d'avancer avec la volonté de donner de vous même, de faire le bien autour de vous, de vous sentir utile et de soulager les plus fragiles. Vous allez être exploitée, bafouée dans vos convictions les plus profondes, soumise à la dictature de l'organisation à flux tendu, de la productivité et de la rentabilité, au management autiste et dépassé, soumis d'ailleurs lui aussi à des injonctions paradoxales perpétuelles...

Quand vous voyez que les pharmaciens, qui n'arrivent plus à continuer à se "gaver" avec leur officine sont en train d'essayer de faire reconnaître par la sécu, un acte facturé 30 euros qui consiste en une explication au patient de son traitement et de la surveillance de ses effets et des effets secondaires, il y a quand même de quoi s'insurger ! Nous les infirmières, notre décret de compétences c'est quoi ? Nous informons et éduquons les patients sur leur traitement depuis toujours et on ne nous paye pas 30 euros de plus chaque fois ! A moins que, à moins que, finalement ce qu'ils cherchent à obtenir à long terme, ce sont des infirmières qui exécutent, qui font les soins, qui ne réfléchissent pas et qui du coup, effectivement pourraient être payées beaucoup moins cher... Mais c'est en contradiction avec l'évolution de la formation, non ?

Voilà, je pense que la profession d'infirmière est arrivée à un tournant crucial de son évolution et il ne faudrait pas le rater en acceptant tout sans rien dire, en se tapant les unes sur les autres pour maintenir nos avantages individuels (libéral, salarié, public, privé, de base ou spécialisée), en ne cherchant pas à se former au-delà du nécessaire pour être en capacité de dérouler un argumentaire structuré, qui tient la route et qui utilise les concepts qu'on essaie de nous faire avaler pour démontrer que ce que l'on nous impose est non seulement inacceptable mais en totale contradiction avec le discours public bien pensant de nos dirigeants. Il faut savoir se défendre avec les armes de l'adversaire.

Bienvenue dans la profession ! Le chômage est un moindre mal vous savez ?
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Re: Problèmatique chômage chez ide: regards des cadres de s

Message par supertomate »

Je plussoie. Merci Wucan pour cette remise au point.
Le plein emploi infirmier a vécu, même si cela est encore marginal dans les grands bassins de population. Dans la campagne profonde, j'ai du aller voir mon ami Paul Amploy pour quérir du travail, le CHU n'embauche pas (tout le monde reste accroché à son poste, c'est signe que le fauteuil est confortable), il n'y a pas de clinique, les occasions de CDD sont de nuit en géronto ou en psy, ce qui me plairait bien si cela n'était à plus d'une heure de route...
Chez Paul ( :roll: je l'appelle comme ça maintenant, c'est devenu une fréquentation...), on m'a regardé comme une vache Milka (dans une région qui connait plus de vaches que d'êtres humains) :choque: quand j'ai dégainé mon CV. "mais vous êtes infirmière, vous pouvez trouver toute seule !"
Merci, donnez moi les sous, et je verrai si la fée Assedik m'envoie ses ondes positives :idee: :fleche: cours à l'IFAS ? :fleche: IDEL?

La réaction de mes copines cadres à mon chômage ? :mal: "c'est scandaleux de pointer au chomdu, à mon époque, on n'aurait jamais osé, on aurait pris le premier travail qui se présente..."

:? moi, je veux travailler, mais je veux aussi être bien dans mon travail. Si cela implique que je ruine mon dos et mon sommeil, je préfère encore passer mes AM à suivre des formations en ligne (sur mon site pro préféré) ou à réévaluer ma carrière.
A + !!!
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Re: Problèmatique chômage chez ide: regards des cadres de s

Message par uij_54936 »

Bonjour,

D'après vos témoignages, les offres d'emploi sont aussi rares chez les cadres de santé.

Cela signe que le marché de l'emploi est dégradée à tous les échelons autant de cadre aux as..

Comme, il est dit, les gens gardent leurs emplois et se permettent moins de changer de poste qu'avant.

En gros, le problème du chômage est maintenant un problème globale dans un contexte concurrentielle ( concurrence entre les professionnelles de santé pour décrocher un poste, concurrence entre les CDD pour savoir qui sera garder ou pas à la fin du CDD)!

Belle avenir!!
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Re: Problèmatique chômage chez ide: regards des cadres de s

Message par loulic »

WUCAN a écrit : La création de l'ONI est une avancée merveilleuse, un grand pas dans la reconnaissance sociale et politique de notre profession. Malheureusement celui-ci est muselé et ne se préoccupe pas de ce qui préoccupe toutes les infirmières, à savoir leur salaire et leurs conditions de travail, leur reconnaissance sociale, leur place dans la société et la cité. C'est d'ailleurs pour ça que personne ne veut cotiser... Le Conseil National de l'Ordre des médecin est un acteur de poids assis à la table des négociations quand il s'agit de défendre les revenus de ses adhérents (paiement à l'acte) et leurs conditions de travail (liberté de prescription, liberté de choix d'installation... alors que les infirmières ne l'ont plus depuis 2011). Où est l'ONI quand il s'agit de porter haut et fort la voix des infirmières ????
Repeter à l'envie un lieu commun débile n'en fait une vérité.

L'ordre des médecins n'est invité à la table des négociations que lorsque son avis est conforme à ce qui a été décidé par le gouvernement ou les différentes tutelles.

Et encore …

http://www.lefigaro.fr/entrepreneur/201 ... enacee.php
Dès qu'il eut franchi le pont, les fantomes vinrent à sa rencontre.
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Re: Problèmatique chômage chez ide: regards des cadres de s

Message par san80 »

:roll:
Quand on a bac + 10 , on doit certainement se croire supérieur............

Je ne connais pas de cadre qui ait le cran et le pouvoir de s' opposer à ces

mecs qui représentent "la réussite".

Ce ne sont pas forcément des personnes trés "recommandables"............
:roll: :?: :roll: :choque:
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