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Le podcast qui donne la parole aux infirmiers

Chaque mois, découvrez un nouveau podcast sur l’actualité de la profession infirmière... vue par les infirmier.es !

09/05/2025 - 
podcast micro InfiVox

Alors que les débats autour de la suppression de l'Aide Médicale d'Etat (AME) secouent le Sénat, à la permanence d'accès au soins de santé de l'Hôtel-Dieu à Paris, les patients viennent chercher une écoute, et du soin. «J'ai fait ce métier pour aider les gens». Nathalie Dumont aime avant tout l'échange avec ses patients : «c'est toujours très très fort», confie-t-elle. «Ce sont des patients démunis et, même si c'est un peu commun de dire ça, ici je me sens vraiment utile», résume-t-elle. La Pass de l'Hôtel Dieu sur l'Ile de la Cité «dépasse les 15 000 consultations par an», confie Edouard Lefevre, cadre de santé à la Pass. «On est même trois Pass en une», explique-il : «une Pass généraliste avec des soins de médecine générale, une Pass de soins dentaires et une Pass de soins ophtalmologiques».  

Ici, chaque jour, se présentent des gens en grande précarité, qui n'ont aucune couverture sociale. «On reçoit une grande majorité de migrants, selon la situation géopolitique, énormément d'Afghans en ce moment, mais aussi une population de sans-domicile-fixe, étrangers ou Français qui n'ont plus accès aux soins». La prise en charge, financée par l'Agence régionale de Santé, est entièrement gratuite. 

Prises de sang, pansements, mise en place d'une vaccination...

Après un premier bilan systématique avec un médecin, l'infirmier prodigue des soins, prises de sang, pansements, la mise en place d'une vaccination, une éducation thérapeutique pour du diabète... Et cet entretien ne se limite pas toujours à des gestes techniques : parfois les patients se confient, sur leur parcours, leurs difficultés. 

Pass infirmière
Nathalie Dumont est infirmière à la Pass depuis 2020. 

Il faut aussi faire avec le manque de moyens, pas toujours évident à gérer : un box infirmier pour deux professionnels, alors que les gens continuent d'affluer dans la salle d'attente. «Oui on sait s'adapter», sourit Nathalie Dumont. L'infirmière l'assure : elle trouve encore, chaque jour, du plaisir à venir travailler. 

 

Ecoutez cet épisode : 

03/03/2025 - 
podcast micro InfiVox

Adressé par un médecin généraliste, la crèche, ou encore la PMI, l'enfant est d'abord reçu par le psychiatre de l’unité qui demande une évaluation complète sur deux semaines s’il estime les signes d’alerte suffisants. «La première semaine nous permet de connaître l'enfant, de lui faire son bilan cognitif pour connaître son niveau, toutes les observations en salle des symptômes autistiques et la deuxième semaine nous permet d'affiner le diagnostic, de voir l'intensité des symptômes et de prodiguer les conseils pour la maison», explique Lucie Portet, infirmière puéricultrice venue nous accueillir à l'entrée de l'unité 4. Les lieux sont clairs, modernes, avec plusieurs petites salles pour permettre aux professionnels de travailler tour à tour auprès des enfants. Car l'infirmière travaille main dans la main avec l’équipe pluriprofessionnelle de l’unité, et notamment des médecins, des psychologues, des psychomotriciens, des orthophonistes ou encore une éducatrice spécialisée, pour parvenir au diagnostic de ces enfants de 3 à 5 ans, venus de l’Est parisien et du 93.

ECOUTEZ NOTRE REPORTAGE AU SEIN DE L'UNITE 4 

Aujourd'hui on parle du trouble du spectre de l'autisme : les gens qui en sont atteints partagent certains critères diagnostic, que l'on peut regrouper en trois grandes catégories : les troubles des interactions sociales, les troubles de la communication verbale et non verbale et enfin, les intérêts spécifiques et comportements stéréotypés.

Observation fine 

«L'autisme est un trouble du neurodéveloppement qui a des retentissements fonctionnels dans différents milieux de vie de l'individu», explique le docteur Imane Khireddine, praticien associé à l'hôpital Robert Debré dans le service de pédopsychiatrie. «Dans les anciennes classifications, on parlait plutôt de trouble envahissant du développement, aujourd'hui on parle du trouble du spectre de l'autisme : les gens qui en sont atteints partagent certains critères diagnostic, que l'on peut regrouper en trois grandes catégories : les troubles des interactions sociales, les troubles de la communication verbale et non verbale et enfin, les intérêts spécifiques et comportements stéréotypés». 

Dessin d'enfant
Dessin d'enfant / Bonhomme

Ce matin-là, trois enfants de 4 ans aux profils très différents sont présents : deux d'entre eux s'expriment et vont à l'école tandis qu'un troisième n'a pas développé de langage et ne va en classe qu'une heure par jour. «Une heure préparée de longue date par la maman», nous explique Lucie Portet, qui fait justement le lien avec les parents. Avec sa collègue éducatrice spécialisée Keïssa Sefiane, pendant une séance de dessin et de coloriage entre deux bilans avec l'orthophoniste, le psychomotricien ou le psychologue, elle observe les enfants de manière très fine. 

