Comment expliquer la stagnation du taux de mortalité infantile en France, et de la chute du pays à la 23ème place au sein de l’Union européenne, telles que mises en évidence par une récente enquête de l’Institut national d’études démographiques (Ined) ? Le Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI) avance dans un communiqué ses propres explications. Outre les facteurs communs à tous les pays – « âge maternel plus élevé, augmentation de l’obésité, du tabagisme ou des naissances prématurées » – l’organisation pointe des causes « spécifiquement françaises », à commencer par le manque de personnel, qui entraîne une désorganisation dans le suivi de la santé périnatale. Avec d’importants trous dans la raquette territoriale.
Un manque de suivi délétère
En premier lieu, il y a « la disparition progressive des maternités de proximité » : 40% des maternités ont disparu au cours des 25 dernières années, avec une concentration des naissances dans les structures plus grandes. De quoi créer des « 'déserts obstétricaux'. Dans certains départements, une femme sur trois accouche à plus de 45 minutes de route d’une maternité », estime le syndicat. S’y ajoutent les politiques de réduction des durées d’hospitalisation après accouchement, qui ne sont pas compensées par un suivi à domicile. « De nombreuses jeunes mères se retrouvent souvent livrées à elles-mêmes après 48 à 72 heures d’hospitalisation. » Enfin, viennent les inégalités socio-territoriales, avec un taux de mortalité qui varie du simple au double entre certains départements français. Dans les départements d’Outre-Mer, notamment, le taux de mortalité infantile varie entre 7,5 et 9,5 pour 1 000 enfants, contre 3,5 pour la France métropolitaine*. « Ruptures de suivi, inégalités territoriales, surcharge des équipes hospitalières : tout converge vers un affaiblissement du lien entre les familles et les professionnels de santé. Or ce lien pourrait être restauré », tacle le SNPI.
Renforcer le rôle des infirmiers, notamment spécialisés
Comment ? En commençant par parier sur les infirmières, et notamment spécialisées en puériculture (IPDE), fait-il valoir. « Elles possèdent une expertise précieuse pour accompagner les familles, repérer les situations à risque, intervenir en prévention. » Et de prendre l’exemple des pays nordiques, parmi les mieux classés d’Europe, où elles assurent la majorité du suivi post-natal à domicile. À l’inverse, en France, les IPDE restent « peu visibles, peu sollicitées, souvent cantonnées à des rôles administratifs ou en crèche. » « Les infirmières généralistes et puéricultrices sont les grandes absentes des politiques périnatales », souligne Thierry Amouroux, porte-parole du SNPI, dans le communiqué. « On continue à sous-exploiter leurs compétences, alors qu’elles pourraient jouer un rôle central dans le parcours des 0-6 ans, notamment dans les zones rurales. » La preuve en est, leur référentiel de formation n’a pas évolué depuis 1983. En juin 2024, une feuille de route issue des Assises de la pédiatrie embarquait justement une réingénierie de leur diplôme, avec une extension à deux ans de formation, au lieu d’un actuellement.
Il propose plusieurs pistes pour renforcer le rôle de ces professionnels du soin dans la santé périnatale : en élargissant le champ d’intervention des puéricultrices pour leur permettre d’assurer un suivi autonomie du nourrisson, en systématisant les visites à domiciles après la naissance grâce, entre autres, à la création d’unités mobiles, en renforçant les effectifs en service de protection maternelle et infantile (PMI), en réintégrant de la pédiatrie dans la formation socle infirmière ou encore en mettant en place des consultations infirmières de suivi à domicile à « J+3, J+10 et J+30 après la naissance, notamment pour détecter précocement d’éventuels problèmes (jaunisse, déshydratation, difficultés alimentaires, dépression post-partum). » « Le ministère de la Santé a annoncé la création d’une mission parlementaire sur la mortalité infantile. Mais sans remise à plat du parcours périnatal, sans reconnaissance pleine et entière des compétences infirmières, sans politique territoriale ambitieuse, peu de choses changeront », prévient le SNPI, qui rappelle que les 1 500 premiers jours de vie d’un enfant sont décisifs dans son développement.
*Selon les dernières données de l’Institut national de la statistique et des études économiques.
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