Les députés de la commission des Affaires sociales ont adopté, à l'unanimité ce mercredi 5 mars, la proposition de loi sur la profession d'infirmier, portée par Nicole Dubré-Chirat (députée Renaissance du Maine-et-Loire), et son président Frédéric Valletoux (Horizons), co-auteur du texte, dans un large consensus.
L'article 1 du projet de loi porte deux « notions centrales », précise l'exposé des motifs : celle de la consultation infirmière, en lien direct avec le diagnostic posé par l’infirmier, et celle de la prescription réalisée par l’infirmier, en reconnaissant à ce dernier la possibilité de prescrire des produits de santé et des examens médicaux dont la liste précise sera déterminée par arrêté ministériel. L’article 2 entend, lui, faire évoluer la pratique avancée, en proposant trois lieux d’exercice supplémentaires au sein des services de protection maternelle et infantile (PMI), de santé scolaire et d’aide sociale à l’enfance. Par ailleurs, cet article offre la possibilité à certains infirmiers spécialisés (les infirmiers anesthésistes, de bloc opératoire et puériculteurs) désireux d’évoluer professionnellement d’exercer en pratique avancée, sans modifier leurs conditions de diplomation.
Série d'amendements
Plusieurs amendements ont été apportés autour de la clarification du rôle propre de l'infirmier, lequel «est clairement distinct du rôle du médecin» et alors que l'IDE travaille «en complémentarité avec les autres professionnels de santé», dans le contexte d'une inquiétude exprimée surtout par le corps médical. «En consacrant la reconnaissance des missions des infirmiers, la présente proposition de loi ne vise pas à empiéter sur les compétences d'autres professionnels, mais à permettre aux infirmiers de répondre aux besoins de santé qui se manifestent dans les territoires, dans le respect des compétences de chacun», peut-on ainsi lire dans l'exposé de l'un des amendements adoptés, précision par ailleurs martelée à plusieurs reprises lors de l'examen de la proposition de loi par la rapporteure du texte, Mme Dubré-Chirat, pour rassurer et éviter toute ambiguïté.
L'une des clarifications réclamées par l’Ordre préconisait d’inscrire « explicitement » la consultation infirmière dans cette loi comme relevant du rôle propre, afin de faciliter l’accès direct aux infirmiers. Dans cet esprit, l'un des amendements adoptés, présenté par M. Isaac-Sibille, député (Modem) du Rhône et travaillé avec 4 organisations et syndicats infirmiers, dont le CEFIEC (comité d’entente des formations infirmières et cadres) et le SNIBO (syndicat national des infirmiers de bloc opératoire), vise «à exclure de l’exercice illégal de la médecine les soins relevant du rôle propre infirmier, qui par nature ne relèvent pas du champ médical et qui ne nécessitent donc pas d’être visés dans l’article L4161-1 du code de la santé publique», de façon, la encore, à éviter toute confusion (...). En clair, cette nouvelle formulation renforce la consultation infirmière dans le cadre du rôle propre infirmier. «C’est en vertu de ce rôle propre [que l'IDE] peut être conduit à proposer des consultations infirmières, dont il conviendra de préciser le périmètre, mais qui pourraient inclure, par exemple, le traitement des plaies simples», peut-on lire dans un autre amendement présenté cette fois par la rapporteure du texte.
Expérimentation autour de l'accès direct
Le médecin et députée (Loiret) Stéphanie Rist, à l'origine de la promulgation de la loi sur l'accès direct donné aux IPA en mai 2023, a également fait passer un amendement qui vise à «expérimenter la possibilité de l'accès direct aux infirmiers dans le cadre de ses missions socles et en particulier de la consultation infirmière prévue à l'article 1er de cette proposition de loi». Ainsi «l'Etat peut autoriser les infirmiers à prendre en charge directement les patients pour une durée de trois ans et dans cinq départements», dans certains établissements de santé ou certaines structures pluri-professionnelles - alors que la consultation infirmière ne peut aujourd'hui être réalisée qu'après prescription médicale. Le principe de ces «consultations infirmières autonomes» existent «depuis longtemps chez certains de nos voisins européens», au Royaume-Uni, en Belgique, en Suède ou en Finlande, souligne encore le texte.
L'un des amendements prévoit enfin de faire le bilan des 5 mentions qui ont été crées pour le diplôme d’Infirmier de Pratique Avancée (pathologies chroniques stabilisées ; oncologie et hémato-oncologie ; maladie rénale chronique, dialyse, transplantation rénale ; psychiatrie et santé mentale ; médecine d’urgence). «7 ans après la mise en place des IPA, il semble indispensable d’évaluer les mentions du diplôme, pour garantir qu’elles soient bien en adéquation avec les besoins des patients et avec le positionnement souhaité par le législateur», peut-on lire.
Ne pas altérer la portée du texte ni en retarder l'adoption définitive
«Le texte représente une avancée essentielle pour la profession, des ajouts inappropriés risquent d’en altérer la portée et d’en retarder l’adoption», a prévenu le Sniil dans un communiqué, alors que le projet sera débattu en séance publique à l'Assemblée Nationale le 10 mars prochain - et que d'autres amendements pourraient venir encore bouleverser le texte final.
A l'image de Nicole Dubré-Chirat, qui avait appelé les députés à ne pas l'alourdir, «le Sniil maintient sa position : éviter toute dispersion qui compromettrait l’aboutissement de cette loi dans un contexte politique instable. Nous appelons donc les parlementaires à la vigilance et à la responsabilité : cette loi ne doit pas être dénaturée par des amendements qui en détourneraient l’objectif premier».
Consulter ici l'ensemble des amendements adoptés en Commission des Affaires sociale, le 5 mars.
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