RÉACTION

La validation du décret sur les mesures transitoires acte un "démantèlement" de la spécialité IBODE

Publié le 06/11/2025

Le Collectif Interblocs réagit à la validation par le Conseil d'État du décret sur les mesures transitoires, dispositif à destination des infirmiers exerçant en bloc opératoire sans disposer du diplôme d'infirmier de bloc. Il acte un « démantèlement » de la spécialité, dénonce-t-il.

Conseil d'Etat, extérieur, bâtiment, grille

Crédit photo : MOURAD ALLILI/SIPA

La décision du Conseil d’État n’est pas une surprise, mais elle plonge toutefois le Collectif Interblocs (CIB) dans une colère noire. Le 4 novembre dernier, l’institution a validé le décret du 23 octobre 2024 relatif au nouveau dispositif des mesures transitoires. En substance, le texte prévoit que, par dérogation, tout infirmier ayant « au moins un an d’exercice en bloc opératoire en équivalent temps plein au cours des trois dernières années » peut accomplir les activités et l’ensemble des actes exclusifs des infirmiers de bloc opératoire (IBODE), à condition d'être titulaire d'une autorisation délivrée par le préfet de région de son lieu d'exercice. Élaboré pour répondre au manque de professionnels et au risque qu’il faisait peser sur le fonctionnement des blocs, le dispositif est dénoncé depuis des mois par les IBODE en particulier, mais aussi par la profession en général. En janvier 2025, le CIB avait saisi le Conseil d’État pour réclamer l’annulation du décret mais n’avait pas vu aboutir sa requête. Pour justifier le rejet de la demande, l'institution avait avancé le nombre de professionnels nécessaires pour faire fonctionner les blocs (23 700 en 2023) contre ceux en exercice (8 796 à fin 2024). 

« Par ce texte, la compétence exclusive définie en 2015 est vidée de sa substance et la spécialité IBODE est dégradée de manière assumée, non pas par nécessité scientifique ou sanitaire, mais par pur confort organisationnel », réagit le Collectif dans un communiqué.

Un dispositif qui se fait "au détriment de l'expertise"

Prévues pour demeurer en vigueur jusqu’en 2031, les mesures transitoires n’ont de transitoires que le nom, dénonce-t-il, y voyant bien plutôt un « démantèlement » de la spécialité. « Dix années de dérogations successives, toujours dans le même sens, toujours au détriment de l’expertise », écrit-il, et pour répondre uniquement à des enjeux organisationnels : occuper les blocs opératoires, en sacrifiant la compétence. Cette dévalorisation du diplôme passe notamment par la mise en place d’une formation uniquement théorique à destination de ceux qui peuvent prétendre au dispositif et qui fait donc l’impasse sur les gestes pratiques. « On voudrait nous faire croire que quelques heures d’information en e-learning, réalisées par les écoles IBODE, équivalent à deux années de formation universitaire et pratique », tacle le CIB.

L’application de ces mesures transitoires s’inscrit dans un contexte où se heurtent les aspirations avancées par la tutelle et la réalité des pratiques. En 2022, les IBODE ont ainsi obtenu l’universitarisation de leur formation, désormais sanctionnée par un diplôme de niveau Master ; et l’Article 2 de la nouvelle loi infirmière, définitivement adoptée en mai dernier, ouvre la voie à la reconnaissance en pratique avancée de leur spécialité, au même titre que celles d’infirmier anesthésiste et de puériculture. Deux évolutions que le dispositif des mesures transitoires vient court-circuiter en offrant une voie de traverse aux infirmiers qui exercent en bloc sans être spécialisés… et qui, face à des financements employeurs qui par ailleurs se raréfient, préfèreront les mobiliser plutôt que de suivre la formation IBODE. Un peu plus tôt dans le mois, le CIB alertait ainsi sur des taux de remplissage en formation qui, dans certaines écoles, atteignent difficilement les 50%.

La Rédaction d'Infirmiers.com

Source : infirmiers.com