Comme des indices qui peu à peu laissent entrevoir un tout, les signes repérés par les professionnels de l'unité viennent construire un diagnostic.

«On regarde s'ils sont déjà capables de rester assis sur une chaise, parce que c'est une compétence qui leur est demandée à cet âge, est-ce qu'ils sont capables de s'investir sur une activité ou pas, pendant combien de temps, est-ce qu'ils sont capables de comprendre et de respecter une consigne, d'interagir entre eux, avec les adultes, si oui comment, on regarde aussi le contact visuel (...) On observe tout ce qui tourne autour de la communication, pour savoir si celle-ci est fonctionnelle ou pas», précise Keïssa Sefiane qui met aussi les enfants à l'épreuve pour les obliger «à faire une demande», par exemple en cachant le feutre qu'ils doivent utiliser. «On a tous en tête les signes qu'on recherche mais on ne les a pas forcément tous au même moment sur les mêmes sujets», explique Lucie Portet. «Un enfant peut présenter plusieurs symptômes et je pourrais avoir repéré une stimulation visuelle de type visée sur une petite voiture, mais je n'aurais peut-être pas entendu le chantonnement que ma collègue va entendre. C'est la pluralité des regards qui fait la richesse de la matière pour le diagnostic». Comme des indices qui peu à peu laissent entrevoir un tout, les signes repérés par les professionnels de l'unité viennent construire un diagnostic. 

Lucie Portet - infirmière puericultrice
Lucie Portet, infirmière puéricultrice à l'unité 4. Hôpital Robert-Debré (AP-HP)

Prendre en charge l'enfant et sa famille 

«Prendre en soin des enfants, c'est forcément s'inscrire dans une triade», explique Lucie Portet, puisque les parents sont complètement associés au diagnostic mais aussi à la prise en charge. Parfois, ces 15 jours sont très courts pour les parents, qui reçoivent beaucoup d'informations, qui ont aussi beaucoup de questions. Sans parler du diagnostic lui-même, qui peut aussi représenter un choc pour la famille. Les réactions sont très variables selon Lucie Portet. «Certains parents sont dans l'acceptation, certains pleurent, d'autres sont dans une sidération». Les professionnels sont là pour les accompagner, pour orienter l'enfant mais également les parents, dans les soins à venir. «Ces deux semaines d'observation et d'évaluation permettent justement de prioriser les prises en charge : certains jeunes patients auront besoin de tout : d'orthophonie, de psychomotricité et de psychoéducation, mais ce temps nous permet d'évaluer l'urgence».

Favoriser l'autonomie de l'enfant

L'équipe recherche l'autonomie de l'enfant afin qu'il ait sa place dans la société, «ce qui passe par le développement de ses compétences de communication, son autonomie, et bien sûr, l'école», précise l'infirmière qui énumère quelques possibilités d'adaptations. On peut ainsi ajouter une aide humaine à l'école ou orienter l'enfant vers une classe adaptée type ULIS (qui permet la scolarisation des enfants en situation de handicap dans le premier et le second degré)... «Ce n'est pas en deux heures de temps qu'on va révolutionner la vie de ces familles», confie Lucie Portet qui considère l'unité comme «le tremplin pour la vie future» de ces enfants qui reviennent pour des consultations tous les trois mois dans l'unité. L'infirmière, qui travaille dans l'unité depuis 2018 apprécie surtout l'aspect médico-social de son exercice. «Oui je ne prépare plus d'antibiotiques, je ne fais plus de perfusion, mais je m'inscris dans une autre dimension de mon métier, très riche, assure-t-elle. Ici, les infirmiers ont vraiment leur place, au même titre que tous les professionnels, pour accompagner l'enfant et sa famille»

Collage d'enfants

 

06/02/2025 - 
podcast micro InfiVox

Avec près de 9300 suicides1 et environ 200 000 tentatives2 par an, les passages à l'acte suicidaires restent un problème de santé publique en France. On sait également aujourd'hui que faire un geste suicidaire est le premier facteur de risque de récidive. Créé à l'origine dans les Haut-de-France en 2015, le dispositif VigilanS, qui couvre aujourd'hui l'ensemble du territoire national, a justement été pensé pour réduire ce risque. Pendant 6 mois après une tentative de suicide, des «VigilanSeurs», des infirmiers et des psychologues, recontactent les patients passés par les urgences pour un acte suicidaire, afin de faire le point, d'évaluer le risque suicidaire et d'apporter une réponse adaptée à chaque cas. Depuis un peu moins d'un an, le dispositif Paris-Seine-Saint-Denis a intégré dans cette veille les enfants, sans limite d'âge. Le plus jeune patient actuellement intégré au dispositif est âgé de 10 ans. 

 

 

 

L'idée, c'est de changer le paradigme : classiquement, quand on ne va pas bien, c'est à nous d'aller à l'hôpital. Cette fois, c'est l'hôpital qui revient vers le patient pour reprendre de ses nouvelles.

