CONTRIBUTION

Loi infirmière : le Syndicat national des professionnels infirmiers marque sa position

Publié le 23/04/2025

À quelques jours de l'examen de la loi infirmière par le Sénat, le Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI) diffuse sa contribution destinée à sa Commission des affaires sociales. L'occasion d'insister sur la réalité de la profession et sa contribution au système de santé.

infirmiers de dos, couloir, hôpital

Crédit photo : ADIL BENAYACHE/SIPA

Il faut que « la loi rattrape le quotidien ». Tel est le message qu’entend porter le Syndicat national des professionnels infirmiers auprès des sénateurs dans le cadre du futur examen de la proposition de loi infirmière. Celle-ci représente une opportunité « historique » de reconnaitre ce qu’est devenue la profession infirmière au fil du temps : « experte, autonome, structurante pour le parcours de soins », défend-il. Mais encore faut-il qu’elle aille au bout de sa logique. C’est tout l’enjeu de la contribution que le syndicat a soumis à la Commission des affaires sociales du Sénat : faire comprendre que les infirmiers ne sont plus de simples auxiliaires médicaux, mais qu’ils représentent bien une profession à part entière, aux rôles et compétences spécifiques et qu’il convient d’élargir.

Pour une véritable autonomie

« La refonte est pertinente, car il y a un décalage entre ce que nous sommes (des professionnels de santé) et ce qu’une réglementation obsolète nous autorise à faire », souligne le syndicat dans les premières pages de sa contribution. La loi qui définit la profession infirmière date de 1978 ; le décret d’exercice, de 2004. Soit une « éternité » au regard de l’évolution démographique, entre vieillissement de la population et augmentation des maladies chroniques. « L’article de loi de 1978 nous reconnait un "rôle propre", mais ce rôle autonome demeure bridé, ce qui ne nous permet pas de répondre aux besoins de santé de la population, à hauteur de nos compétences, issues de notre niveau de formation. » La refonte doit donc permettre de reconnaître le rôle central des infirmiers dans le système de soin.

La reconnaissance de pratiques existantes

La proposition de loi porte d’ailleurs en elle les germes de l’évolution attendue, avec les mentions de « consultations infirmières » et de « diagnostic infirmier ». Les premières existent en réalité déjà, fait valoir le SNPI : de prévention, de suivi, d’éducation thérapeutique, d’accompagnement aux soins palliatifs, ou spécialisées en santé mentale ou en plaies et cicatrisation. Mais alors qu’elles « offrent une approche centrée sur le patient, favorisant l'éducation et l'autonomisation, tout en soulageant la pression sur le système de santé », leur mise en place dépend encore trop souvent de la volonté des institutions (établissements ou Agences régionales de santé). Le second est inscrit dans la réglementation depuis 1993 mais demeure « mal compris ». Le diagnostic infirmier met en effet l’accent sur « les réponses humaines, les émotions, et les comportements face à une maladie ou une situation de santé ». Il constitue un outil qui permet à l’infirmière de cibler et évaluer son intervention auprès du patient. Il faut donc reconnaître son utilité afin de faciliter la coordination des soins tout en valorisant « l’intelligence clinique de la profession ».

Les nouvelles compétences attendues

Viennent ensuite les nouvelles compétences qu’embarque le texte, à commencer par l’accès direct et la possibilité d’élargir le champ des médicaments et dispositifs médicaux que les infirmiers sont déjà autorisés à prescrire (vaccins du calendrier vaccinal ou contre la grippe saisonnière, traitements nicotiniques de substitution…). Dans sa contribution, le SNPI propose ainsi d’y ajouter l’ensemble des traitements en vente libre, comme le paracétamol. « Aujourd’hui les patients hospitalisés doivent attendre des heures qu’un médecin de garde sur l’ensemble de l’établissement passe le prescrire, après avoir traité les urgences » et sont donc condamnés entretemps à rester douloureux. Une telle possibilité permettrait en outre, en ville, de limiter les hospitalisations évitables et de désengorger les cabinets médicaux, argumente le syndicat.

La notion de « soins relationnels », une notion essentielle

Quant à l’accès direct, il facilite le recours aux soins dans le cas de problèmes de santé courants. Et dans un contexte de désertification médicale, qui frappe plus durement les territoires ruraux, l’accessibilité en premier recours à un infirmier libéral est jugée particulièrement « cruciale », surtout pour les populations les plus vulnérables. Les bénéfices seraient multiples : désengorgement des services d’urgences, orientation des patients vers le bon niveau de prise en charge, maintien de la continuité des soins, et gradation pertinence des soins.

La proposition de loi en débat peut être une rupture. À condition qu’elle ne s’arrête pas à mi-chemin. Car reconnaître les compétences infirmières, ce n’est pas leur faire un cadeau. C’est répondre à une urgence de santé publique.

Enfin, le SNPI insiste sur la nécessité de bien intégrer la notion de « soins relationnels » au cœur des missions des infirmiers. Ceux-ci jouent « un rôle fondamental dans la compréhension des traitements et l’adhésion du patient à son parcours de santé », assure-t-il. Une dimension de plus en plus indispensable, alors que les patients eux-mêmes réclament plus d’humanisation dans la prise en charge. Il rappelle également la pertinence d’allonger la durée de la formation socle, pour la faire passer à 4 années, notamment afin de limiter l’épuisement des étudiants et améliorer leur rétention. Cet allongement permettrait « de renforcer l’enseignement : combler les manques, notamment en psychiatrie, santé mentale, pédiatrie et soins critiques », tout en offrant la possibilité aux étudiants de consolider leurs acquis et de se spécialiser. 

La loi doit répondre à une "urgence de santé publique"

« La proposition de loi en débat peut être une rupture. À condition qu’elle ne s’arrête pas à mi-chemin. Car reconnaître les compétences infirmières, ce n’est pas leur faire un cadeau. C’est répondre à une urgence de santé publique », conclut ainsi le SNPI, qui appelle à redonner du sens à la profession infirmière en reconnaissant son autonomie et ses compétences.

Accéder à la contribution du SNPI

La Rédaction d'Infirmiers.com

Source : infirmiers.com