Encadrement d'étudiant en psychiatrie

[Yohann Ryo]

Bonjour,

Je suis infirmier dans une Unité fermée depuis 2 ans, et je vais pour la première fois être tuteur d'un(e) étudiant(e).
Je me sens très à l'aise dans les soins en psychiatrie, cependant j'ai quelques doutes sur la manière d'accompagner correctement un étudiant afin qu'il(elle) saisisse l'essence du soin.
Comment me suggéreriez-vous de procéder?

J'espère avoir été claire. Merci pour vos réponses.
Bonne journée.

[brrruno]

Bonjour,
Qu'est ce que vous souhaitez transmettre ... Un protocole ou une réflexion ? Si vous répondez à cette question vous trouverez certainement ce que vous cherchez. Et puis même si vous êtes "tuteur " le travail en psychiatrie et un travail à plusieurs ...

[charlottepoutras]

Je pense qu'il faut faire ton travail comme tu en as l'habitude, expliquer ce que tu fait tout simplement. La plupart du temps les étudiants ont une appréhension pour les stages de psy. Il faut donc aussi accepter que l'étudiant que tu encadre est peur, ou bien ne soit pas emballé par ce stage la. A toi de lui montrer que comme dans les autres disciplines il y a des soins intéressants, qu'il y a des responsabilités, et que tout comme dans un autre service le patient évolue, et que notre prise en charge est très importante. j'espère t'avoir plus ou moins aidé avec ma propre expérience.

[IDEalement]

Etant ESI moi même et ayant fait un gros stage en psychiatrie carcérale avec de bons tuteurs en s5, je vais me permettre de dire 2/3 choses.

On arrive souvent perdu dans ce type de stage et on aime bien être guidé sur les connaissances à acquérir: Les psychopathos souvent rencontrées dans le service, la pharmacologie que vous utilisez souvent, la loi de 2011, les types d'hospit, les dispositions légales sur la contention, quel rôle infirmier pour la CSPI (CI) etc...
Mes tuteurs prenaient du temps pour interroger mes connaissances, me proposaient de synthétiser un EMI, le déroulement d'une activité thérapeutique, de faire une anamnèse sur un patient, de prendre en charge une NAP...
J'osais pas au début j'avais peur et les tuteurs ont été très compréhensifs en venant me chercher la première semaine, et le reste du temps, je me suis saisi à fond du stage et je me suis régalé, parce qu'autonome à quasi 100%, j'avais confiance.

Une tutrice m'a proposé un truc sympa quand la CSPI était libre: De me laisser essayer la contention sur elle. Ça parait bête mais beaucoup d'ESI ne l'ont jamais fait.

Rien d'extraordinaire, ils étaient eux-mêmes, ils m'ont un tout petit peu poussé au début, le reste du temps ils répondaient à mes questions et ça se passait très bien.

[charlottepoutras]

Tu confirme ce que je disais...l’appréhension de la psy..
Je boss aux urgences psy donc je sais bien qu'elle est présente. Nous dans notre équipe on fait en sorte que l'étudiant trouve sa place, et soit capable de tout gérer quasi seule à la fin du stage: soins, certificat, demande d'hospit..etc.

[erquy72]

Bonjour,

Je suis infirmier dans une Unité fermée depuis 2 ans, et je vais pour la première fois être tuteur d'un(e) étudiant(e).
Je me sens très à l'aise dans les soins en psychiatrie, cependant j'ai quelques doutes sur la manière d'accompagner correctement un étudiant afin qu'il(elle) saisisse l'essence du soin.
Comment me suggéreriez-vous de procéder?

J'espère avoir été claire. Merci pour vos réponses.
Bonne journée.

Tout dépend où en est l'ESI dans sa formation.

Les objectifs généraux pour nos services :
- découverte de la spécificité du service (différents modes d'hospi avec les différents certificats et le rythme des "visites" chez le juge, organisation, population accueillie, pathologies prévalentes, les différentes mesures de protection ...)
- découverte ou approfondissement de la théorie (pathologies, pharmaco (indication, mode d'action, effets indésirables, surveillance et rôle IDE)
- acquisition des gestes techniques (adapter la liste en fonction de ce qui se fait dans ton service à l'aide de la liste du portfolio)

Si tu accueilles un ESI1, il n'aura pas encore eu d'apports théoriques puisque la psychopatho est abordée au semestre 2 (qui débute juste pour les promos entrées en septembre), tu devras donc lui expliquer la différence entre névrose et psychose. Difficile de demander de faire la recherche car sur internet, cela peut apparaitre confus.
Ensuite, tu pourras lui demander, par contre, de faire des recherches sur les différentes pathologies et de mettre en lien les différentes approches thérapeutiques ainsi que les différents modes d'hospitalisation.