«Ce qui a été défini, c'est que l'on rappelle les patients entre 10 et 20 jours après leur tentative de suicide», explique Mehdi Amini, infirmier VigilanSeur pour le dispositif Paris-Seine-Saint-Denis. Dans son bureau, à l'hôpital Sainte-Anne, des box permettent à chaque professionnel de s'isoler pour passer ses appels et ainsi recontacter les patients. «L'idée, c'est de changer le paradigme : classiquement, quand on ne va pas bien, c'est à nous d'aller à l'hôpital. Cette fois, c'est l'hôpital qui revient vers le patient pour reprendre de ses nouvelles. Bien sûr, on va faire une évaluation clinique, mais l'idée c'est de redonner l'espoir que quand on passe par les urgences, ça ne s'arrête pas là et que l'hôpital s'inquiète pour ses patients et revient vers eux», résume-t-il. 

Prendre en charge les enfants, une formation spécifique 

Prendre en charge un enfant ne suppose pas le même type d'entretien. Les Vigilanseurs, tous dotés d'une expérience en santé mentale, ont donc dû se former spécifiquement à la prise en charge des enfants. «Il s'agit surtout d'avoir en tête les repères qu'il ne faut pas oublier d'aborder pendant l'entretien pour ne pas passer à côté de quelque chose qui n'apparaîtrait pas dont un adulte pourrait se plaindre ou l'évoquer. Ce qui n'est pas toujours le cas des enfants. On a donc une façon de procéder un peu différente».  

Lorsqu'il s'agit de mineurs, les parents sont toujours impliqués. «On demande toujours l'autorisation des parents pour faire un entretien avec leur enfant, on ne leur restitue pas l'intégralité de l'entretien parce qu'on ne dit pas tout mais les parents ont quand même besoin de savoir si ça va ou si ça ne va pas et surtout d'avoir les signes qui les autoriseraient à s'inquiéter ou pas». Avec les très jeunes, les problématiques «les plus courantes» sont celles du «harcèlement scolaire, ou d'avoir vécu un épisode un peu compliqué sur les réseaux sociaux, d'avoir été exposé». A cela s'ajoutent «les problèmes intra-familiaux» : des abus, des agressions sexuelles ou encore des conflits. 

Avez-vous eu de nouveau des idées suicidaires ? C'est une question qui peut paraître trop frontale mais que l'on doit poser.

«Bon, et sur le plan du moral, comment tu te sens alors ?, s'enquiert Mehdi auprès d'une jeune fille de 14 ans intégrée au dispositif. / Je ne sais pas si votre collègue vous avait dit mais j'étais retournée aux urgences...D'accord, et tu es repassée aux urgences pourquoi ? Pour qu'ils me fassent des points de sutures... / Pour qu'ils te refassent des points de suture... Bon... Et tu t'es scarifiée c'est ça ? Heu oui / Bon, ça devait être assez important alors, s'il fallait recoudre ? / Oui... un peu comme à chaque fois.../ Et alors qu'est-ce qui s'est passé à ce moment-là alors ? Je ne sais pas trop / Tu te souviens un peu ce que tu as ressenti ou de l'état dans lequel tu étais ? / Non. / Non?  Est-ce que tu avais envie de mourir à ce moment-là ?»

«Avez-vous eu de nouveau des idées suicidaires ? C'est une question qui peut paraître trop frontale mais que l'on doit poser», souligne le VigilanSeur. «La crainte que l'on peut avoir, c'est de susciter ainsi des idées suicidaires mais dans la réalité, ça n'a jamais été vérifié et par ailleurs, d'en parler et d'en parler sans pudeur, sans tabou, ça a plutôt la vertu d'aider quelqu'un à formuler ce qu'il est en train de vivre». 

Les patients n'ont plus le sentiment d'être "lâchés" après une hospitalisation 

Les appels permettent de réaliser un entretien clinique dont l’objectif est avant tout l’évaluation du risque de récidive, des facteurs de vulnérabilité, comme des facteurs protecteurs. Le VigilanSeur cherche également à savoir si des soins ont été mis en place et dans le cas contraire, il peut aider le patient à appeler des professionnels pour prendre des rendez-vous. Enfin, il s'agit plus largement de faire le point sur la situation de la personne (le patient a-t-il des activités, est-il entouré, arrive-t-il à sortir de chez lui...) pour avoir une vision un peu plus globale des choses, indépendamment de la crise.

850 patients sont aujourd'hui intégrés à la veille active de VigilanS Paris-Seine-Saint-Denis, mais depuis 4 ans, plus de 4 200 patients sont rentrés dans le dispositif. Au niveau national, VigilanS peut aujourd'hui se targuer d'être à l'origine d'une baisse de près de 40% des récidives selon la dernière étude de Santé Publique France 3. L'impact est donc très fort. «Sur le terrain, les patients sont à la fois surpris et reconnaissants : ils nous témoignent beaucoup de sentiments positifs par rapport à cette prise en charge», se réjouit Mehdi Amini. «Les patients, une fois passés par les urgences, se sentaient un peu lâchés, avaient du mal à raccrocher un peu les wagons avec les soins». Aujourd'hui ce lien téléphonique permet de leur donner «le sentiment qu'ils ne sont pas lâchés, qu'il y a une équipe quelque part qui peut être joignable - et dans la vie ça aide beaucoup de se sentir en lien avec de l'entourage ou avec une équipe de soin», sourit l'infirmier. 

