Le but est de lutter contre les déserts médicaux ; et s’il hérisse les médecins, le bien-nommé « Pacte de lutte contre les déserts médicaux » agace également une partie des infirmiers. Présenté par François Bayrou le vendredi 25 avril 2025 lors d’un déplacement dans le Cantal, il prévoit de contraindre les médecins généralistes et spécialistes à donner des consultations à raison de deux jours par mois dans les zones où les difficultés d’accès aux soins sont les plus sévères. Problème pour le Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI) : il ne prend pas suffisamment en compte la profession infirmière comme une des solutions au manque de médecins.
Tel qu’il est rédigé, le « Pacte » mentionne les infirmiers dans le cadre de la loi infirmière, votée en mars 2025 par l’Assemblée nationale, ainsi que les infirmiers en pratique avancée (IPA), dans le cadre de l’ouverture à l’accès direct et à la primo-prescription. « La proposition de loi de refonte de la profession infirmière va permettre de mobiliser toutes leurs compétences dans la prise en charge des patients », comme la prise en charge des plaies ou l’organisation de consultations prévention, met-il ainsi en avant. Pour le SNPI, ce n’est toutefois pas suffisant. « Dans un document de 32 pages, l’infirmier n’apparaît qu’une seule fois, en bas de la page 22, au détour d’une phrase aussi vague que révélatrice. Pour les 640 000 professionnels qui assurent au quotidien l’accès aux soins dans les territoires, cette absence est lourde de sens dans un pays où l’offre de soins repose de plus en plus sur le tissu infirmier », s’insurge-t-il.
Une mesure inefficace et même contreproductive
Face à l’urgence de la situation, le syndicat dénonce une approche qui nie le collectif en optant uniquement pour une autre visant à contraindre les médecins. Sauf que sa faisabilité, pointe-t-il, est en question. Plus 40 000 médecins ont plus de 65 ans, et tous les praticiens sont déjà confrontés à des semaines chargées. « Ce n’est pas en surchargeant ceux qui tiennent encore debout qu’on stabilisera le système », tacle-t-il, identifiant des risques de découragement et de départs précipités ou retraites anticipées chez ces professionnels de santé. Et parallèlement, la mesure ne serait pas efficace. « Mobiliser des médecins quelques jours par mois ne règle en rien le problème structurel de l’installation durable dans les territoires désertés. On ne recrée pas un écosystème de soins avec des passages éclair. »
Face à l'urgence, miser sur le collectif
Les difficultés d’accès aux soins supposent une réponse collective, qui mobilise l’ensemble des professionnels de santé, médecins comme pharmaciens, infirmiers ou encore kinésithérapeutes, fait-il valoir en substance. Or l’invisibilisation des infirmiers, qui sont pourtant en première ligne, est d’autant moins acceptable qu’ils sont « la clé de voûte de la santé de proximité ». « Les ignorer dans la stratégie nationale d’accès aux soins revient à scier la dernière poutre du système. » « Les infirmières sont les grandes oubliées de ce pacte », dénonce Thierry Amouroux, porte-parole du SNPI. « Ce texte confirme que l’État refuse d’assumer la montée en compétence des soignants. La reconnaissance ne se fait qu’à la marge, jamais dans la réalité des pratiques. » Pour autant, la loi infirmière, qui prévoit une expérimentation sur l’accès direct ainsi qu’une extension des compétences de prescription des infirmiers a été unanimement saluée par ces professionnels comme étant une réponse à leurs attentes et besoin de reconnaissance. À condition qu’elle soit validée par les sénateurs, qui auront à l’examiner le 5 mai prochain.
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