LES LIVRES DU MOIS

Des premiers cris au grand âge

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Publié le 30/01/2025

Des grands prématurés aux personnes en fin de vie, nos livres du mois concernent aussi toute l’existence de celles que la médecine a longtemps mal traitées : les femmes.

Les négligéesLes négligées, de Solenne Le Hen et Marie-Morgane Le Moël (Harper Collins)

Avec cette enquête sur le business de la santé des femmes, on découvre pourquoi et comment elles ont été les grandes négligées de la médecine. Et tendent à le demeurer, malgré une forte demande.

« On est au Moyen-Age de la médecine de la femme, et ce retard s’explique par le fait qu’il s’agit de maladies de femmes, pour une médecine très longtemps faite par des hommes ». Le constat est fait un médecin spécialisé dans les embolisations utérines. Mal typiquement féminin s’il en est, tout comme l’endométriose ou les varices pelviennes, également traitées par ce praticien qui note que l’on commence tout juste à écouter les patientes victimes de ces troubles longtemps niés. Il est l’un des nombreux interlocuteurs de Solenne Le Hen et Marie-Morgane Le Moël lors de leur enquête sur la santé des femmes. Ces négligées d’une médecine qui les a longtemps ignorées, en premier lieu dans les essais cliniques des médicaments d’où elles étaient exclues, notamment pour des considérations hormonales. Les médicaments ne prenaient ainsi pas en compte leurs spécificités, et n’étaient donc pas adaptés aux femmes qui se retrouvaient davantage victimes d’effets secondaires. Un problème qui demeure, bien qu’elles soient de plus en plus intégrées dans les essais cliniques depuis une trentaine d’années.

Sortir du Moyen-Age de la médecine de la femme

Si l’enquête des deux journalistes rappelle que le XXIe siècle a certes changé la donne et permis de véritables avancées dans la prise en considération de la femme par la médecine, elle montre aussi le chemin qui reste à parcourir. Pour mieux prendre en considération ces maladies de femmes, et mieux comprendre pourquoi celles-ci sont les plus touchées par des pathologies telles qu’Alzheimer, les maladies auto-immunes, mais aussi cardiovasculaires, même si l’on pense communément que ces dernières sont d’abord un problème d’homme. Il y a encore beaucoup à faire, mais le marché n’a pas attendu pour répondre à la demande des femmes. Des applis dédiées aux règles qui revendent les données personnelles des utilisatrices au business de la ménopause en passant les centres de soins proposant des services tout sauf validés par la science, une santé plus financiarisée que médicale a pallié un manque qui se manifeste avant tout en termes de recherche. L’enjeu est donc aujourd’hui de mieux financer cette dernière pour vraiment sortir du Moyen-Age de la médecine de la femme.

Et aussiPremiers cris

NÉONATOLOGIE

Premiers cris, de Clémentine Goldszal (Seuil) 

Mère d’un grand prématuré, Clémentine Goldszal a voulu, trois après la naissance de son fils, saisir ce que ces nouveaux nés particuliers ont à nous dire. Son enfant n’ayant évidemment aucun souvenir de sa venue au monde dans un service de néonatologie, la journaliste est partie pour un reportage de six mois dans celui de l’hôpital Necker. Autant de temps passé auprès de cas extrêmes, flirtant souvent avec la mort à peine vivants, mais entourés de professionnels très affutés qui s’emploient à prendre soin de ces petits corps si fragiles. Une aventure humaine où infirmières, médecins, psychologues, représentants du culte mais aussi agents d’entretien font tous cause commune avec les parents dont la progéniture commence par se retrouver très fragilement attachée à l’existence. Des bébés toujours au centre du récit, qui ne parlent pas mais transmettent leur expérience et nous font finalement appréhender, malgré leur particularité, ce que nous avons tous du vivre à la naissance.

VIEILLISSEMENTLes lieux des personnes âgées

Les lieux de vie des personnes âgées, coordonné par Walter Hesbeen (Seli Arslan) 

Comment contribuer au bien-être des personnes âgées ? Telle est la question que pose ce livre collectif coordonné par l’infirmier et docteur en santé publique Walter Hesbeen. Il concerne plus particulièrement les lieux de vie envisageables pour ces ainés appelés à perdre en autonomie. L’objectif est notamment d’aider à l’anticiper en faisant du choix de ce lieu un projet de vie, adapté aux aspirations et aux possibilités de l’individu. L’habitat doit être naturellement être pensé comme une composante du prendre soin, sans négliger le sentiment du « chez-soi » dans ce qui sera fréquemment un établissement spécialisé. Des nombreux professionnels du grand âge se penchent au fil des pages sur les conditions du bien vivre qui passent par une aide pouvant aussi s’effectuer à domicile. L’important est d’œuvrer à respecter les volontés de ces personnes âgées, en intégrant l’aspect intergénérationnel et en anticipant la fin de vie. Finalement, ce livre invite « à repenser l’approche du vieillissement pour que le projet de vie puisse rester un projet d’envie ». Sans oublier que chaque existence s’avère singulière.
 


Source : infirmiers.com