ENQUÊTE NATIONALE

Les IPA s'estiment trop mal payés et trop mal reconnus

Publié le 06/03/2025

Une grande consultation nationale menée par l'Union nationale des infirmiers en pratique avancée (UNIPA) auprès des Infirmiers en pratique avancée révèle «une insatisfaction générale» des IPA concernant à la fois leur rémunération et leur reconnaissance.

hôpital infirmière

Crédit photo : ADIL BENAYACHE/SIPA

Que pensent les Infirmiers de pratique avancée de leur rémunération ? Pour le savoir, l'Union Nationale des infirmiers en pratique avancée (UNIPA) a mené une grande consultation nationale auprès des IPA afin d'évaluer les différentes rémunérations, tous modes d'exercice confondus. L'enquête compte 1000 répondants, soit 25% des IPA et étudiants.

Les chiffres et l'analyse, qui distinguent les modes d'exercices (salariés, étudiants, libéraux) révèlent avant tout «une insatisfaction générale des IPA concernant leur rémunération et leur reconnaissance». Parmi les points critiques: la difficulté d’intégration et la rémunération en Fonction publique hospitalière, l’absence de grilles adaptées en fonctions publique territoriale et d'État, ainsi que la baisse de revenus en libéral (dont les étudiants considèrent même qu'il s'agit d'un modèle non viable). 

Des avancées législatives "lentes et parsemées d'obstacles" 

L'UNIPA note également «l’inertie administrative et institutionnelle qui freine considérablement le déploiement des IPA» sur le territoire. «Depuis la création du statut en 2018, les avancées législatives ont été lentes et parsemées d’obstacles. Si la loi Rist, visant à assouplir l’accès direct aux IPA, a été adoptée en 2023, elle fait suite à deux tentatives infructueuses d’expérimentation prévues dans le PLFSS 2021 et le PLFSS 2022, et les textes qui en découlent ne sont à ce jour pas encore tous publiés». L'UNIPA tacle également au passage l’Assurance Maladie, où «le blocage persiste. L’accès direct n’a toujours pas été intégré à la convention nationale des infirmiers, empêchant ainsi les IPA de facturer les nouveaux patients». La proposition de loi infirmière, en discussion au Parlement, doit justement intégrer de nouvelles avancées pour les IPA, afin d’assurer la pérennité de la profession.

Les résultats de l'enquête dans la Fonction publique hospitalière (FPH),  (51% des répondants) 

13 % ne sont pas encore intégrés en tant qu'IPA, avec une attente moyenne de 8,3 mois
Pour ceux qui sont intégrés : intégration par concours (45 %) et intégration directe (55 %). Mais pour ceux qui ont été intégrés directement, 55% n’ont pas bénéficié d’une reprise des services publics effectifs, contrairement à ce que prévoit le cadre réglementaire.

Près de 95 % sont insatisfaits de leur rémunération

Seuls 5.5 % sont satisfaits de leur rémunération, avec une augmentation moyenne de 94 € par rapport à leur ancien salaire d’IDE. 27% perdent ou ne gagnent pas d’argent. 
Ils estiment que l’écart salarial entre IDE et IPA devrait être de 530 euros.
65 % estiment que leurs compétences sont reconnues, hors considération financière
84 % considèrent améliorer l'accès aux soins. Hiérarchie : 52 % sous cadre supérieur de santé, 30% sous cadre de santé, 14% sous directeur des soins. Près de 50% estiment que le directeur des soins devrait être leur supérieur hiérarchique direct.
33 % n'envisagent pas de rester en FPH, 31% ne se prononcent pas. 25% envisagent une reconversion

Les attentes :

- La refonte des grilles indiciaires avec reconnaissance des compétences et des responsabilités, dans le cadre d’une profession intermédiaire, et en accord les modèles étrangers, avec un salaire de 3000 euros net en début de carrière.

- Le respect des homogénéisations : utilisation de l’intégration directe pour ceux qui y sont éligibles et respect de la notion de reprise des services publics effectifs. 

enquête UNIPA

Dans la Fonction publique territoriale (FPT)

Pas de grille salariale propre, rémunération souvent basée sur la grille IDE avec négociations, variabilité importante. Augmentation salariale moyenne de 134 €. 35 % ne gagnent pas d’argent voire en perdent.
70 % insatisfaits de leur rémunération.

50 % sous hiérarchie de la direction de la structure.
30 % n'envisagent pas de rester, 40 % ne se prononcent pas.

Les attentes :

- La création d’une grille salariale

- Une évolution salariale avec reconnaissance du statut, des compétences et des responsabilités, à travers une revalorisation significative. 

