SEMAINE DE LA SÉCURITÉ DES PATIENTS 2025

Erreurs de prescription médicamenteuses : 95% des EIGS considérés comme évitables

Publié le 19/09/2025

À l'occasion de la semaine nationale de la sécurité des patients, la Haute autorité de santé publie plusieurs analyses sur les événements indésirables graves associés aux soins. L'un d'eux concerne les erreurs de prescriptions médicamenteuses et liste un certain nombre de préconisations pour en réduire la survenue. 

siège de la haute autorité de santé, logo, mur

Siège de la Haute Autorité de Santé (H.A.S.) à Saint-Denis.
Crédit photo : GARO/PHANIE

Les erreurs de prescription représentent 28% des erreurs médicamenteuses, observe la Haute autorité de santé (HAS) dans son rapport sur les événements indésirables graves associés aux soins (EIGS) dédié au sujet. Un tiers est dû à des erreurs de dose, un quart concerne des erreurs de choix du médicament, et 18,6% relèvent d’un « libellé non conforme », comme l’absence de précision sur la posologie ou la durée de perfusion. Or la prescription est « l’étape initiale du circuit du médicament », et une erreur à ce niveau impacte les suivants.

Elle recense ainsi dans son document 213 EIGS déclarés et retenus entre le 1er mars 2017 et le 31 décembre 2023. 44% concernaient des hommes, et 55% des femmes, et les patients âgés, de 60 à 80 ans et de 80 à 100 ans, sont les plus touchés. « La situation clinique des patients avant la survenue de l’EIGS a été jugée complexe dans 61 % des déclarations et non complexe dans 38 % des cas. » Ces événements sont majoritairement survenus au cours d’une prise en charge urgente ; seuls 28% des cas concernent une prise en charge non urgente. Quant aux lieux de survenue, le secteur sanitaire pèse pour 84% dans ces déclarations, contre 12% pour le médico-social et 4% pour la ville. L’analyse des 213 EIGS a par ailleurs révélé que l’événement avait entraîné la « mise en jeu du pronostic vital » dans 70% des cas, un décès dans 21%, et « un probable déficit fonctionnel permanent » dans 9% des cas. Enfin, la prise en charge de ces événements a consisté dans 31% des cas à arrêter le médicament impliqué et/ou à une prise en charge symptomatique, l’administration d’un antidote (10%), une adaptation des doses ou la reprise du traitement habituel (9%), et à la prescription d’un autre traitement (4%).

Des EIGS multifactoriels

« Les professionnels impliqués dans l’EIGS peuvent être les « secondes victimes » de l’évènement », continue la HAS, qui cite notamment des répercussions d’ordre psychologique (culpabilité, stress…). Or, en l’occurrence, 95% des EIGS ont été jugés comme évitables. « Un EIGS est toujours lié à une suite de dysfonctionnements ou causes profondes », rappelle-t-elle, citant ici des facteurs liés aux tâches à accomplir (protocoles indisponibles ou erronés, absence d’alertes dans les systèmes d’aide à la prescription, non-respect des bonnes pratiques…), liés à l’équipe (problèmes de communication), à l’environnement (charge de travail, effectifs), au soignant (supervision insuffisante ou absente, manque d’expérience ou de connaissance, rédaction manuscrite des prescriptions qui entraînent des erreurs) ou au patient (état de santé, antécédents lourds…).

Des préconisations supplémentaires pour éviter les erreurs

Parallèlement, si les médecins restent les principaux prescripteurs, le droit de prescription « s’est progressivement ouvert à d’autres professionnels de santé », dont les infirmiers et les pharmaciens. Au vu des conséquences de ces EIGS sur patients et professionnels, la HAS formule un certain nombre de préconisations, élaborées à partir des causes identifiées pour ces 213 événements analysés et qui viennent s'ajouter à celles qu'elle a déjà émises. Elle recommande ainsi de :

  • Veiller au respect des règles de bonnes pratiques de prescription, conformément à la règlementation (datées, lisibles, signées, avec précision du dosage et de la posologie et de la voie d’administration…), notamment en évaluant les pratiques et en organisant un retour systématique d’information à l’attention des prescripteurs.
  • Standardiser et simplifier la prescription pour en faciliter la compréhension par les professionnels et les patients. 
  • Adapter les principes généraux des règles de bonnes pratiques de prescription aux besoins spécifiques des populations particulières (enfants, personnes âgées, femmes enceintes, etc.). 
  • Interdire toute retranscription conformément à la règlementation, grâce à la mise en place d’un support unique de prescription ou en permettant la traçabilité en temps réel, par exemple.
  • Analyser en équipe les erreurs liées à l'informatisation du circuit du médicament (prescription, dispensation, administration) pour mettre en place des actions correctives. 
  • Sécuriser l’informatisation de la prescription, en favorisant l’acquisition de logiciels d’aide à la prescription (LAP) ou l’interopérabilité des systèmes informatiques.
  • Définir et mettre en œuvre une politique de formation à l’utilisation des logiciels d’aide à la prescription (LAP) ainsi que des logiciels métiers associés, avec un accompagnement pratique au poste, « si possible par un référent formé » (cadre, infirmier formateur, médecin sénior ou pharmacien), et la mise à disposition d’un guide d’utilisation « clair, actualisé et accessible » et qui puisse être facilement consultable.
  • Associer les professionnels de santé à la sélection et à l’implémentation des LAP, pour que ceux-ci soient plus adéquats aux réalités cliniques, notamment.

Ce rapport de la HAS s’inscrit dans la continuité de la publication de son 8ème bilan annuel des EIGS, publié le vendredi 12 septembre. À l’occasion de la semaine nationale de la sécurité des patients (du 15 au 19 septembre), consacrée au thème « Des soins sûrs pour chaque nouveau-né et chaque enfant », elle a diffusé son analyse des EIGS survenus lors de la prise en charge d’enfants de 0 à 1 an ainsi  qu’un rapport sur les EIGS en lien avec le personnel non permanent.

Méthodologie de l'analyse
Sur les 16 060 événements indésirables graves associés aux soins reçus entre le 1er mars 2017 et le 31 décembre 2024, la Haute autorité de santé a identifié 440 déclarations pouvant être en lien avec une erreur de prescription médicamenteuse. Ont ensuite été exclues 227 déclarations concernant des événements liés à des erreurs d’administration, à des suicides  ou lors de la transmission d’un résultat biologique ou d’imagerie. Les 213 déclarations retenues impliquaient 222 médicaments.

Accéder au rapport "Analyse des déclarations des évènements indésirables graves associés aux soins (EIGS) survenus lors de la prescription médicamenteuse"

La Rédaction d'Infirmiers.com

Source : infirmiers.com