J’ai obtenu mon diplôme d’infirmière en France., il y a 14 ans. J’ai toujours aimé voyager et découvrir d’autres cultures. Le Canada était un rêve d’enfance, raison pour laquelle j’ai décidé d’y immigrer.
Aujourd’hui, je partage mon parcours pour toutes celles et ceux qui envisagent de suivre cette voie. Alors que le Québec fait face à une pénurie de personnel soignant, de nombreuses infirmières et infirmiers français tentent l’aventure, souvent sans connaître toutes les réalités de l’immigration et de l’intégration dans un nouveau système de santé.

Pourquoi j’ai choisi le Québec ?
Plusieurs raisons m’ont poussée à franchir l’Atlantique : une envie d’aventure, une attirance pour les grands espaces, le besoin de renouveau, mais aussi des conditions salariales plus intéressantes et des perspectives d’évolution professionnelles stimulantes. La francophonie a aussi joué un rôle important, facilitant la transition sur le plan linguistique.
Avant de partir, j’avais une image plutôt idéalisée du Québec : une charge de travail mieux adaptée qu’en France et une qualité de vie supérieure. Si certains de ces éléments se sont vérifiés, d’autres m’ont surprise.
Se préparer à immigrer : les étapes incontournables
Les démarches administratives
La première étape a été de faire reconnaître mon diplôme par l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ). Cela implique une demande d’équivalence, une évaluation de dossier académique, des frais importants et… beaucoup de patience. Le processus peut prendre de 6 à 18 mois.
J’ai opté pour un permis de travail fermé, lié à mon employeur, ce qui facilite l’embauche mais limite la mobilité professionnelle au départ.
L’évaluation académique
Par chance, en tant que francophone, je n’ai pas eu à passer de test linguistique. Cependant, selon l’analyse du dossier, certains infirmiers doivent reprendre des cours ou effectuer des stages de mise à niveau, ce qui peut être un frein logistique et financier.
Quitter sa famille, plonger dans l’inconnu, et changer complètement de cadre est exigeant. Il faut se préparer à un choc culturel professionnel.
La préparation psychologique
Quitter sa famille, plonger dans l’inconnu, et changer complètement de cadre professionnel est exigeant. Il faut aussi se préparer à un choc culturel professionnel : rythme de travail plus intense, heures supplémentaires obligatoires (TSO), relations hiérarchiques différentes avec un rôle de collaboration plus important entre l’infirmier, les pharmaciens et les cheffes d’unité. Cela demande de l’adaptation et de la résilience.
Ce qu’il faut savoir avant de partir
À éviter :
• Sous-estimer les délais administratifs
• Partir sans budget suffisant
• Négliger l’intégration sociale et professionnelle
Conseils pratiques :
• Constituer un dossier complet pour l’OIIQ
• Prendre contact avec des groupes d’infirmiers expatriés (forums, Facebook)
• Réserver un logement temporaire avant l’arrivée
• Se renseigner sur les différences culturelles dans le soin
Travailler comme infirmière au Québec : entre continuité et nouveauté
Les premières semaines
À mon arrivée, j’ai été accueillie par une équipe bienveillante. Mais il a fallu tout réapprendre : les sigles (PAB, CHSLD…), les logiciels, la documentation, les protocoles, et même le vocabulaire du quotidien. Le rôle infirmier y est plus autonome, avec une grande responsabilité clinique dès le début. Par exemple l’infirmier au Québec réalise l’auscultation pulmonaire et abdominale du patient alors qu’en France cette tâche est réservée médecin. Les défis rencontrés
Outre l’adaptation au système québécois, j’ai dû apprivoiser les différences culturelles dans les soins : ici, la relation patient-soignant est plus horizontale, la communication directe, et le consentement très encadré.
La reconnaissance des compétences n’est pas toujours immédiate : certaines tâches que je faisais en Europe m’étaient d’abord interdites, le temps de valider certaines formations ou d’obtenir l’équivalence complète.
Au Québec il y a plusieurs types d’infirmiers: infirmier clinicien, infirmier auxiliaire, infirmier practicien. Les infirmiers française, sont reconnus comme infirmiers cliniciens au Québec.
Les belles surprises
Malgré les défis, j’ai apprécié l’encadrement clinique, j’ai été doublée avec une infirmière pendant 4 mois d’intégration. Les conditions de travail, bien qu’exigeantes, sont compensées par un meilleur ratio patient/infirmier. Lorsque je travaillais en psychiatrie j’avais maximum 9 patients en charge. Le fait de ne jamais être seule sur un service en tant qu’infirmière sur les quarts de jour et de soir est rassurant. Pour les quarts de nuits l’infirmier est avec un préposé (équivalent aide-soignant). Dans certains services il peut y avoir deux infirmiers la nuit.
Bilan : une aventure enrichissante à tous les niveaux
Professionnellement, j’ai élargi mes compétences, découvert un autre rapport au soin, et gagné en autonomie. Humainement, j’ai appris à me réinventer, à faire confiance à mes capacités d’adaptation, et à m’ancrer dans un nouveau territoire.
Aujourd’hui, mes projets évoluent. Je m’oriente aussi vers l’écriture et le journalisme, tout en gardant mon identité d’infirmière. Mon parcours me permet de porter un autre regard sur la santé, la migration et l’engagement.
À celles et ceux qui hésitent encore : n’attendez pas que toutes les conditions soient parfaites pour vous lancer. Préparez-vous, informez-vous, mais surtout : croyez en votre potentiel. Immigrer, ce n’est pas fuir, c’est oser construire autrement.
Checklist pour un infirmier souhaitant immigrer au Québec
✔ Vérifier la reconnaissance du diplôme via l’OIIQ
✔ Anticiper les délais (6 à 18 mois)
✔ Prévoir un budget d’installation d’au moins 6 000–10 000 CAD
✔ Contacter d’autres soignants expatriés pour échanger (groupes Facebook)
✔ Se renseigner sur les formations de transition si demandées
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