1 Observatoire national du suicide, Suicide : quels liens avec le travail et le chômage ? Penser la prévention et les systèmes d’information, 4e rapport / juin 2020, P.22
2 Instruction n° DGS/SP4/2019/190 du 10 septembre 2019 relative à la stratégie multimodale de prévention du suicide. Rapport. P.4

Prévention du suicide : VigilanS, un dispositif efficace face au risque de récidives des tentatives de suicide

06/12/2024 - 
podcast micro InfiVox

«Ce que l'on appelle un événement potentiellement traumatique, c'est un événement au cours duquel les personnes vont être confrontées de manière très brutale, très violente, à la réalité de la mort ou ressentir une menace pour leur propre vie ou pour celle des autres quelle que soit la place de ces personnes dans l'événement. Et donc qu'elles soient directement victimes, ou témoins, ou bien acteurs dans l'évènement», résume Marie-Aimée, infirmière à la cellule d'urgence médico-psychologique (CUMP) de Paris depuis 2019. Nous sommes dans les locaux de l'Hôpital Universitaire Necker-Enfant malade (AP-HP), dans les bureaux de la CUMP, rattachée au SAMU de Paris. Face à nous, deux professionnelles de la cellule d'urgence, une infirmière et une cadre de santé, rentrent tout juste d'une intervention, un accident grave sur la voie publique. 

Découvrez notre podcast consacré au travail spécifique d'une cellule d'urgence médico-psychologique

Créé après l'attentat de la station de RER Saint-Michel, en 1995, le dispositif existe aujourd'hui dans chaque département. A Paris, un peu plus de six personnes composent la CUMP (deux psychiatres, des psychologues, des infirmières et une cadre de santé), mais en cas d'événement de grande ampleur, les équipes peuvent compter sur le renfort de volontaires, une centaine de personnes, toutes professionnelles de la santé mentale, ou encore sur celui de volontaires logistiques ou administratifs. La CUMP peut alors rapidement déployer une sorte de mini-hôpital à l'extérieur pour pouvoir accueillir les victimes. 

La cellule peut être déployée pour les incendies, les accidents de la voie publique, les explosions de gaz qui impactent parfois jusqu'à des quartiers entiers, ou encore les passages à l'acte suicidaires par défenestration...

«Les CUMP sont déclenchées sur des événements collectifs. Les plus connus ce sont évidemment les attentats, types d'événements pour lesquels on a été créés», précise Stéphanie, infirmière et cadre de santé à la CUMP de Paris depuis 2018, citant aussi d'autres événements, plus quotidiens, pour lesquels la cellule peut être déployée : «les incendies, les accidents de la voie publique, les explosions de gaz qui impactent parfois jusqu'à des quartiers entiers, ou encore les passages à l'acte suicidaires par défenestration...» 

Les interventions marquantes sont celles où la détresse des victimes est palpable. Quand on arrive sur le terrain et que des enfants sont impliqués, ça ne prend pas la même dimension. 

Soulager la souffrance et limiter le stress post-traumatique 

Sur place, les équipes font en sorte de recevoir les gens à proximité de l'événement, ni trop près ni trop loin, pour que les victimes se sentent en sécurité et qu'elles puissent venir consulter. «Juste après l'événement, la plupart des personnes se trouvent dans un état de stress aigu mais adapté à ce qu'elles ont vécu, avec des comportements qui sont efficaces pour faire face au danger», souligne Stéphanie, «alors que d'autres vont développer un état de stress dépassé avec une sidération importante, de l'agitation, de la fuite panique ou encore des comportements automatisés qui ne sont pas adaptés au contexte». 

Intervenir le plus précocement possible

Les CUMP interviennent le plus précocement possible, et même dans les premières heures après un événement traumatique : «Il est important de pouvoir soulager au mieux la souffrance aigüe que ressentent les victimes et de prévenir le développement de la pathologie de trouble de stress post traumatique liée à l'événement traumatique qu'ils ont subi qui pourrait survenir à distance de l'événement», confie Marie-Aimée. L'intervention rapide de la CUMP permet aussi «une décharge émotionnelle : de donner cette possibilité aux victimes de verbaliser leurs émotions et leur vécu autour de l'événement et de ne pas les laisser sans réponse face à leur détresse».

Repérer les personnes à risque de développer un trouble de stress post-traumatique 

Enfin, la Cump a un rôle de repérage des personnes à risque de développer un trouble de stress post-traumatique. Il s'agit donc de sensibiliser les victimes aux symptômes et aux manifestations possibles et de leur donner des conseils sur quand consulter et quand être orientées», détaille l'infirmière Marie-Aimée. Car le trouble de stress post-traumatique n'apparaît pas dans les 24 ou les 48h qui suivent l'événement traumatique, ce qui peut induire en erreur, ou être déroutant pour les victimes, explique Stéphanie : «On parle de trouble de stress post traumatique au bout d'un mois après avoir vécu l'événement, avec l'apparition éventuelle de troubles de la concentration, de troubles du sommeil, de troubles alimentaires ou encore de type addictif. Il est ainsi important que les personnes puissent faire le lien entre l'apparition de ces troubles et l'événement qu'ils ont vécu». 

