quand le patient femande a mourir

Modérateurs : Modérateurs, Infirmiers - Psychiatrie

Répondre
maricafro
Messages : 9
Inscription : 20 oct. 2013 22:15

quand le patient femande a mourir

Message par maricafro »

Bonjour a tous et a toutes. Voilà, je suis une petite nouvelle (diplomee en juillet!) et je travaille dans service de geronto psychiatrie. Je prends en charge (entre autre) une patiente de 85 ans, qui chaque soir lorsque je lui donne au coucher son cachet d'imovane me demande si ce n'est pas de l'arsenic, je lui explique donc a chaque fois que non, ce n'est pas ça, et lui redonne les informations concernant le traitement. Ce soir elle m'a demandé pourquoi je ne voulais pas lui donner un cachet pour mourir..puis elle m'a demandé " vous pouvez me dire quand je vais mourir?".
La seule chose que j'ai trouvé a répondre est " non madame, personne ne peux savoir lorsque quelqu'un va mourir, mais vous me semblez triste et desesperee , je suis la pour vous écouter si vous ressentez le besoin d'en parler"..et la elle me répond que je ne comprend rien, que comme tout le monde je veux qu'elle souffre et qu'elle préfère encore mieux être seule que mal accompagnée. Cette patiente est entrée pour hétéro agressivité, le psychiatre n'a diagnostique aucun symptome depressif , ni trouble thymique, aucune tentative de passage a l'acte n'est indiquée dans son dossier (c'est ça première hospit en milieu psy)

J'en ai parlé a mes collègues mais leurs réponses me laissent toujours dans l'expectative ...on m'a évoqué l'angoisse nocturne chez les PA..oui mais quoi faire? Est ce ma réponse qui n'était pas adaptée? Quelle stratégie de soins mettre en place?

La question de la mort doit être je suppose une question "récurrente" en travaillant avec des personnes âgées et je reconnais que je ne suis pas a l'aise avec ça, j'ai un peu l'impression que c'est la question piège parce que je n'ai pas de reponse precise a donner.

Si vous pouvez m'aiguiller je vous en serais très reconnaissante , l'expérience des uns et des autres est toujours source de réflexion et d'amélioration. Alors merci d'avance.
brrruno
Accro
Accro
Messages : 903
Inscription : 03 juin 2013 22:58

Re: quand le patient femande a mourir

Message par brrruno »

Je vais peut être faire, faire dresser les cheveux sur la tête de certaines personnes en plaçant la recherche du diagnostic avant de développer sur l'importance de pouvoir écouter quelqu'un qui parle de la mort sans chercher a lui donner une réponse qu'il connait déjà. Mais à 85 ans je suppose que des examens ont été fait pour écarter des problématiques neurologiques liées à l'âge, ou une occlusion ^^.
Sinon pour en revenir aux interrogations, puisque tu as déjà testé de donner une réponse à ses questions, peut être qu'il serai plus judicieux de tenter plutôt la technique de la reformulation, en tout cas de laisser un maximum de place à son expression. Le plus dur, à mon avis, dans la situation est de ne pas se laisser envahir par ce que le discours de la mort peut nous renvoyer. Ne pas répondre à une question, c'est peut être offrir une plus grande place à l'écoute.
Avatar de l’utilisateur
AmThLi
Accro
Accro
Messages : 1293
Inscription : 03 juil. 2010 10:56

Re: quand le patient femande a mourir

Message par AmThLi »

oui il faut peut être chercher un peu à creuser le pourquoi du comment. Qu'est ce qu'elle entend par là, pourquoi elle parle de ça etc.

Je sais pas, l'hétéro agressivité, les trucs autour de la mort, ça fait quand meme un peu dépression de la personne âgée, non ?
Le plus dur, à mon avis, dans la situation est de ne pas se laisser envahir par ce que le discours de la mort peut nous renvoyer
Carrément. Objet d'angoisse par excellence.
"La plus grande proximité, c'est d'assumer le lointain de l'autre."

J. Oury
Avatar de l’utilisateur
augusta
Star VIP
Star VIP
Messages : 10435
Inscription : 23 mai 2008 19:29
Localisation : Dans les livres et aussi ailleurs.

Re: quand le patient femande a mourir

Message par augusta »

Je rejoins ce qui a été dit: une question n'attend pas obligatoirement une réponse. Ecouter c'est déjà un bon début.
Ecouter sans jugement....c'est le plus difficile finalement.