Pour un ESI 2 ou 3 qui a déjà eu les apports théoriques et la pharmacologie, tu peux commencer par évaluer ses connaissances théoriques et si besoin lui demander d'approfondir.

Ensuite, comme dit précedemment, tu fais comme d'habitude en lui demandant de mettre du sens sur la prise en charge : pourquoi, comment, quand ..?

Enfin, tu lui confies 2 synthèses à rédiger (présentation, histoire de vie, histoire de la maladie, histoire de l'hospitalisation et devenir) pour 2 patients choisis et pour lequel, l'ESI devra se positionner comme un référent : suivre le patient, assister aux entretiens médico-infirmiers, réaliser les entretiens infirmiers, organiser les rdv médicaux ou avec l'assistante sociale, organiser la sortie ...

[cassandre82]

je vais comme mes collègues faire part de ma petite expérience d'encadrement....

voilà comment je procède pour ma part (en sachant que bien sûr je ne suis pas seule ide dans le service donc chacun ajoute sa touche perso)

-le 1er jour je laisse l'élève en observation. travaillant avec des adultes autistes très ritualisés, l'arrivée d'une nouvelle tête est un gros changement. donc je n'envoie pas l'élève au charbon dessuite car cela pourrait perturber les patients et puis je veux que l'élève s'habitue aux patients, aux habitudes de service...
-puis les 1ers jours je le laisse voir d'abord le travail des as qui dans mon service est aussi important que celui des ide. l'élève doit pouvoir prendre un patient en charge à la toilette, aux changes, aux repas.... surtout que pour les autistes ce sont des moments où on travaille l'autonomie, l'éducatif. c'est très important
-dès les 1ers jours, je demande à l'élève s'il connait la psy, quels ont été ses stages, s'il a un projet pro (ex : l'élève qui a super peur de la psy et qui veut être puer. je lui répond toujours que dans mon service il/elle a tiré le jackpot. les puer peuvent rencontrer des enfants autistes donc en faisant un stage avec des adultes autistes, l'élève va apprendre à repérer et à prendre en charge certains comportements autistiques; idem ceux qui veulent bosser en neuro ou en gastro, je leur explique qu'on retrouve des autistes en neuro car souvent il y a épilepsie associée et en gastro car souvent les autistes ont des problèmes gastro.... bref j'essaye de mettre du sens à leur stage, à leur montrer que même s'ils n'aiment pas la psy ou en ont peur, ils vont apprendre pleins de trucs utiles)
-je demande aux élèves d'avoir un minimun de connaissances à avoir à la fin du stage : les différents ttt et les effets indésirables, les différentes patho rencontrées, les modes d'hospit, tout ce qui touche à tutelle/curatelle... ect
-je leur donne des pistes de lecture ou de film à voir sur l'autisme ou la psy, ça peut permettre de mieux comprendre parfois
-ensuite ben je l'encadre sur des soins, je pose des questions lors des soins ou lors des préparations des ttt pour voir ce qu'il a appris...
-mi-stage ont fait un bilan
-enfin bien sûr je m'adapte en fonction de ses objectifs, en fonction des stages qu'il a fait, de l'année d'études où il est (on ne fait pas la même chose avec un 1ère année ou avec un 3ème année)


bien sûr ce que je fais n'est pas parfait et puis après c'est un travail d'équipe, mes collègues amènent elles aussi leur touche, mais cela peut te donner des pistes...

bon courage

[Lenalan]

Dans l'autre sens que conseilleriez vous de préparer à un ESI qui arrive dans votre service si vous aviez la possibilité de lui en parler avant d'arriver? (j'ai déjà quelques éléments avec le post d'Erquy)

Je suis en 2ème année, je vais faire un stage de 5 semaines en S4 (donc toute fin de 2ème année, ce sera en juin-juillet) en secteur fermé qui reçoit majoritairement des personnes incarcérées (les autres 5 semaines se feront en hôpital de jour dans une clinique psy privée). J'ai quand même une grosse appréhension avec ce qu'on entend sur ce lieu précis (dernièrement une infirmière a été frappée assez violemment, les infirmiers n'y restent pas très longtemps et ils peinent à trouver des gens qui souhaitent y travailler). Déjà que la psy n'est pas à priori ce qui m'attire le plus, j'y vais un peu angoissée.... Je ne découvre pas puisque j'ai déjà fait un stage en CMP, un en secteur ouvert et un en alcoologie qui n'est pas de la psy à proprement parler mais il y avait pas mal de patients avec des pathologies psychiatriques.

[augusta]

Dans l'autre sens que conseilleriez vous de préparer à un ESI qui arrive dans votre service si vous aviez la possibilité de lui en parler avant d'arriver?