Dans le secteur privé

Pas de grille IPA, impliquant des négociations de salaire, donc une variabilité importante : Augmentation salariale moyenne de 290 euros, médiane à 257 euros. 60% ne sont pas satisfaits de la rémunération.
Ils estiment que l’écart de salaire entre IDE et IPA devrait être de 671 euros.

70% considèrent améliorer l’accès aux soins
23% n’envisagent pas de rester dans le secteur privé, 21% ne se prononcent pas

Les attentes : 

- Une rémunération à la hauteur des responsabilités et du niveau d’études avec un salaire à 3000 euros en début de carrière, intermédiaire entre IDE et médecin.

- Une reconnaissance salariale des diplômes et formations complémentaires

- Une prise en compte de l'ancienneté et de l’expérience (Les professionnels sont souvent pénalisés lors de leur recrutement car leur ancienneté dans leur exercice n’est pas reconnue).

- La création de grille salariale unifiée sur le territoire et de primes spécifiques. 

Dans le secteur libéral

65 % en exercice exclusif, 35 % en mixte
70 % étaient IDEL avant de devenir IPAL.
Perte de chiffre d'affaire moyenne de 29 926 € (Chiffre d'affaire annuel moyen de 47 460 € et Bénéfices Non Commerciaux de 25 536 €). Seuls 5 IPAL ont connu une augmentation de CA vis à vis de leur ancien CA d’IDEL
Aide à l'installation perçue en totalité par 49.2 %, partielle pour 32.3 %
60.3 % jugent le modèle de rémunération actuel inadapté.
76.5 % refusent un paiement à l'acte à 20 €.
59.6 % comptent rester en libéral les 6 prochains mois.

Les attentes 

- L'adaptation et la révision des forfaits en fonction de la réalité et de la spécificité de certaines pratiques (psychiatrie, parcours complexes)

- L'augmentation du nombre de forfaits cotables

- La révision des facturations des parcours ponctuels

- L'introduction de majorations spécifiques pour certains contextes. Paiement à l’acte : permettre la facturation d’actes spécifiques en sus des forfaits, notamment pour des consultations répétées.

- La valorisation des consultations d’éducation thérapeutique, de coordination et de prévention dans les cotations.

- L'amélioration de l’installation : systématiser l’aide installation via les ARS, de manière équivalente aux médecins généralistes. 

enquête UNIPA

Pour les IPA Asalée

Augmentation moyenne salariale de 372 euros, médiane à 500. 42% ne sont pas satisfaits de leur rémunération
Selon eux, l’écart salarial entre IDE et IPA devrait être de 769 euros. Trois d’entre eux étaient auparavant dans le public et ont constaté une augmentation de salaire notable. 60% envisagent de rester chez Asalée. 

Les attentes : 

- Une rémunération à la hauteur des responsabilités avec une demande de mise en conformité des écarts de rémunération entre IDE et IPA pratiqués à l’étranger.

- L'adaptation des rémunérations à toutes les composantes de l’exercice : consultations, visites à domicile, collaborations avec des structures externes

- La création de primes. 

Pour les étudiants en pratique avancée

62% ont un financement employeur, 20% financent personnellement leurs études, 18% ont un financement mixte
Pour ceux qui ont eu un financement ARS, l’aide est en moyenne d’un montant de 45 465 pour l’ensemble des deux années
50% connaissent une perte financière durant leurs études. 60% se destinent à un exercice dans la fonction publique hospitalière, 16% en libéral, 15% dans le privé et 7% dans le milieu associatif. 
25% n’ont pas pris connaissance des rémunérations avant de s’engager dans les études. 67% estiment que la rémunération pourrait leur faire changer leur projet professionnel. 
A leur retour d’étude, ils s’attendent à une augmentation salariale moyenne de 137 euros. Ils estiment qu’une augmentation juste serait de 593 euros en moyenne.

Les attentes :

- Une rémunération en lien avec les responsabilités et le niveau d’études : l’écart de rémunération entre IDE et IPA est jugé très insuffisant. 

- Un changement des modes de rémunération avec une refonte des grilles salariales pour les salariés et un changement de modèle de rémunération en libéral : le forfait trimestriel est jugé insuffisant. Il est proposé de revoir la nomenclature des actes pour rémunérer chaque consultation séparément, y compris les consultations de suivi, afin de mieux rémunérer l’engagement et le temps consacrés à la prise en charge des patients. L’exercice libéral est largement considéré comme non viable.

- Une clarification des conditions d’intégration au retour des études : les répondants se destinant à un exercice au sein de la Fonction publique hospitalière souhaitent que l’intégration directe soit utilisée sur tout le territoire, et appliquée selon la bonne lecture des textes réglementaires

- Une revalorisation de la prime d’installation pour les libéraux

La Rédaction d'Infirmiers.com

Source : infirmiers.com