Pourquoi une dame de 85 ans qui émettrait le souhait de mourir serait forcément pathologique? (d'ailleurs....)
"Penser, c'est penser jusqu'où on pourrait penser différemment" Michel Foucault
maricafro
Messages : 9
Inscription : 20 oct. 2013 22:15

Re: quand le patient femande a mourir

Message par maricafro »

Merci pour vos réponses. C'est vrai qu'avec l'envie de tout bien faire je pense que parfois j'essaye de trouver des réponses alors qu'il n'y en pas. C'est un peu une manière pour moi de me sentir soulagée je pense. Je ne suis pas psychiatre et on me laisse une place assez réduite dans mon service car je suis nouvelle. C'est vrai que cette PA a été admise pour heetero agressivité envers son époux, mais quand j'ai un peu creusée avec elle le sujet elle m'a expliqué qu'elle ne supportait pas de le voir perdre son autonomie, et qu'elle aussi devenais de plus en plus grabataire. En fait c'est le deuil de leur vie autonome qu'elle traverse et cela la renvoie au deuil de sa propre vie (je sais pas si c'est très clair quand je l'explique).
Bref, elle me demande toujours tous les soirs son cachet d'arsenic, j'en ai parlé au psychiatre qui ne semble pas soucieux , affaire a suivre....

Pour ce qui est de moi je vais essayer de prendre du recul, et de travailler les techniques de reformulation afin de laisser une plus grande place a l'expression.
Avatar de l’utilisateur
Maripasoula
Insatiable
Insatiable
Messages : 380
Inscription : 07 sept. 2012 21:18

Re: quand le patient femande a mourir

Message par Maripasoula »

maricafro a écrit : Ce soir elle m'a demandé pourquoi je ne voulais pas lui donner un cachet pour mourir.
Ça, ça m'est déjà arrivé !
Un monsieur de 92 ans, en pleine forme, cultivé, charmant, bourré d'humour, admis pour ingestion médicamenteuse volontaire. A l'examen psy : aucune trace de dépression !!

Son discours face au psy (et à son fils) : "oui, j'ai fait une bêtise, j'ai bien compris" :malefiq:

Ce qu'il m'a dit : "je vous en veux de m'avoir empêché de mourir, mais je vous suis reconnaissant de m'avoir évité des séquelles. Ma femme est morte il y a 2 ans, mon fils vit loin de moi, j'ai envie de mourir, c'est normal, non ?"
J'avoue que j'ai répondu : "je peux comprendre ce que vous dites" (pas très pro mais très sincère :? )

Forcément, il m'a alors demandé : "alors, pourquoi est-ce que vous ne me laissez pas mourir ?"
Toujours aussi spontanément, j'ai dit : "mais parce que je n'ai pas envie que vous mouriez" :!:

Il a juste souri... ouf.

Ce n'était pas la meilleure écoute active de ma carrière :lol:
Il vaut mieux pomper même s'il ne se passe rien, que risquer qu'il se passe quelque chose de pire en ne pompant pas.
(devise shadok)

IDE FPH depuis 1994.
Avatar de l’utilisateur
AmThLi
Accro
Accro
Messages : 1293
Inscription : 03 juil. 2010 10:56

Re: quand le patient femande a mourir

Message par AmThLi »

T'as été sincère jusqu'au bout. C'est très bien, loin des réponses de faux cul des manuels de "soins relationnels".
"La plus grande proximité, c'est d'assumer le lointain de l'autre."

J. Oury
brrruno
Accro
Accro
Messages : 903
Inscription : 03 juin 2013 22:58

Re: quand le patient femande a mourir

Message par brrruno »

A maricafro, des reponses il y en a toujours a trouver, a condition d'accepter qu'elle ne soit pas aussi claires qu'on le souhaiterait. Proposer une écoute différente, faire du lien avec l'histoire de la patiente c'est lui proposer des réponses. Mais ce n'est pas magique et le travail de deuil ne se fera pas du jour au lendemain. Par contre il peut s'entendre que certains soir tu demandes a un collegue de passer voir la patiente c'est aussi une demarche professionnelle que de reconnaître les moment ou le relais est nécessaire.
Pour ce qui est de la réponse de maripasoula je ne vois pas ce qui n'est pas pro dans le fait de dire que l'on puisse comprendre un geste. La reponse aurai été ''oui c'est normal'' effectivement ca n'aurai pas été pro mais se permettre de reconnaître la souffrance a au contraire toute sa place dans la relation, et cela ne signifie en rien que le geste soit approuvé.
rantanplan67
Messages : 6
Inscription : 27 oct. 2013 09:17