Il y a des choses à dire et à ne pas dire, mais le principal est de procurer une présence qui soit contenante et qu'on soit capables d'entendre l'indicible. 

Favoriser une verbalisation de l'événement

Lors de la prise en charge immédiate, généralement dans l'heure qui suit l'événement, les équipes utilisent une technique psychothérapeutique, «le Defusing», encore appelé «déchoquage émotionnel», qui permet aux personnes de «verbaliser leur vécu, leurs émotions, les pensées qu'elles ont eues au moment de l'événement et de reprendre un peu le contrôle face à une situation qui leur échappe», énumère Marie-Aimée. Lors de la prise en charge post-immédiate, quelques jours après l'événement, les personnes se trouvent généralement en état de stress aigu. Cette fois, les équipes utilisent une technique psychothérapeutique, «l'intervention psychothérapeutique post-immédiate», qui consiste à «reprendre l'événement, à ne pas le laisser se figer dans le temps et permettre ainsi une verbalisation des émotions, mais aussi d'évaluer les symptômes des personnes et de les orienter si nécessaire». 

Il y a «des choses à dire et à ne pas dire», selon Stéphanie, la cadre de santé, «le principal est procurer une présence qui soit contenante et qu'on soit capables d'entendre l'indicible». Peut-être le plus difficile pour les équipes de la CUMP selon elle : «Pouvoir entendre ce qu'ils ont à nous dire sans juger, sans vouloir apporter une réponse, sans déculpabiliser à tout prix». 

13/11/2024 - 
podcast micro InfiVox

La nuit du 13 novembre 2015, Théophile Bastide, cadre de santé aux urgences de l’hôpital Lariboisière, à Paris, n’est pas censé travailler. Pourtant, devant les informations qui lui parviennent, il décide rapidement de se rendre à l’hôpital. A son arrivée, autour de 22h30, les premières victimes des attentats ont déjà été prises en charge par les équipes… Une trentaine d’entre elles défileront cette nuit-là à l’hôpital Lariboisière, qui pour des raisons géographiques, fût l’un des premiers à recevoir les blessés. Le grand silence, le calme inhabituel… Théophile Bastide* revient sur cette nuit hors-norme, qui a marqué l’hôpital et dont il a tiré des enseignements…

 

La France frappée en plein cœur

Les attentats du 13 novembre 2015, menés par trois commandos jihadistes, ont fait 130 morts et plus de 350 blessés, à Paris dans la salle de concert du Bataclan et aux terrasses de bars et restaurants, ainsi qu'à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) près du Stade de France.

Plusieurs cérémonies d'hommage aux victimes étaient organisées ce mercredi à Paris en présence notamment de Michel Barnier et de plusieurs membres du gouvernement. Le Premier ministre ainsi que la maire de Paris Anne Hidalgo ont assisté à une cérémonie devant la salle du Bataclan, salle de concert du 11e arrondissement de Paris, où les attaques terroristes ont coûté la vie à 92 personnes. 

Michel Barnier et Anne Hidalgo sont ensuite allés à la rencontre des rescapés de l'attaque et de leurs proches. Plus tôt dans la matinée, Anne Hidalgo avait aussi rendu hommage aux victimes devant le Stade de France à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), devant le bar «Le Carillon» et le restaurant «Le Petit Cambodge», dans le 10e arrondissement de Paris, dont les terrasses avaient été prises pour cibles par les terroristes. «Nous n'oublierons jamais», a écrit de son côté Emmanuel Macron sur X, assurant que le 13-novembre reste «gravé dans nos mémoires en lettres de douleur». Le président a rendu hommage «aux victimes, aux familles, à ceux qui ont tout donné pour préserver la vie».

Le procès historique de ces attentats s'est achevé en juin 2022, au terme de dix mois d'audience. La cour d'assises spéciale de Paris a condamné Salah Abdeslam, le seul membre encore en vie des commandos, à la perpétuité incompressible, la peine la plus lourde du code pénal. Ses 19 coaccusés (six dont cinq présumés morts étaient jugés en leur absence) ont été condamnés à des peines allant de deux ans d'emprisonnement à la perpétuité.

*Théophile Bastide est aujourd'hui formateur auprès des professionnels de santé à l'Institut de Formation des Cadres de Santé - Assistance Publique-Hôpitaux de Paris.

25/09/2024 - 
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Ecoutez cet épisode : 

 

Eric Lotterie, un infirmier en psychiatrie, a eu l'idée (géniale), il y a 5 ans de créer cette radio qui émet en plein cœur de l'hôpital psychiatrique de Niort, dans les Deux-Sèvres. Aux manettes, des patients y parlent musique, cuisine, relaxation, humour... Pas de grille des programmes établie mais une expression libre - bien qu'encadrée, structurée et réfléchie, comme le rappellent Thomas Gerbaud et Charlotte Hill, les deux infirmiers en psychiatrie, spécialisés en musicothérapie qui ont pris la relève d'Eric Lotterie à la direction de l'antenne. Depuis leur petit studio d'enregistrement, ils nous racontent les coulisses de Radio Pinpon.  