- d'être curieux de l'autre.
- de se poser des questions...de s'étonner...
- d'observer....
- de ne pas lire les dossiers les 1 ers jours.
- de laisser le temps à l'autre de l'apprivoiser.
- de ne pas avoir peur du lien qui va (c'est à espérer) se créer.
- de parler à l'équipe de ses ressentis, de faire part de ses interrogations...

Entre autres...
Bon stage Lenalan!!!

[AmThLi]

Dans l'autre sens que conseilleriez vous de préparer à un ESI qui arrive dans votre service si vous aviez la possibilité de lui en parler avant d'arriver? (j'ai déjà quelques éléments avec le post d'Erquy)

C'est difficile à dire... C'est comme chez McDonald's, "venez comme vous êtes".
J'aurais seulement tendance à conseiller à quelqu'un qui visite le service avant d'y venir en stage de ne pas trop se bloquer sur les temps et objets trop visibles : médicaments, clés, horaires précis (repas, distribution des médicaments)... De manière à se laisser des espaces d'imprévus pour que les rencontres avec les patients se fassent.

Si un truc arrive, il faut pas s'interdire d'en être parce que "c'est pas l'heure".

Pour ton stage en particulier, normal que tu angoisses, visiblement c'est pas un lieu très rassurant.
Dis-toi quand même que l'on protège beaucoup les élèves dans ces endroits, et qu'à ma connaissance il est rarissime (le risque 0 n'existant pas) qu'un élève se fasse taper dessus.

[Lenalan]

Merci pour vos réponses! J'ai 3 mois pour m'y préparer psychologiquement J'ai une collègue de 3ème année qui en sort, elle a plutôt aimé, l'équipe (majoritairement masculine) est particulièrement vigilante et les femmes ne rentrent même pas dans certaines chambres. Je pense que ça va être une expérience dure mais très enrichissante!

[AmThLi]

Cette organisation "hommes // femmes" en psychiatrie est complètement débile et c'est elle qui induit les réactions des patients qu'elle prétend prévenir.

Chaque problématique est individuelle : un patient ou une patiente peut avoir un problème avec "les hommes" ou "les femmes", mais systématiser les choses a-priori, comme ça se fait beaucoup en psy et particulièrement en psy carcérale, est stupide et contre-productif.

[Lenalan]

Bah à cet endroit là ça marche comme ça.....

[AmThLi]

Ca ne m'étonne pas qu'il y ait de la violence, que les gens aient peur et se barrent ! Quand on te dit "rentre pas dans cette chambre là, machin", tu as peur, l'autre sent que tu as peur, et il y a des gens, quand ils sentent qu'en face on a peur, qu'on a une faille et que c'est lié à eux, c'est insupportable, c'est une telle angoisse que la seule réaction possible est un agieren, une mise en acte.

Ce fonctionnement est stupide, il ne tient pas compte de ce qui se passe dans l'inconscient de ceux que l'on prétend soigner, il fonctionne uniquement sur le sécuritaire, sur des suppositions du genre "mec = fort qui dissuade, femme = faible qui se fait taper", qu'est ce que l'autre, en face, peut en déduire ?! Que dans tous les cas, on est dans la confrontation. C'est toute la perversité de l'institution que de semer les germes de la violence et d'arroser les plants pour ensuite reprocher au patient d'avoir cueilli les fruits.

Je ne peux que souhaiter que ton stage se passe bien mais il va sans doute faire un gros travail de tri entre ce qui est effectivement de l'ordre du soin, et de ce qui est, peut être bien que présenté comme du soin, du pur sécuritaire.

[Lenalan]

Ca ne m'étonne pas qu'il y ait de la violence, que les gens aient peur et se barrent ! Quand on te dit "rentre pas dans cette chambre là, machin", tu as peur, l'autre sent que tu as peur, et il y a des gens, quand ils sentent qu'en face on a peur, qu'on a une faille et que c'est lié à eux, c'est insupportable, c'est une telle angoisse que la seule réaction possible est un agieren, une mise en acte.

Ce fonctionnement est stupide, il ne tient pas compte de ce qui se passe dans l'inconscient de ceux que l'on prétend soigner, il fonctionne uniquement sur le sécuritaire, sur des suppositions du genre "mec = fort qui dissuade, femme = faible qui se fait taper", qu'est ce que l'autre, en face, peut en déduire ?! Que dans tous les cas, on est dans la confrontation. C'est toute la perversité de l'institution que de semer les germes de la violence et d'arroser les plants pour ensuite reprocher au patient d'avoir cueilli les fruits.

Je ne peux que souhaiter que ton stage se passe bien mais il va sans doute faire un gros travail de tri entre ce qui est effectivement de l'ordre du soin, et de ce qui est, peut être bien que présenté comme du soin, du pur sécuritaire.

Je viendrai vous dire comment c'est "en vrai" et non des "on dit"