Re: quand le patient femande a mourir

Message par rantanplan67 »

bonjour
pour répondre à ta question ; je pense tout d'abord que personne n'est à l'aise avec la mort. j'avais moi aussi souvent du mal à répondre à ce genre de question .
Suite à une formation sur l'accompagnement de la personne âgée démente avec étude de cas pratiques sur le terrain je me suis aperçue et j'ai compris que l'affirmation de " vouloir mourir" cachait souvent autre chose.
le plus important est d'abord l'écoute puis la reformulation
" qu'est ce que c'est mourir pour vous "
souvent on se rend compte que la personne exprime une souffrance et non pas une réelle envie d'en finir ( souffrance de perdre son autonomie, d'être une charge pour les proches et les soignants , la solitude etc..)
la reformulation et l'empathie permettent à la personne d'exprimer son mal- être et d'évacuer les tensions.
notre communication est faite de mots qui n'ont pas toujours la même signification où symbolique pour tout le monde.
chaque personne a son ressenti, ses valeurs et son propre vécu d'où l'importance de l'écoute et de la communication verbale et non verbale.
je te conseille vraiment la reformulation et l'écoute
maricafro
Messages : 9
Inscription : 20 oct. 2013 22:15

reformulation

Message par maricafro »

Merci pour les réponses. Je me suis essayé à la technique de la reformulation, ce qui est plus dur que l'on pourrait croire au premier abord....encore un vide dans la formation :roll: . J'ai la chance de pouvoir assister aux entretiens avec le psychiatre, ce qui me permet d'observer ses techniques pour "rebondir" sur les propos du patient. C'est très enrichissant. Maintenant il me faut pratiquer, encore et encore pour être à l'aise avec cette technique de communication. :D
brrruno
Accro
Accro
Messages : 903
Inscription : 03 juin 2013 22:58

Re: quand le patient femande a mourir

Message par brrruno »

Il existe des formations spécifiques aux entretiens, sinon tu peux aussi voir avec le psychologue du service si c'est possible d'avoir des eclairages ?
brrruno
Accro
Accro
Messages : 903
Inscription : 03 juin 2013 22:58

Re: quand le patient femande a mourir

Message par brrruno »

Il existe des formations spécifiques aux entretiens, sinon tu peux aussi voir avec le psychologue du service si c'est possible d'avoir des eclairages ?
maricafro
Messages : 9
Inscription : 20 oct. 2013 22:15

Re: quand le patient femande a mourir

Message par maricafro »

Alors oui Bruno il y a bien des formations spécifiques ...mais pour y accéder c'est le parcours du combattant. Je me démène avec ma cadre pour bénéficier de la formation générale sur les soins en psychiatrie et c'est pas gagné... les propos avancés changent en fonction de l'interlocuteur. Un coup c'est faute de moyen , un autre, c'est mon statut de contractuel qui pêche..bref je suis inscrite et j'espère pouvoir un jour prochain intégrer la système de formation (c'est ce qui a motivé en grande partie mon choix pour le public donc je m'accroche ;-)
Pour le moment je fait avec mes connaissances, mes lectures, le savoir de mes collègues, votre aide a tous sur le forum. J'ai eu l'occasion de participer dernièrement a une réunion de régulation qui se fait avec un psychologue extérieur à l'hôpital. Ce temps est consacré a l'étude d'un cas clinique qui NOUS pose problème. C'est intéressant dans le sens ou on nous permet de nous exprimer librement et ou on décortique nos problématiques avec quelqu'un d'extérieur. Malheureusement, faute de budget, ces réunions prennent fins dés janvier 2014. Je trouve ça dommage car même mes collègues expérimentées y trouvent une aide précieuse dans leur pratique.

La réalité du terrain n'est pas facile a digéré tout les jours mais je suis heureuse de voir que je pars toujours travailler avec plaisir. Je reviendrais sûrement vous solliciter pour avoir vos conseils . A très bientôt donc :D
brrruno
Accro
Accro
Messages : 903
Inscription : 03 juin 2013 22:58

Re: quand le patient femande a mourir

Message par brrruno »

Effectivement les demandes de formations sont un peu partout sur le mode du parcours du combattant (peut être un peu moins quand tu as la chance de travailler dans un hôpital spécialisé en psychiatrie), parfois tu en aura de ta poche mais il ne faut pas laisser tomber pour autant et revenir quitte à "harceler" tes cadres.
Certains hôpitaux mettent en place un système de tutorat, c'est loin de remplacer la formation mais ca peut aussi te permettre d'avoir un échange avec un professionnel d'expérience qui apporte un regard extérieur (car il faut que ce soit un professionnel d'une autre unité), comme une régulation individuel.
Pour ce qui est des supports écrit vois avec la bibliothèque de ton hôpital tu peux aussi disposer d'abonnement spécifique type cairn info ou EMC consult.
Concernant les lectures tu peux te diriger vers les écrits de Carl ROGERS, de Jacques HOCHMANN (une histoire de l’empathie) ou dans un autre registre Eric FIAT : http://www.youtube.com/watch?v=1EpCFlDIdoA
Répondre