Radio Pinpon
Thomas Gerbaud et Charlotte Hill en studio d'enregistrement. 

 

Radio Pinpon : écoutez le direct

14/08/2024 - 
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L’ONG Mehad a ouvert en Ukraine, à Lviv, tout près de la frontière polonaise, un centre qui forme les professionnels de santé aux attaques chimiques, à la gestion des suites d’un bombardement, à la médecine de guerre, ou encore au psychotrauma… 

 

Ecoutez le récit de Francisco Guevara, tout juste rentré d'Ukraine 

 

La simulation clinique, un outil pédagogique de premier plan 

C'est dans ce centre que s'est rendu Francisco Guevara début décembre. Le cadre de santé, formateur en simulation et bénévole depuis 10 ans auprès de Mehad y a effectué une mission de 5 jours pendant laquelle il a formé des infirmiers et des médecins à la médecine de guerre grâce à la simulation clinique. Ces derniers se sont approprié la méthode et vont former à leur tour leurs équipes. Le principe de cet outil pédagogique de premier plan : immerger les soignants dans un scénario très réaliste pour améliorer leurs réflexes et pour leur permettre d’apprendre... en situation.

Stress et réalisme 

Pour leur permettre d'apprendre, Francisco Guevara a élaboré un scénario de «damage control», «maîtrise des dégâts» en français, qui implique le tri des patients dans un contexte de catastrophe. Grâce à la simulation clinique, qui met en jeu des facilitateurs ou des perturbateurs (des comédiens) pour enrichir le scénario ou encore la divulgation d'informations sur l'état d'un patient, en direct, via un micro (un dispositif baptisé «la voix de Dieu» par les équipes), infirmiers et médecins ont été plongés dans une situation très réaliste, stressante, proche de ce qu'ils peuvent être amenés à vivre sur le terrain. Après 10 à 15 minutes de mise en situation, le débriefing permet à chacun de faire le point sur les réflexes et les gestes à améliorer. 

 

Cours Francisco Guevara en Ukraine
Francisco Guevara et le médecin humanitaire Raphaël Pitti auprès des soignants ukrainiens lors de la formation. 

Ça a été étudié : les observateurs apprennent autant que les acteurs dans la séquence de simulation

En Ukraine, les soignants utilisent déjà la simulation, mais ils ont du matériel vétuste (de vieux mannequins, très utilisés) et ont besoin de se former sur le plan de la pédagogie. Ces quelques jours ont en tout cas porté leurs fruits. Récemment, Francisco Guevara a eu des nouvelles de ses élèves ukrainiens : les équipes chargées de travailler sur les attaques chimiques ont décidé d'utiliser la simulation clinique pour leurs prochaines formations. 

Mehad est une ONG française de santé et de solidarité internationale. Elle s’engage et alerte sur l’urgence de bâtir, avec les acteurs locaux, des systèmes de santé durables, garants de développement pérenne en faveur des populations. Mehad assure des missions vitales auprès des populations, en s’appuyant sur un réseau de plus de 1000 professionnels de santé, mobilisés depuis la France et partout dans le monde.

 

 

 

07/06/2024 - 
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Souvent, les enfants placés à l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) vont de placements en placements. Ils perdent leur carnet de santé, leur suivi dentaire se fait mal, tout comme leur suivi vaccinal. Pour améliorer leur prise en charge, des équipes mobiles dédiées ont été créées. Mais la demande, rapidement, a dépassé les seuls enfants placés. Aujourd’hui, ces équipes, 5 à Paris, quelques autres en France, à Nantes ou à Rennes (où existent ce qu'on appelle des UAPED, unités d’accueil hospitalières pour les enfants en danger), sont appelées par tous les services des hôpitaux dans lesquels elles ont été mises en place. 

Mathilde Perdriau est Infirmière Puéricultrice au sein de l'équipe mobile de prévention protection de l’enfance à risque à Hôpital Universitaire Robert-Debré. Elle travaille actuellement en binôme avec un médecin et elle revient sur son travail, à la fois passionnant et extrêmement délicat.

Ecoutez le podcast : 

En France, un enfant meurt en moyenne tous les trois jours des suites de violences familiales, tandis que 6 à 14% d’enfants sont victimes de maltraitance, avec des conséquences dramatiques sur leur avenir et des séquelles parfois très lourdes. 

Dans le bureau de l'équipe mobile, il y a la place pour trois personnes, un médecin, le docteur Tania Ikowsky, une infirmière, Mathilde Perdriau et un assistant social, parti depuis quelques mois. Les deux premières espèrent que le trio sera bientôt reformé et qu'un nouveau professionnel viendra compléter l'équipe. Car le téléphone ne cesse de sonner et qu'il s'agit de répondre à la demande de tout un hôpital...   

Mathilde Perdriau infirmière Hôpital Robert Debré
Mathilde Perdriau devant l'hôpital Robert Debré (AP-HP) à Paris. 

Grande précarité, maltraitance, aide à la parentalité... 

