ÉTUDES INFIRMIÈRES

« Non à une quatrième année de formation en IFSI ! »

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Publié le 01/09/2025

La réforme des études en sciences infirmières est annoncée par le gouvernement pour septembre 2026. En attendant, syndicats infimiers et organisations étudiantes expriment leurs attentes et avancent leurs propositions. Ilona Denis, présidente de la Fédération nationale des étudiantes et étudiants en sciences infirmières (FNESI), invitée sur le plateau TV d'Infirmiers.com, s'exprime sur le sujet et marque ses positions*.

Etudiants en IFSI

Crédit photo : APHP-PSL-GARO/PHANIE

La refonte de la formation initiale infirmière est prévue pour septembre 2026 ? Quelles sont vos principales attentes et vos positionnements ?

Dans le cadre de la réforme, ce que nous attendons, c'est un réel pas vers l'universitarisation. Mais une universitarisation qui soit adaptée aux besoins des étudiants. C'est-à-dire qu'on ne nous parle pas de capsules vidéo qui datent d'il y a dix ans ou de visios avec des professeurs qui sont éloignés des universités.
On veut une réelle universitarisation de la formation, que l'université vienne vers les étudiants et qu'ils aient accès à ses services, notamment le service de santé étudiante qui est gratuit. Il est donc essentiel que les étudiants infirmiers soient sensibilisés sur le sujet, qu'ils aient une réelle lisibilité sur les aides auxquelles ils ont accès et sur tout ce que l'université peut apporter sur le plan pédagogique en termes d'innovation, mais également en termes de recherche. Aujourd'hui, le mémoire de troisième année est mal vécu par les étudiants, et c'est un réel souhait de pouvoir réaliser un mémoire en lien avec les enseignements universitaires, parce que le développement de la recherche, c'est l'émancipation de la profession et des sciences infirmières.

Dans le contenu de la formation, qu'est-ce qu'il y aurait précisément à changer ? 

Il faudrait réorganiser les enseignements au sein de la formation parce qu'aujourd'hui on a des doublons. Parfois, entre deux unités d'enseignement différentes, ce sont les mêmes cours. Il faudrait également pouvoir mieux optimiser les temps d'enseignement en ajoutant notamment des travaux dirigés, de la simulation... Pouvoir prendre le temps.
On dit souvent "jamais la première fois sur un patient". Aujourd'hui, malheureusement, ce n'est pas vrai. Donc il est essentiel de pouvoir entraîner les étudiants à la simulation. A la fois sur le plan technique, mais aussi et surtout relationnel. C'est également un enjeu.
Par ailleurs, on a énormément d'heures de présentation d'unités d'enseignement qui pourraient être utilisées à autre chose en prenant en compte le temps de travail personnel de l'étudiant dans la formation. Aujourd'hui, cela représente quelque 900 heures.

En l'état des choses, quelle est votre position sur la quatrième année de formation ? 

Nous sommes fermement opposés à la proposition d'une quatrième année de formation. Déjà pour contextualiser aussi, parce qu'il peut y avoir des mécompréhensions sur le sujet. Aujourd'hui le temps total de la formation est de 4200 heures. Suite à une directive européenne qui date de 2013, la formation doit passer en 4600 heures et c'est inscrit dans le cadre de la réforme. En théorie cela suggère une augmentation du temps de formation de 400 heures.
Mais en pratique, si on compte le temps de travail personnel, on est à 5100 heures. Donc passer de 5100 heures à 4600, c'est déjà moins que ce que les étudiants infirmiers font déjà. Et dans ces 400 heures en plus, il faudra compter 200 heures d'enseignement théorique. Ce qui induira du temps de travail personnel supplémentaire. Donc c'est une fausse représentation de croire que l'on ajoute du temps de formation. Ce sera simplement réorganisé au sein des trois années de formation.

Il n'est pas envisageable de forcer les étudiants à faire une année de plus dans les conditions actuelles, notamment de souffrance mentale pour beaucoup, et sur la période de stage tout particulièrement.

Dans ce contexte, il n'est pas envisageable de forcer les étudiants à faire une année de plus dans les conditions dans lesquelles ils sont actuellement, notamment de souffrance mentale pour beaucoup, et sur la période de stage tout particulièrement.
Par ailleurs, il y a beaucoup d'étudiants en situation de précarité immense, qui ne peuvent pas s'alimenter tous les jours. C'est inenvisageable de les forcer à financer une année d'étude supplémentaire. À cela s'ajoute la situation d'un système de santé en souffrance qui ne peut pas se permettre de mettre quatre ans à former un infirmier. Aujourd'hui, c'est aussi la force de la profession de former un nouvel infirmier en trois ans.

Une quatrième année d'études serait un recul immense

Plus largement, une quatrième année d'études serait un recul immense dans l'universitarisation de notre formation et dans tout ce que l'on demande et que l'on attend. Le fait d'ajouter une année qui n'aurait aucune équivalence universitaire, qui n'aurait aucune valeur, irait complètement à l'encontre de l'ensemble des annonces et des dernières avancées de la profession. Et imaginez les conséquences qui en découlent pour toutes les spécialités, toutes les formations de second cycle (IBODE, IADE, IPDE, IPA...) qui ne pourraient pas s'adapter sur une formation socle en quatre ans.

*Propos recueillis et tournage réalisé lors du Salon Infirmier, le 27 mars 2025

Betty Mamane, directrice de la rédaction

Source : infirmiers.com