OBSERVATOIRE NATIONAL DES VIOLENCES EN SANTE (ONVS)

Infirmiers et aides-soignants, premières victimes des violences en santé

Publié le 26/09/2025

Les infirmiers et les aides-soignants sont les deux catégories de professionnels de santé les plus concernées par des actes de violences en santé : elles représentent 90 % des professionnels de santé et 65 % de l’ensemble des victimes de violences, selon le dernier rapport de l'Observatoire National des Violences en Santé (ONVS). 

Equipe de soignants, couloir d'hôpital

Crédit photo : BURGER / PHANIE

Le dernier rapport de l'Observatoire national des violences en santé (ONVS)* acte, pour 2023-2024, «la persistance, voire l'aggravation des actes de violences» contre les soignants - que ces comportements surviennent en établissements de santé, dans le médico-social ou en structures de ville.  Le rapport recense 20 296 signalements en établissements (+6,7% par rapport à 2023) et 665 côté libéraux (+6,5%) en 2024 à partir de 556 déclarants (+83) en établissements et professionnels libéraux. «Cette dynamique ne doit pas occulter les nombreuses limites encore présentes, notamment la sous-déclaration persistante dans le secteur libéral et médico-social, ainsi que l'hétérogénéité des remontées d'informations entre les établissements, les services de soins et les régions», observent les auteurs du rapport.

Infirmiers et aides-soignants, premières victimes de ces violences 

Les premières victimes restent avant tout les infirmiers et les aides-soignants selon l'observatoire : ces deux catégories professionnelles représentent à elles seules environ 90% des professionnels de santé et 65% de l’ensemble des victimes de violences, un constat qui «reste exact en considérant le poids démographique respectif de ces deux professions dans le système de santé».

En 2023, l'ONVS a recensé 17 265 atteintes aux personnes et 2 751 atteintes aux biens, dont 1 000 signalements comportant les deux types d'atteinte. Cette configuration s'est maintenue en 2024 avec 18 822 atteintes aux personnes et 2 414 atteintes aux biens, dont 940 signalements combinant les deux catégories. «Il convient toutefois de nuancer cette analyse en considérant un possible biais méthodologique dans le processus de déclaration, note l'observatoire. Les professionnels pourraient être davantage enclins à signaler les atteintes personnelles, généralement perçues comme plus traumatisantes et nécessitant une intervention institutionnelle, que les incidents matériels parfois considérés comme des dommages collatéraux dans un environnement sous tension.» 

chiffres

Le degré 3 de gravité (à savoir les violences physiques) mais aussi le niveau 4 (violences avec armes) sont surreprésentés en psychiatrie et dans le handicap.

 

La psychiatrie et le médico-social concentrent 90% des incidents 

«Les agressions envers les personnes demeurent largement prédominantes par rapport aux atteintes aux biens signalées sur la plateforme, et la gravité des faits s'intensifie de manière générale», note l'observatoire. Dans le détail, psychiatrie et médico-social affichent un taux d'atteintes aux personnes très élevé à plus de 90% des incidents. Les violences physiques prédominent en établissements, avec «une différenciation des risques selon l'environnement de soins». Le degré 3 de gravité (à savoir les violences physiques) mais aussi le niveau 4 (violences avec armes) sont ainsi surreprésentés en psychiatrie et dans le handicap. Les urgences se distinguent par une prévalence d'insultes et injures (niveau 1). Viols (une trentaine par an) et agressions sexuelles (environ 130 cas) se concentrent en psychiatrie, en Ehpad et aux urgences. Côté libéraux enfin, on observe un glissement progressif des incivilités verbales, qui dominent toujours (59% des cas), vers des formes plus graves (atteintes à l'intégrité physique voire plus)

Degré de gravité des violences

"Possible détérioration du climat relationnel" en libéral  

En 2023 comme en 2024, les violences verbales (niveau 1) prédominent dans le secteur libéral (tous métiers confondus), représentant 60% des signalements en 2023 (368 cas) et 59% en 2024 (380 cas). Si les signalements de niveau 1 n'enregistrent qu'une progression modérée de 3%, les incidents de niveau 2 (menaces d'atteinte à l'intégrité physique) et de niveau 3 (violences physiques) connaissent chacun une augmentation significative de 11%, passant respectivement de 168 à 186 cas et de 64 à 71 cas. «Cette évolution laisse entrevoir une possible détérioration du climat relationnel dans l'exercice libéral, avec un glissement progressif des incivilités verbales vers des formes plus graves d'agression. Cette dynamique montre la nécessité de mesures spécifiques de prévention et de protection adaptées aux particularités de l'exercice isolé. Les violences avec arme (niveau 4), bien que numériquement limitées, ont connu une diminution notable de 50% entre 2023 et 2024, passant de 12 à 6 signalements. Cette évolution positive doit toutefois être interprétée avec prudence compte tenu de la sous-déclaration dans ce secteur».

Les contextes de ces violences

Dans son analyse, l'ONVS pointe la redondance de certains motifs de violences, en particulier «les règlements de compte et conflits familiaux qui se poursuivent dans l'enceinte hospitalière, transformant parfois l'établissement en théâtre de violentes confrontations». C'est le cas aussi «des atteintes au principe de laïcité avec le refus d'être examiné par un soignant du sexe opposé ou le port ostentatoire de signes religieux». S'ajoutent à cela «les actes d'automutilation ou les tentatives de suicide qui, au-delà du traumatisme pour le personnel, peuvent se transformer en violence contre les soignants lors de leur intervention».

Ces comportements sont exacerbés par la consommation d'alcool et de drogues, des temps d'attente jugés trop importants mais aussi par les difficultés d'accès aux soins dentaires, alors que «l'absence d'urgences dentaires dans certains établissements, la douleur aiguë ressentie pendant l'attente ou une prise en charge jugée inadéquate par le patient» peut amener à des situations explosives.

Des collègues ou la sécurité en renfort  

Par ailleurs, si l'ONVS constate une baisse de 16% du nombre de professionnels placés ensuite en arrêt de travail, ce chiffre est à relativiser selon l'observatoire : l'hypothèse la plus plausible est celle d'une «prise en charge insuffisante des victimes» et donc «une banalisation progressive des incidents ou des pressions institutionnelles conduisant à minimiser le recours aux arrêts de travail». De plus, les conséquences psychologiques peuvent être importantes, indépendamment de l'absence d'un arrêt de travail.

Sur le terrain, la gestion des incidents repose principalement sur l'intervention des soignants en renfort de leurs collègues. Le personnel de sécurité-sûreté joue également un rôle d'appui essentiel et ceux des services de sécurité-incendie, bien que non mandatés pour la sûreté des personnes et biens, sont fréquemment sollicités. L'intervention des forces de l'ordre reste limitée aux situations les plus graves.  

Violences contre les soignants : la loi renforce les sanctions

Après un parcours législatif d’un peu plus d’un an, la loi visant à renforcer les sanctions pénales contre les auteurs de violences aux soignants a été adoptée le 25 juin 2025 par le Parlement. Elle prévoit jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende selon les cas.

Retrouvez ici les documents ou liens utiles : 

* mis en ligne le 24 septembre 

La Rédaction d'Infirmiers.com

Source : infirmiers.com