« On accompagne les enfants de zéro à dix-huit ans, à la fois dans des situations de grande précarité, ou des situation de protection de l'enfance donc des cas de maltraitance, de violences, on accompagne aussi des adolescents, des mineurs à la rue », précise Mathilde Perdriau.

« Concrètement, on est appelé par le service, on fait le point sur la situation avec les équipes, on peut ensuite rencontrer les parents et l'enfant, soit ensemble soit séparément, puis, au regard de ce que l'équipe nous a dit et de ce que nous avons perçu de la situation, soit il y a besoin de rédiger un écrit, une information préoccupante, soit l'enfant est vraiment en danger et il y a besoin de rédiger un signalement... pour que les décisions soient prises par un juge. Soit il y a besoin d'accompagnement à la parentalité, et de mettre en place des mesures d'aide éducative, ou des mesures de soutien à domicile. C'est vraiment individualisé, en fonction de chaque situation », résume l'infirmière puéricultrice qui suit « 10 situations par semaine, plus de 45 nouvelles situations par mois» et déjà en un an, a géré «plus de 180 situations » au sein de l'hôpital Robert Debré. 

Il arrive que les décisions prises, toujours en concertation avec l'ensemble des professionnels, soient très difficiles, parfois même traumatiques, voire incompréhensibles pour les parents. 

Ni jugement, ni punition  

Il y a peu, Mathilde Perdriau a pris en charge un jeune adolescent aux urgences, qui présentait des carences et qui racontait ses conditions de vie difficiles. « On a rencontré la maman et la fratrie et on a tout de suite proposé des mesures d'aides à domicile, qu'une infirmière passe, aussi, à la maison, pour l'aider, pour assurer le suivi des soins. On lui a dit les choses en toute transparence et cette maman était demandeuse, elle a très bien compris». 

Les choses ne se passent pas toujours aussi bien, en accord avec la famille. Placement d'un bébé en pouponnière, parfois plusieurs bébés au cours de la même semaine : « il arrive que les décisions prises, toujours en concertation avec l'ensemble des professionnels, soient très difficiles à prendre, parfois même traumatiques, voire incompréhensibles pour les parents», explique Mathilde Perdriau dont l'objectif reste toujours « l'intérêt supérieur de l'enfant ». «On n'est jamais dans une démarche de jugement ou de punition», assure-t-elle et quand c'est possible, l'objectif reste «d'accompagner la famille». 

Il faut prendre du recul, en tant que professionnel(le)s, sur ces situations douloureuses. Une épreuve que Mathilde Perdriau brave chaque jour grâce «à l'expérience, à la communication avec les équipes et à l'amour de son métier», sourit-elle. 

07/05/2024 - 
podcast micro InfiVox

«En priorité, on va essayer d'écarter la notion de danger pour le patient et les personnes qui l'environnent», explique Bastien, infirmier au SAMU psy Paris depuis bientôt un an. «Ensuite, il va s'agir d'évaluer la souffrance du patient, ses besoins, et d'accueillir sa parole. La spécificité du SAMU est d'apporter une réponse au moment de la phase aiguë, dans la phase paroxystique de l'épisode traversé, soit en faisant un travail de régulation, par téléphone, un travail d'évaluation et d'orientation des personnes, un travail d'apaisement, parfois, soit en décidant de partir en intervention sur place». 

Prise en charge de toutes les formes de détresse psychologique 

Le principe du SAMU est de prendre en charge toutes les formes de détresse psychique : crise suicidaire, crise d'angoisse, attaques de panique, épisodes délirants... Au bout du fil, des professionnels de la santé mentale, un infirmier ou un médecin psychiatre, s'efforcent, en discutant avec le patient, d'atténuer la tension émotionnelle dès l'appel, de comprendre ce qui lui arrive pour pouvoir lui proposer une orientation adaptée.

La manifestation des symptômes peut passer par le corps, souligne Barbara, infirmière au Samu Psy Paris depuis sa création, en janvier 2022. Si l'évaluation nécessite d'aller auprès du patient, l'équipe «essaye de se donner les moyens d'intervenir», soit à domicile, soit dans la rue...

Quand un patient compose le 15, il passe d'abord par deux agents de régulation, chargés, dans un premier temps, d'évaluer la dangerosité de la situation. L'urgentiste en place au sein de la régulation tente d'abord d'écarter toute cause organique avant de transférer l'appel vers le SAMU psy en cas de détresse psychologique. Une fois le degré d'urgence écarté, le SAMU psy prend alors le relais et met en place une évaluation du patient et lui propose une intervention et/ou une orientation adaptée.

Pas de journée type 

«L'idée de partir d'une situation aigüe, de détresse, et de voir le patient cheminer vers une issue plus favorable» fait partie de l'un des leviers de motivation de Bastien, confie l'infirmier, qui a sondé l'équipe : «il y a aussi cette impression de faire partie d'un maillage en passant le relais à d'autres acteurs de proximité». Pour Barbara, l'un des arguments essentiels vient du fait que l'exercice n'a rien de routinier. «Il n'y a pas de journée type», mais des journées rythmées par les appels divers des patients en demande d'aide.

