La « contagion suicidaire » est le nom donné à ce phénomène qui peut pousser certaines personnes exposées au suicide d’un proche à développer et nourrir à son tour des idées de mort, voire envisager elle-même un passage à l’acte. Si ses mécanismes sous-jacents « ne sont pas encore complètement élucidés, l'exposition au suicide, qu’elle soit directe (par exemple, via la perte d'un proche) ou indirecte (par exemple, via les médias et les réseaux sociaux), est souvent la source d'une inquiétude importante pour les membres d’un groupe social », tels que les hôpitaux, entreprises, prisons, écoles, « des corps de métier » comme les médecins, l’armée ou la police, ou encore « dans certaines catégories d’âge ». Et « en moyenne, pour chaque suicide, 135 personnes sont exposées. Parmi elles, entre 6 et 14 appartiennent à l’entourage et peuvent donc être endeuillées et plus fortement impactées. Ceci représente pour la France un total d’environ 100 000 personnes concernées chaque année », indique l’instruction, parue dans le Bulletin officiel « Santé, protection sociale, solidarité » du 30 juin 2025, pour bien souligner les enjeux de la nécessité d’un plan d’action dédié, défini sur 5 ans.
Adressé en premier lieu aux Agences régionales de santé (ARS), le document détaille plusieurs lignes directrices afin de prévenir les différentes formes de cette contagion suicidaire et identifie plusieurs sous-objectifs :
- Réinterroger la pertinence du terme et du concept de « contagion suicidaire » ;
- Établir un état des lieux des ressources existantes ;
- Définir des lignes directrices suffisamment souples pour permettre leur adaptation aux contextes territoriaux et une articulation avec les ressources existantes ;
- Et identifier des acteurs opérationnels qui pourront appuyer les ARS dans le cadre de partenariats formalisés.
Des ressources existent, qu'il faut compléter
Il existe d’ores et déjà un certain nombre de dispositifs destinés à la prévention du suicide : tissu associatif, actions de la Stratégie nationale de prévention du suicide, à l’exemple du service VigilanS, ouvert depuis début 2025 aux enfants et adolescents, mise en place des cellules d’urgences médico-psychologiques (CUMP)… Toutefois, « malgré la qualité des ressources disponibles, trop peu de personnes concernées y ont accès, ce qui contribue à des retards de prise en charge », déplore l’instruction, qui ajoute que le nombre d’acteurs formés spécifiquement à l’accompagnement et au suivi du deuil après un suicide demeure faible et que les inégalités sociales et territoriales pèsent lourdement sur le recours à ces différentes solutions.
Outre un état des lieux de ces ressources et « des milieux de vie et publics cibles à prioriser » et l’élaboration d’une « cartographie des acteurs » intervenant dans la prévention de la contagion suicidaire, le document relève la nécessité de développer des formations sur la postvention individuelle (voir encadré) ainsi que des actions de communication pouvant « contribuer à renforcer les facteurs de protection et à rompre les tabous sur le sujet. » Il invite également à miser sur la recherche afin d’améliorer les connaissances sur le deuil après un suicide. Si le pilotage de ce plan d’action est assuré par les ARS, les structures peuvent également y contribuer à leur niveau. Recourir à un expert pour les aider à élaborer et à s’approprier ce plan, installer une cellule en charge de la coordination de son déploiement ou encore identifier et former les personnels intermédiaires entre la direction et les personnels, pour qu’ils puissent véhiculer l’information font partie des pistes évoquées.
Des mesures visant l'environnement médiatique et son traitement du suicide
Enfin, l’instruction dédie un volet aux impacts du traitement médiatique du suicide, qui peuvent tout aussi bien jouer un rôle de prévention que participer à un glissement vers un passage à l’acte. Elle propose d’améliorer le référencement des ressources certifiées concernant le risque suicidaire, à la fois sur les réseaux sociaux et sur les moteurs de recherche, ainsi que l'identification et le signalement des contenus à risque et de nature à inciter au suicide ou encore de déployer des formations sur les enjeux du numérique auprès des acteurs de la santé mentale, en priorité les professionnels de santé.
Par « postvention », l’instruction désigne ici l’ensemble des actions et interventions (accompagnement psychologique, communications internes et externes) à déployer auprès de ceux qui ont pu fréquenter les lieux de vie d’une personne décédée par suicide ou qui ont été témoins du passage à l’acte.
PRATIQUE AVANCÉE
«On est bien conscients de ce qu'on sait faire ou pas, on ne se prend pas pour des médecins!»
ACTUALISATION DES CONNAISSANCES
Bonnes pratiques ou fakes ? 5 idées reçues expertisées
LOI INFIRMIÈRE
Décret infirmier : les IDEL contre la délégation d’actes aux aides-soignants
LÉGISLATION
Projet de décret infirmier : l’Ordre dénonce un texte "très éloigné" de celui attendu