SANTÉ DURABLE

48 millions de professionnels de la santé plaident pour abandonner l'usage du plastique

Publié le 08/08/2025

Le Conseil international des infirmières s'associe aux autres signataires issus du monde de la santé d'une lettre appelant à réduire la pollution due aux produits plastiques au sein du secteur, alors que se tient une session exceptionnelle à Genève pour tenter de parvenir à un traité freinant ce fléau.

Equipe de soignants, couloir d'hôpital

Crédit photo : BURGER / PHANIE

« Nous exhortons les délégations à s’engager sur un traité juste et équitable, qui respecte les droits humains, limite la production de plastique, élimine les produits plastiques qui ne sont pas nécessaires, tels que les plastiques à usage unique, priorise la détoxification et garantit la transparence des produits plastiques et des matériaux. » Ainsi débute la lettre ouverte signée par des centaines d’associations du secteur de la santé, dans le Conseil international des infirmières (CII), et adressée aux délégations de 175 pays réunies depuis le 5 juillet à Genève autour de tractations pour parvenir à un traité pour limiter la pollution plastique (voir encadré). En tout, ce sont 48 millions de professionnels de la santé qui sont représentés par ces organisations, qui réclament que le secteur soit bien intégré dans les discussions.

Le secteur de la santé concerné par la pollution due aux produits plastiques

Exempté de l’obligation de lutter contre la pollution plastique dans les précédentes versions du texte, le monde de la santé doit pourtant veiller à limiter son empreinte environnementale, explique en effet la lettre. Car l’augmentation de l’usage du plastique s’observe aussi dans le secteur. « Les plastiques sont devenus omniprésent dans la santé, opérant un tournant dramatique vers des objets plastiques à usage unique au cours des récentes décennies », dont gants, cathéters, outils de transfusion, blouses…« Cependant, nombre d’utilisations non-essentielles de plastique pourraient être éliminées », font valoir les signataires. Or la production de ces plastiques requiert l’usage de produits nocifs pour la santé, qu’ils soient cancérogènes ou qu’ils relèvent des perturbateurs endocriniens, qui peuvent ensuite se répandre dans l’environnement, mettant en péril « les patients, les communautés, les travailleurs (dont ceux qui exercent dans la gestion des déchets) et les écosystèmes. » « L’exposition à des produits chimiques dangereux représente un vrai sujet d’inquiétude pour les patients vulnérables, dont les fœtus, les nouveau-nés et les jeunes enfants. »

Plutôt que de protéger le système de la santé, son exclusion du traité serait donc en réalité « contreproductive », jugent les signataires, qui appellent plutôt l’ensemble des secteurs à réduire leur dépendance aux produits plastiques. « Ne pas y parvenir aurait des conséquences terribles pour la santé » et conduirait « à la perte de ressources naturelles et d’écosystèmes essentiels à la santé aussi bien humaine que non-humaine. » « Le changement climatique est la plus grande menace » qui pèse sur la santé humaine, insiste de son côté le CII dans son propre communiqué. Les conséquences de l’utilisation des plastiques s’observent déjà sur le terrain : problèmes respiratoires et maladies chroniques, auxquels les populations les plus vulnérables sont les plus exposées. « Le secteur de la santé doit être un exemple, non pas une exemption, en promouvant une transition équitable et juste vers des pratiques éco-responsables », défend l’organisation par la voix de son président, le Dr José Luis Cobos Serrano. Et dans ce mouvement, les infirmiers, la profession de santé qui compte les effectifs les plus importants, sont à l’avant-garde, notamment en proposant déjà des initiatives contribuant à restreindre l’empreinte de la santé sur l’environnement. « Il est temps d’affermir la voix des infirmiers dans les politiques globales sur l’environnement, et de les soutenir dans leur place de leader dans la création d’un système de santé et d’un monde plus durable. »

Ce n’est pas la première fois que le CII s’associe à d’autres organisations et associations issues du monde de la santé pour défendre des positions en faveur de la transition écologique. Lors de la COP28, qui s’est tenue du 30 novembre au 12 décembre 2023, il faisait déjà partie de ces 48 millions de professionnels de santé qui réclamaient un abandon assumé des énergies fossiles, responsables notamment de l’augmentation de maladies respiratoires. À l’issue des négociations, le CII s’était ensuite déclaré déçu par le manque d’ambition d’un texte en demi-teinte, qui ne prévoit pas de calendrier fixe pour la sortie des énergies fossiles.

À Genève, les négociations de la dernière chance ?
Depuis le 5 août, les délégations de 175 pays se réunissent à Genève, en Suisse, pour tenter de parvenir à un traité encourageant à la réduction de la pollution plastique. Cette session fait suite à une précédente phase de discussions à Busan, qui s’est conclue sur un échec en décembre dernier. Les négociations actuelles ne suscitent toutefois pas beaucoup plus d’espoir, alors que se heurtent États qui réclament une baisse de la production de plastique (dont Union européenne, Mexique et Canada) et États, dont les pays pétroliers, qui souhaitent se contenter d’un traité se limitant à la gestion des déchets. De quoi compliquer la recherche d’un compromis, alors même que la question de la pollution plastique appelle des prises de position fortes : selon l’ Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la production de plastique pourrait tripler d’ici 2060, et ses déchets, peser jusqu’à 617 millions de tonnes d’ici 2040, contre 360 millions de tonnes en 2020. Par ailleurs, on estime à 4 ou 5% la part du secteur dans les émissions de gaz à effets de serre.
La Rédaction d'Infirmiers.com

Source : infirmiers.com