06/05/2024 - 
podcast micro InfiVox

«3114 ? Bonjour Madame, je vous écoute. Ça fait combien de temps que vous êtes dans cet état-là ?... Est-ce que vous avez des idées suicidaires en ce moment ? Ecoutez, vous avez très bien fait d'appeler, on va prendre le temps tous les deux de discuter de ce qui vous arrive et puis ensemble on verra de quelle aide vous avez besoin». Florian est l'un des infirmiers-répondants du 3114, numéro d'urgence mis en place en 2021 en France, dans le cadre de la politique nationale de lutte contre le suicide. «Les gens qui nous appellent sont souvent désespérés, isolés», explique le jeune homme, qui travaille auprès du 3114 depuis un an, tout comme sa collègue Gabrielle. «Ils sont en demande d'écoute, pas forcément de soins mais ils ont besoin de parler». Dans cette pièce que les équipes appelle « le call center», les appels sont transférés soit à un infirmier, soit à un psychologue, 24h sur 24 et 7 jours sur 7. Ces professionnels du soin, formés à la prise en charge de la crise suicidaire, et à l'écoute, passeront le temps qu'il faudra pour «désamorcer la crise», dans un premier temps, puis pour orienter les gens en détresse. 

 

70% des personnes appellent pour elles-mêmes 

Le suicide est responsable de la mort de plus de 9 000 personnes chaque année en France, un chiffre alarmant qui a poussé les pouvoirs publics à réagir. Le dispositif, mis en place en 2021 a ainsi plusieurs intérêts : briser l'isolement grâce à une écoute et une orientation adaptées, mais aussi offrir un espace sans tabou où la santé mentale est déstigmatisée. 

Parmi ceux qui appellent le 3114, confie Gabrielle, on compte «70% de personnes qui appellent pour elles-mêmes, 25% qui s'inquiètent pour quelqu'un et demandent des conseils, des renseignements et savoir quoi faire, et 5% de professionnels». Des hommes, des femmes, des enfants... «Je crois que la personne la plus jeune qu'on ait eue avait 8 ans».

Le lien tissé avec le patient, "filet de sécurité" anti-suicide 

«La première chose qu'on fait, c'est créer du lien avec les gens, souligne Florian, et ça prend du temps. C'est la partie la plus importante de l'entretien puisque c'est pour ça que les gens appellent, et au cours de cet entretien, on en profite pour évaluer le risque suicidaire avec tout un tas de critères et en fonction, de proposer une orientation». Si les infirmiers-répondants insistent sur l'importance cruciale de créer ce lien par téléphone, c'est parce que celui-ci est crucial dans la dissuasion du passage à l'acte. «Comme tout se passe par téléphone, on ne peut pas mettre physiquement en sécurité le patient, et on ne peut compter que sur le lien qu'on créé avec lui. C'est ça notre filet de sécurité : réussir à créer du lien, c'est tout l'enjeu de l'appel, parce que c'est ça qui met en sécurité les gens»

Le travail par téléphone n'en n'est pas moins «très riche, émotionnellement, cliniquement et humainement», assurent les deux infirmiers. «Beaucoup dans notre entourage nous demandent si le contact avec les patients nous manque : de fait, ils ne nous manque pas puisqu'on a des patients - c'est simplement qu'on les a par téléphone», sourient-t-ils. Pour Florian, la proximité est d'ailleurs presque plus grande avec eux que dans un service de soin : «Ils parlent tout près de notre oreille...». 

Le suicide en France, en chiffres 

Selon les derniers chiffres sur le suicide en France, relevés sur l'année 2017 :
- 8 214 décès par suicide ont été enregistrés en France métropolitaine soit un taux global de suicide de 12,6 pour 100 000 habitants. Les remontées des certificats de décès étant imparfaites et en faisant l’hypothèse d’une sous-estimation de 10 %, on compterait après correction 9 035 décès par suicide.
- Le nombre de décès par suicide est nettement plus élevé chez les hommes que chez les femmes, respectivement 6 167 et 2 047. Le taux de décès standardisé par âge révèle la même différence : respectivement 19,6 et 6,1 décès pour 100 000 habitants, soit un taux de suicide 3,2 fois supérieur chez les hommes. 
- 4,7 % des personnes âgées de 18 à 75 ans ont déclaré avoir eu des pensées suicidaires au cours des 12 derniers mois. L’épisode dépressif caractérisé est le facteur le plus fortement associé à la survenue de pensées suicidaires au cours des 12 derniers mois. 
- 7,2 % des personnes de 18-75 ans ont déclaré avoir tenté de se suicider au cours de leur vie, la prévalence étant plus élevée chez les femmes (9,9 %) que chez les hommes (4,4 %). Au sein de cette population, 37,7 % ont déclaré au moins une récidive ce qui justifie le déploiement, en France, d’un dispositif tel que VigilanS de recontact des personnes ayant fait une tentative de suicide.
- Entre 2000 et 2016, le taux de décès par suicide en France a diminué de près de 33,5 %. Cette diminution concernait toutes les classes d’âge à l’exception des 45-54 ans entre 2000 et 2008 et des 95 ans ou plus au cours de la période 2008-2016. Bien qu’elle témoigne du caractère évitable du suicide, cette diminution reste lentement progressive.

Source : 3114. 

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