La stratégie managériale est utilisée dans les organisations hospitalières, particulièrement dans la politique d’implantation, du changement, de la gestion humaine, financière et matérielle. Siegel (2006), l’un des auteurs qui a étudié ce concept, apporte la démonstration que la stratégie est souvent liée à la notion de planification. Il indique dans son article « Réflexion sur la stratégie » que « la planification stratégique peut s’entendre comme une procédure formalisée par laquelle une entreprise détermine les grandes orientations organisationnelles ».
Selon lui, la stratégie trouve son origine dans la nuit des temps et principalement dans le domaine militaire, mais est devenue un outil incontournable au service des organisations publiques et privées. D’autant plus que l’hôpital public est soumis ces dernières années aux contraintes et aux méthodes de management venues de la sphère privée.
La stratégie comme remède à la lourdeur administrative
Domin (2016) dans son article « Le management sans ménagement » aborde aussi cette notion de stratégie. Ces méthodes de management ont pour but de flexibiliser le fonctionnement de l’hôpital, de limiter les lourdeurs administratives et d’impliquer l’ensemble du personnel dans la prise de décision. Cette thèse sur la lourdeur administrative est soutenue par Michel Crozier dans « La bureaucratie : le politiste ». Il dit à ce sujet que : « dans le langage courant, le terme (bureaucratie) sert souvent à dénoncer la lourdeur et la rigidité administratives ». Domin ajoute que le passage des méthodes du secteur privé au secteur public se fait sans ménagement, ce qui oblige à de nouveaux efforts en matière de gestion et organisation hospitalières.
La stratégie managériale doit servir à l’innovation hospitalière dans les domaines de la DRH, de la technologie, de la thérapeutique comme dans la mise en œuvre des nouveaux protocoles.
Il arrive que ces méthodes soient mal comprises, ou moins bien tolérées. C’est pourquoi les organisations en pôles d’activités doivent impérativement s’adapter en favorisant la formation de ses cadres aux nouvelles compétences managériales. La stratégie managériale doit servir à l’innovation hospitalière dans les domaines de la DRH, de la technologie, de la thérapeutique comme dans la mise en œuvre des nouveaux protocoles.
Un ensemble de choix objectifs en économie et en communication
De nombreux auteurs s’accordent à dire que la complexité de l’innovation à l’hôpital peut se résumer sur trois dimensions importantes (Nobre, 2013), à savoir la diversité des activités avec de nombreux métiers et compétences, le système de prise de décision qui doit intégrer les différents acteurs dans le processus décisionnel et les rapports au pouvoir - différentes hiérarchies internes -, le médical et le paramédical.
La « stratégie » veut dire : « la conception de la mise en œuvre d’un ensemble d’actions ordonnées en vue d’atteindre un résultat ultime ». En économie et en communication, elle représente un « ensemble des choix objectifs et des moyens qui orientent à moyen et long terme les activités d’une organisation, d’un groupe » (Gestion fin. 1979, cité par Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales) et contribue à la mise en œuvre du management.
La stratégie se doit d’être dotée d’un discours approprié et simplifié pour faire sens auprès des personnels qui la traduiront en actions.
Un concept polysémique qui doit être promu par un message clair
En gestion, la stratégie peut être définie comme « une modélisation de l’image approximative du futur de l’organisation» (Louart,1991). Comme nous pouvons l’observer, le concept de stratégie est défini de plusieurs manières suivant les auteurs. Nous parlons alors de la stratégie comme un concept polysémique. Cependant, ces définitions ont la même finalité. C’est à dire allouer les ressources, qu’elles soient matérielles, financières ou humaines, de façon pérenne afin d’obtenir les objectifs fixés par l’entreprise. Une analyse du SWOT doit pouvoir être effectuée en amont pour comprendre les forces et les faiblesses, les opportunités et les menaces dans le but d’améliorer la performance de l’entreprise.
La stratégie se doit d’être dotée d’un discours approprié et simplifié pour faire sens auprès des personnels qui la traduiront en actions. Nous ne pouvons pas parler de discours de la stratégie sans parler de la manière dont ce discours sera perçu par les individus qui sont chargés de son application. Il faut pour cela un temps de l’élaboration de la stratégie et un temps de sa mise en œuvre. C’est le temps de la conception du support de la communication, le canal par lequel le message devra passer. En milieu hospitalier public comme dans l’entreprise privée, c’est le rôle du comité de pilotage stratégique.
Quatre formes de discours stratégiques
Sur le plan théorique, nous distinguons quatre formes de discours stratégiques.
Le discours classique
Le premier, le « discours classique », est identifié comme le modèle originel du management stratégique (Mazouli, 2005). La stratégie est élaborée par la sphère dirigeante et est ensuite déclinée pour une mise en œuvre dans l’organisation. Dans le « discours classique », les dirigeants sont considérés comme des acteurs rationnels qui connaissent le mieux les tenants et les aboutissants de l’organisation. Ils disposent de sa vision globale ainsi que celle de son environnement. Le modèle de la « stratégie classique » est, de fait, le modèle du commandement (« commander model », Bourgeois & Brodwin, 1984, cité par Mazouli, 2005) et donc du pilotage. Les objectifs retenus par le comité de pilotage, par les décideurs, vont être transmis et réalisés sur les terrains par les équipes.
Le modèle contingent
Le deuxième modèle est celui de la contingence (modèle contingent) (Woodward et al. 1958, cité par Mazouli). Le «modèle contingent» prend en compte les contraintes environnementales qui doivent dicter le choix des moyens de l’organisation. C’est l’adaptation de l’organisation à l’environnement par le truchement de la « stratégie ».
Le modèle socio-politique
Le troisième modèle est le « modèle socio-politique ». Ce modèle reconnaît l’importance des groupes au sein de l’organisation, principalement au niveau des processus de décisions. Dans ce modèle, c’est l’organisation qui décide. Elle poursuit les objectifs qui lui sont propres qui résultent des fruits des négociations entre les individus du même groupe, généralement au profit des « plus puissants ».
Le modèle socio-cognitif
Le quatrième modèle est le « modèle socio-cognitif », qui met ainsi l’individu au centre du dispositif de formation de la stratégie. La stratégie est alors envisagée comme une interprétation de l’individu. Selon la conception interprétative (Weick, 1979, cité par Mazouli) tout se passe à l’intérieur de l’esprit humain. La réalité n’existe pas. C’est seulement une interprétation de l’environnement dont les éléments sont formés et structurés par des structures cognitives.
Dans le système hospitalier, l'usage des modèles « classique » et « contingent »
Dans le système hospitalier, le « modèle classique » et le « modèle contingent » semblent être les plus utilisés en fonction des situations. Le « modèle classique » peut être conçu comme faisant partie des prérogatives de la direction alors que le « modèle contingent » appartiendrait et s’appliquerait bien à l’encadrement dans le cadre du management des organisations. Cette classification permet de se rendre compte des approches très variées de la stratégie et des limites dans le rôle que les individus peuvent jouer au sein du processus stratégique.
En somme, on retiendra que la stratégie est « conçue comme l’ensemble des actions à partir desquelles les gestionnaires définissent une direction pour l’entreprise et la mettent en œuvre au quotidien » (Rouleau, 2010). Il est donc impératif de prendre en compte la motivation des collaborateurs, favoriser leur prise de responsabilité et leur autonomie. C’est en cela que la stratégie représente un outil incontestable du management.